1er mois à 1€

Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Pfas : pourquoi la justice autorise (finalement) l’extension de l’usine Daikin ? 

Ce jeudi 23 janvier, le tribunal administratif a annoncé ne pas suspendre le nouvel arrêté mis en place par la préfecture pour permettre l’extension de l’usine Daikin, productrice de Pfas. Il s’était pourtant opposé à un premier arrêté. On vous explique cette décision de justice. 

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Lyon, abonnez-vous.

Arkema et Daikin
Les deux industriels ciblés dans le scandale des PFAS, Daikin et Arkema, sont sur la même unité de production.

« C’est une déception bien sûr, mais cela n’enlève rien à notre détermination. » Lucas Miguel, du collectif Pfas contre terre, est légèrement amer, ce jeudi 23 janvier. Le tribunal administratif de Lyon n’est pas allé dans le sens des habitants en lutte contre la pollution aux perfluorés, à Oullins-Pierre-Bénite. Il a décidé de ne pas suspendre l’arrêté mis en place par la préfecture pour autoriser l’extension de l’usine Daikin, après une première décision favorable aux militants, en juin dernier.

Un bon militant le sait : quand l’État et les groupes industriels ne vont pas votre sens, le recours au tribunal administratif, compétent sur les arrêtés préfectoraux, est souvent la dernière option possible. Dans l’Ouest lyonnais, par exemple, les militants de Quicury sont devenus des experts en procédure judiciaire pour bloquer des projets de construction de zone logistique.

De même, au sud de Lyon, le combat se joue (beaucoup) devant les juges. La première décision du « TA », en juin, avait ainsi été un coup de tonnerre dans le scandale des perfluorés qui secoue la région depuis 2022. Alors que nombre de procédures restaient sans suite depuis le début de l’affaire des « Pfas », les militants semblaient avoir trouvé une manière de contrarier les industriels.

Parmi eux, Daikin. Dans l’ombre du géant Arkema, le discret groupe japonais est parvenu à étendre son usine avec une nouvelle unité de production, en continuant à utiliser des substances perfluorées jusqu’en 2027…

Face à ce « stop » de la justice, la préfecture avait très rapidement réagi en dégainant un deuxième arrêté pour que Daikin poursuive son agrandissement. Un « passage en force » pour les collectifs, qui s’était suivi d’un deuxième recours. Celui-ci n’a pas eu le même succès que le premier.

Avec Daikin : des Pfas, oui, mais de meilleurs « filtres »

Les juges ont estimé que le nouveau dossier déposé par Daikin comportait « des améliorations visant à réduire fortement les pollutions ». Dans sa communication, il développe :

« Le projet d’installation de pré-compound comprend désormais, en plus du dépoussiéreur déjà mis en place, un pré-filtre et une unité de filtration absolue par des filtres HEPA 14 de très haute efficacité. Ils estiment que dans ces conditions, les émissions de poussières de cette unité seront négligeables, de l’ordre de 2 grammes par an, sans d’ailleurs qu’il soit certain que du bisphénol AF serait présent dans ces poussières très résiduelles. »

Le bisphénol AF, ce Pfas également reconnu comme perturbateur endocrinien et cancérigène, selon les collectifs, était particulièrement dans le viseur. Malgré la défaite, la mise en place de ce filtre est, déjà, une petite « victoire » pour les militants. « Sans notre action, ce filtre n’aurait pas été mis en place », commente Me Sébastien Bécue.

L’avocat de l’association Bien vivre à Pierre Bénite et l’association Générations futures, en charge de la requête, tentait de voir le verre à moitié plein, ce jeudi. Tout comme les habitants. « Nous notons l’admissibilité de l’intervention de Louis Delon, ce qui est une forme de légitimation des démarches scientifiques citoyennes entreprises », indique ainsi Lucas Miguel. Les analyses faites par ce maraîcher engagé dans la lutte contre perfluorés, au sud de Lyon, ont été prises en compte par la justice.

À Lyon, la lutte judiciaire continue contre l’unité de Daikin

Le gros moins ? Le fait que le juge ne demande pas une étude d’impact à l’industriel sur la pollution qu’il a générée depuis des années. Depuis le début, c’est ce point qui motive les collectifs et habitants. Or, la décision ne s’est attardée que sur les potentielles pollutions à venir, pas sur « l’historique ».

C’est là où le bât blesse, pour Sébastien Bécue. « Si cette étude ne se fait pas maintenant, au moment de l’extension. Quand va-t-elle être faite ? s’agace l’avocat. C’est au pollueur de la payer. En attendant, on impose aux habitants de les faire eux-mêmes, et de s’organiser pour aller devant la justice… »

Reste que l’affaire n’est pas finie. Pour l’heure, il ne s’agit que d’une décision « en référé » – soit une décision prise dans une procédure d’urgence. Le jugement sur « le fonds » ne sera connu qu’en fin 2025. Les collectifs ont également toujours la possibilité de se pourvoir en cassation sur cette décision.


#Pollution aux perfluorés

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles
Partager
Plus d'options