C’était l’une des dernières affaires de violences policières encore en cours à l’issue du mouvement des Gilets jaunes. Et l’une des plus retentissantes. Rabah Souchi, un commissaire de police, a été reconnu coupable d’avoir ordonné une charge policière « non justifiée, non proportionnée et non nécessaire » contre un petit groupe de manifestants à Nice, en mars 2019. Geneviève Legay, une retraitée de 73 ans, avait été gravement blessée, poussée au sol par un policier.
Il a été condamné ce vendredi 8 mars à six mois de prison avec sursis par le tribunal de Lyon, une peine dans la lignée des réquisitions formulées à l’issue de son procès, en janvier dernier.
Petit rappel des faits. À l’occasion de l’acte 19 des Gilets jaunes, une cinquantaine de manifestants déambulent pacifiquement dans le centre de Nice, lors d’une manifestation interdite par la préfecture (interdiction qui sera plus tard retoquée par la justice administrative). Après des sommations floues et alors que le dispositif entre policiers et gendarmes a du mal à se coordonner, Rabah Souchi donne l’ordre à ses hommes de charger sur les derniers manifestants présents, au milieu des badauds et des journalistes.
Dans la bousculade, violente, Geneviève Legay sera grièvement blessée à la tête après avoir été poussée par un policier. La retraitée se verra prescrire « une ITT supérieure à huit jours ». En réalité, celle qui est à l’époque militante de l’association Attac, est victime d’un grave traumatisme crânien et a plusieurs côtes fracturées. Elle passera deux mois à l’hôpital.
Affaire Geneviève Legay : pas de conséquences pour le commissaire ?
La condamnation de Rabah Souchi, qui avait été décoré par l’exécutif pour son rôle dans le maintien de l’ordre durant le mouvement des Gilets jaunes, ne devrait cependant pas avoir de conséquences sur la suite de sa carrière. En effet, le tribunal n’a requis aucune inscription sur le casier judiciaire du commissaire.
En outre, le tribunal a considéré que les faits reprochés à Rabah Souchi ne constituait pas « une faute personnelle ». Il s’est donc déclaré incompétent pour juger des dommages et intérêts dus à la victime, laissant planer un gros doute sur une éventuelle indemnisation de Geneviève Legay.
A l’issue de l’audience, en janvier dernier, la partie civile, représentée par le médiatique avocat Arié Alimi, avait voulu faire de ce procès celui des donneurs d’ordre. D’autant que le lendemain des faits, le président Emmanuel Macron devait rencontrer son homologue chinois Xi Jinping dans la cité des Anges, imposant un important dispositif policier.
La personnalité « autoritaire » du policier mise en avant
L’enquête de police avait mis en évidence des défaillances dans la chaîne de commandement. La personnalité « autoritaire » de Rabah Souchi avait également été mise en avant, notamment grâce à plusieurs témoignages accablants de gendarmes ayant participé à l’opération de maintien de l’ordre de mars 2019 à Nice.
Il a donc été condamné seul pour « complicité de violence par personne dépositaire de l’autorité publique ». Le major qui a directement bousculé Geneviève Legay, lui, avait été cité comme simple témoin assisté et n’était pas présent lors de l’audience de janvier.
Rabah Souchi a dix jours pour faire appel. Sollicité par Rue89Lyon a l’issue du rendu du délibéré, il a manifesté son refus de répondre à nos questions d’un geste agacé. Contacté, l’avocat de Geneviève Legay, Arié Alimi, n’avait pas répondu à nos questions à l’heure de la publication de l’article.

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