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Gel du pass culture à Lyon : « une douche froide » pour les enseignants

L’annonce du gel du pass culture collectif a été vécue comme une douche froide par le corps enseignant et les acteurs culturels de Lyon. La perte de ces fonds, qui servent à financer des sorties et projets culturels pour les élèves, fragilise toute une filière.

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Le cortège "culture" avec la banderole "art en grève" lors de la manifestation interprofessionnelle contre la réforme des retraites du 9 janvier. ©LB/Rue89Lyon
Photo d’illustration.

L’annonce a été accueillie avec stupeur par le corps enseignant et le monde de la culture de Lyon, jeudi 30 janvier. Faute de budget, le ministère de l’Éducation nationale a gelé tous les financements collectifs du pass culture jusqu’à la fin de l’année scolaire.

Concrètement, ce fonds doté par l’État sert à financer des sorties scolaires, des actions culturelles ou des opérations d’éducation aux médias dans les établissements scolaires. Et ce, en partie pour combler un manque de budget pour les collèges et lycées, financés respectivement par les Départements et les Régions.

Gel du pass culture à Lyon : une décision « brutale »

Cette décision, prise brutalement et sans concertation, a pris de court toute une filière, des professeurs documentalistes aux acteurs du secteur culturel et de l’éducation aux médias. Jeudi 30 au soir, plusieurs d’entre eux se sont rués sur la plateforme Adage pour tenter de faire valider le financement de projets en cours.

Mais face à l’afflux de demande, le site a planté, avant d’être fermé le lendemain. Devant la gronde du corps enseignant et du monde de la culture, la (nouvelle) ministre de l’Éducation nationale Élisabeth Borne a assuré que tous les projets « pré-réservés » mais pas encore validés seraient financés. Un sursis bienvenu, mais pas suffisant pour rassurer profs, cinémas, théâtres et acteurs du monde culturel.

Une professeure documentaliste d’un lycée du 3ᵉ arrondissement de Lyon a passé sa soirée du 30 janvier à tenter de faire valider des crédits pour des projets déjà engagés. Sans avoir la certitude qu’ils seront validés.

Des sorties cinéma prévues pour des collégiens et lycéens ont d’ores et déjà été annulées. « On aurait pu renégocier les budgets…, se désole l’enseignante. Là, on a passé du temps à monter des projets que l’on n’a pas pu réserver. »

Pass culture à Lyon : une part des crédits pas utilisés

La décision est d’autant plus dure à comprendre que dans son lycée, les crédits alloués au pass culture collectif n’avaient pas tous été utilisés (ceux-ci sont définis durant l’été, calculés sur la base du nombre d’élèves, ndlr).

« Au 31 janvier, nous avions dépensé 5 281,38 €, réservé 4 042 €, et pré-réservé 620 €. Il nous restait 4 816,62 € de disponible », détaille la documentaliste. Idem dans un autre lycée de l’Ain, où l’annonce du gel des financements a été vécu comme « une douche froide » par les enseignants concernés. Dans cet établissement aussi, un gros tiers des crédits n’a pas été consommé. Des opérations d’éducation aux médias y sont menacées.

Dans une communication interne, consultée par Rue89Lyon, le ministère avait pourtant assuré que « le plafond de dépenses fixé pour la période janvier-août 2025 (50 millions d’euros) (avait) été atteint », suspendant ainsi toutes les nouvelles offres. Dans un premier mail, l’État avait assumé que l’Éducation nationale se trouvait dans une situation budgétaire « inédite », et que ce gel anticipé des financements servait à « préserver la possibilité d’initier des actions à la rentrée 2025 ».

Gel du pass culture à Lyon : un « tour de passe-passe » de l’État ?

Reste que ce chiffre de 50 millions un poil « sorti du chapeau » a du mal à convaincre. « On nous fait miroiter une somme virtuelle : on voit que ce n’est pas possible que tous les établissements dépensent leurs crédits… », s’interroge la documentaliste du 3ᵉ.

Elle est suivie dans son constat par plusieurs acteurs de la culture. Dans une tribune cosignée notamment par de nombreux cinémas indépendants, ils s’interrogent : « A-t-on affaire à un tour de passe-passe de la part de l’État ? Car si pour la deuxième année consécutive, la part collective du Pass culture dépasse le budget qui lui est alloué, ce n’est pas parce que les professeurs en abusent, mais parce que le budget du Pass a été sous-évalué ! ».

Le secteur culturel déjà impacté

Le monde de la culture est, lui aussi, durement touché. « Des centaines de structures sur tout le territoire verront des réservations de spectacles, de séances et d’animations disparaître de leur planning et de leurs recettes du jour au lendemain », souligne aussi la tribune. Un manque à gagner énorme pour un secteur déjà lourdement touché par des baisses de subvention et des budgets difficiles à boucler.

Une autre tribune, signée par plus de 400 enseignants, craint quant à elle que l’arrêt des financements du pass culture ne renforce les inégalités culturelles entre élèves.

« On a l’impression que ce n’est que le début, on a peur pour la suite… Rien ne dit qu’en septembre les financements reviendront », craint Coralina Picos, membre de l’association d’éducation aux médias « Ça presse », qui organise en mars les rencontres internationales du dessin de presse (dont Rue89Lyon est partenaire, ndlr).

« Des projets en train d’être construits tombent à l’eau », se désole-t-elle. Avec, en bout de chaîne, un manque à gagner pour des journalistes indépendants et des intermittents qui ne complètent pas leurs heures. Dans le cadre du festival, près de 1500 élèves devaient se rendre à l’hôtel de Ville de Lyon pour rencontrer dessinateurs et journalistes. Au moins trois classes ne pourront finalement pas venir.


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