Selon le collectif de soutien aux migrants et réfugiés Lyon 69, plus de 3200 rendez-vous pour des demandes de titres de séjour auraient été annulées par la préfecture du Rhône. En protestation, et pour demander le rétablissement des rendez-vous, le collectif organise un rassemblement devant les services locaux de l’État, vendredi 21 février. Il aura lieu à 18 h, rue Dunoir (Lyon 3ᵉ).
« Cette décision met en danger des milliers de personnes en situation régulière. Elle accentue leur précarité et ouvre la voie à toujours plus de ruptures de droits. Elle retarde le moment de la régularisation pour des centaines d’autres », s’indigne dans un communiqué le collectif, composé d’associations, de syndicats et de partis politiques.
Parmi les 3200 rendez-vous qui auraient été annulés, 2500 d’entre eux concerneraient des renouvellements de titres de séjour. En cas d’expiration de celui-ci, avant son renouvellement, les personnes se retrouveraient sans-papiers. Elles ne pourraient donc plus travailler et, sans récépissé de demande de titre de séjour, elles risquent l’expulsion du territoire.
Renouvellement de titres de séjour à Lyon : un temps d’attente multiplié par deux en un an
Depuis plusieurs années, la préfecture du Rhône est régulièrement épinglée pour son délai de traitement des titres de séjours et des demandes de naturalisation. En décembre 2024, il fallait 198 jours pour obtenir un premier titre de séjour et 139 jours pour un renouvellement.
En 2023, ces délais (déjà conséquents), étaient respectivement de 159 et 58 jours. La situation a gravement empiré pour les personnes déjà titulaires, et donc, insérées dans la société. Dans un article de 2023, nous avions documenté l’impact concret sur les vies des personnes exilées en attente d’une régularisation.
La faute, en partie, aux manques de moyens alloués aux services de la préfecture sur ce sujet… Mais aussi à la dématérialisation totale de ces démarches depuis 2020. Les étrangers qui voulaient faire une demande de titre de séjour n’avaient plus qu’une plateforme, intitulée « démarches simplifiées », pour réserver un créneau de rendez-vous.
En 2022, le tribunal administratif de Lyon avait estimé la décision illégale, en se justifiant ainsi : « Les préfets n’étaient pas compétents pour rendre obligatoire l’emploi de téléservices pour le dépôt des demandes de documents de séjour ». En effet, la préfecture du Rhône avait pris cette décision avant même qu’un décret national soit pris pour mettre en place la dématérialisation.
Un décret qui avait été annulé en partie par le Conseil d’État, en juin 2022. Il demandait en place une « solution de substitution » à la démarche entièrement en ligne, pour permettre l’accès de tous et toutes à un service public.
C’est notamment une des revendications du collectif de soutien aux migrants et réfugiés Lyon 69. Les militant·es demandent « la mise en place d’un accès facilité et rapide aux guichets de la préfecture, en alternative à la dématérialisation, conformément aux exigences légales, et ce, de façon inconditionnelle ».
Accès aux titres de séjour : un combat qui se compte en année
Pour certaines personnes migrantes, pourtant insérées et habitant en France depuis plusieurs années, l’obtention d’un titre de séjour peut être un parcours du combattant. L’exemple de Kéletigui Sylla, dit « Kélé », 24 ans, en est un bon exemple. Après près de 10 ans sur le territoire, et avoir été accueilli comme mineur isolé en France, la préfecture du Rhône a remis en cause sa minorité d’alors, et lui a délivré une Obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Le 13 décembre 2024, le tribunal administratif avait finalement annulé l’OQTF. Il a demandé à la préfecture de lui délivrer un titre de séjour provisoire. Or, l’État a fait appel de cette décision en début d’année 2025. Le 6 février, la commission du titre de séjour a tout de même délivré un avis favorable à la délivrance d’une carte de séjour à Kélé, ont annoncé ses soutiens. Jusqu’à son obtention réelle, son sort est en suspens.
Une histoire qui risque de se répéter encore et encore. Avec la publication récente d’une circulaire par le très droitier ministre LR Bruno Retailleau (texte qui a seulement valeur de recommandation), les conditions d’obtention des autorisations de séjour ont été restreintes.
Parmi les changements : les étrangers devront justifier d’une présence de sept ans sur le territoire français pour pouvoir faire une demande (contre cinq auparavant), le niveau de français requis a été rehaussé, les refus de titres de séjour s’accompagneront systématiquement d’une OQTF, entre autres…
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