Lyon est l’une des villes françaises où il est le plus difficile de se loger. En position de force, des propriétaires n’hésitent pas à faire grimper les loyers face à une demande importante. Pour répondre à cette problématique, la Métropole de Lyon a lancé le 1er novembre 2021 l’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne. Pour la première fois, une enquête diligentée par une association indépendante revient sur les deux années écoulées.
La Confédération syndicale des familles de la métropole de Lyon et du Rhône (CSF) – association agréée de défense des locataires – s’est donné pour but de vérifier la conformité de l’encadrement des loyers dans une enquête parue le 29 juin. Son verdict : la loi est largement ignorée.
Seules 17,90% des annonces sont conformes à l’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne d’après la CSF
En théorie, à Lyon et Villeurbanne, le montant des loyers est plafonné. La simulation des loyers de la CSF a permis de constater que seul un logement sur deux a un loyer conforme à l’encadrement. La moitié des loyers sont hors-la-loi en le dépassant.
Déjà, une grande majorité des annonces n’indiquent pas le loyer plafond. Un moyen pour les propriétaires de proposer un prix au-dessus du montant maximal, tout en passant inaperçu. Ce n’est pas l’unique souci. De plus, de nombreux compléments de loyers sont également injustifiés sur les annonces, ce qui est aussi une obligation légale.
Les annonces devraient afficher des mentions imposées par la loi. Parmi celles-ci : le fait que la zone est soumise à l’encadrement des loyers, la classe du Diagnostic de performance énergétique, le montant de la caution, des charges…
« Seules 17,90% des annonces sont conformes. »
La Confédération Syndicale des Familles de la métropole de Lyon et du Rhône
Un manque d’information à déplorer pour les locataires. Louer une passoire thermique peut engendrer des coûts supplémentaires non négligeables.
Des résultats qui divergent entre l’enquête de la Métropole et celle de la CSF
Le vice-président en charge du logement de la Métropole de Lyon, Renaud Payre, a déclaré à Rue89Lyon qu’une enquête a aussi été réalisée par l’Équipe métropolitaine de l’habitat. Les résultats comme les méthodes de l’enquête diffèrent entre la CSF et la Métropole.
La CSF a retenu 1553 annonces, examiné un seul site (Leboncoin), sur une période d’un mois (de mai à juin 2023). L’Équipe métropolitaine de l’habitat a retenu 1630 annonces, et examiné 6 sites de location durant une période d’analyse de huit mois (jusqu’à fin 2023).
Pour la CSF seules 17,90% des annonces sont conformes à la loi, contre 59% dans l’enquête de la Métropole. Pour la CSF 50% des annonces dépassent le plafond, contre 18% pour la Métropole. Finalement, 22% des annonces comprendraient un complément de loyer d’après la CSF, 26% d’après la Métropole.
Ce différentiel s’explique selon Renaud Payre par la méthode d’enquête :
« La CSF prend davantage de critères en compte. L’équipe métropolitaine de l’habitat s’est uniquement concentrée sur les montants de loyer et donc leur respect de l’encadrement. »
Par exemple, la Métropole n’a pas prêté attention à la présence ou l’absence des mentions imposées par la loi dans les annonces. Parmi ces mentions : le fait que la zone est soumise à l’encadrement des loyers, la classe du Diagnostic de performance énergétique, le montant de la caution, des charges…
Le difficile contrôle de l’encadrement des loyers
Des nombreuses fraudes qui semblent, pour l’instant, insuffisamment punies. Un constat admis par Renaud Payre qui renvoie la responsabilité sur l’État. Il assure que dès qu’une annonce dérogeant à la loi est repérée, la Métropole engage des procédures, allant jusqu’à la saisie de la Direction des fraudes : « Seul l’État peut sanctionner les propriétaires hors la loi. »
Il en va de même pour les compléments de loyer, que la CSF juge, pour bon nombre d’entre eux, injustifiés. Des compléments aux contours flous, définis sur le site de la Métropole :
« Un complément de loyer est possible si votre bien présente une caractéristique particulière au regard des logements voisins (balcon, terrasse, vue exceptionnelle…) »
Un exemple issu de l’enquête de la CSF révèle qu’un propriétaire a demandé un complément de loyer en raison de l’installation d’une VMC. Pour rappel, l’aération des logements est obligatoire depuis 1982. Renaud Payre, de son côté, dénonce un « vide législatif ».
La CSF appelle à la vigilance sur l’encadrement des loyers
En conclusion de son étude, la CSF s’est engagée à accompagner les locataires en cas de loyer ne respectant pas l’encadrement des loyers.
« À informer le plus de locataires possibles sur le fonctionnement de ce dispositif, à les inciter à vérifier la conformité de leur loyer avec la loi et à saisir la Commission départementale de conciliation en cas de loyer ou complément de loyer supérieurs au plafond maximum. »
La Confédération Syndicale des Familles de la Métropole de Lyon et du Rhône
Un engagement que Renaud Payre salue, sans pour autant accepter les résultats avancés par l’association :
« Même si je ne suis pas d’accord avec les résultats de la CSF, je suis content que l’association s’empare du sujet. Les associations de locataires devraient davantage accompagner les locataires dans les procédures de signalement. »
Une première enquête qui pose donc les limites d’une mesure à l’objectif honorable. Aujourd’hui, pour bon nombre de propriétaires hors-la-loi, la spéculation foncière suit son cours. Une tendance qui semble difficile à enrayer, faute de mesures d’évaluation et de coercition suffisantes.
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