Le monde de la culture lyonnais accuse une nouvelle salve. À l’issue de la commission permanente de la région Auvergne Rhône-Alpes, qui s’est tenue vendredi 12 mai, plusieurs acteurs culturels ont vu leurs subventions diminuées, sinon supprimées.
Le festival Woodstower, entre autres. 34 000 euros, soit l’intégralité du soutien financier alloué à l’événement, retirés sans sommation. « Aucune explication n’a accompagné les raisons qui ont motivé cette décision (…) aucune demande de rendez-vous n’ont obtenu de réponse ces dernières semaines », regrettent les organisateurs dans un communiqué publié sur leur page Facebook. La Région est pourtant partenaire du festival depuis plus d’une vingtaine d’années.

À Lyon, la Biennale d’art contemporain et le Théâtre Nouvelle Génération (TNG) accusent également une baisse (50 000 euros dans le cas de la première), voire une suppression de la totalité de leur soutien financier régional. Une punition, dans le cas du second, signée Laurent Wauquiez, non content des propos tenus récemment par Joris Mathieu, son directeur. La sentence a définitivement été votée en commission – sans le soutien des groupes de gauche, qui se sont abstenus ou opposés.
La situation, fortement relayée et contestée, n’a pas semblé irriter la première vice-présidente de la Région, qui présidait l’assemblée en l’absence de Laurent Wauquiez. D’après Lyon Capitale, Stéphanie Pernod y voyait même un moyen de faire émerger une « vérité populaire ».
Deux ans de baisse continue des subventions des structures culturelles de Lyon
Ces coupes budgétaires s’inscrivent donc dans un contexte (très) tendu. Au printemps 2022, le président de Région avait annoncé une baisse conséquente des subventions à la culture, justifiée par un « rééquilibrage territorial » voulu « solidaire et équitable au cas par cas », selon un article du Progrès. Dès lors, 60% du budget régional devait être distribué différemment vers les territoires, « jusqu’aux plus éloignés ». Des opérations ponctionnées sur les structures des grosses villes, en grande partie celles de la métropole de Lyon.
Le 18 mai 2022, Rue89Lyon publiait un tableau des baisses de subvention de la Région concernant les acteurs culturels lyonnais. Le voici, un an plus tard, actualisé des dernières coupes opérées. Les données sont extraites des délibérations émises lors des commissions, les dernières datant des mois de mars et mai 2023.
Les cases manquantes correspondent à des dossiers qui n’ont pas encore été votés. Aussi, par souci de lisibilité, ne figurent pas ces nouvelles attributions de subventions. En 2023, une poignée d’acteurs lyonnais se partagent une enveloppe d’approximativement 209 000 euros. Ce montant peut être amené à évoluer.
Les plus grosses sommes, 50 000 et 60 000 euros, sont acheminées en direction d’espaces de création, production et diffusion musicaux. La salle de concert Le Marché Gare hérite de la première somme ; l’association RESEAU, qui a contribué à la création du Périscope, bénéficie de la seconde. Le festival international des Quais du polar, lui, récupère 28 000 euros.
« C’est redonner un coup de fragilité dans un secteur qui n’est pas encore guéri »
À noter également, le retour pratiquement à l’équilibre de 2021 des budgets alloués à l’Opéra, qui hérite de 2,5 millions d’euros de subvention, ainsi que l’Institut Lumière, de retour à 660 000 euros.
Ces efforts ne suffisent pas à contenter l’opposition, qui s’unit pour dénoncer un manque de communication et de transparence de la Région. En particulier Pascale Bonniel-Chalier, incertaine de la formule « rééquilibrage », utilisée par la présidence du conseil régional.
« Pour l’instant, nous ne voyons que des baisses, tempête la conseillère régionale, membre de la commission culture. Sur les structures de spectacle vivant, les lieux de diffusion accusent une baisse de 445 000 euros. Les festivals seraient soutenus à hauteur de 890 000 euros - et non 1 300 000 euros, comme la vice-présidente [Sophie Rotkopf, ndlr] l’avait annoncé. »
Par ailleurs, elle saisit l’occasion pour contester l’ensemble des opérations :
« Il y a encore des traces des deux confinements dans le domaine du spectacle vivant. Les structures culturelles sont fragiles. Baisser les subventions, même en 2023, c’est redonner un coup de fragilité dans un secteur qui n’est pas encore guéri. »
Les dernières positions de la Région se sont frayées un chemin jusqu’en conseil municipal, qui s'est tenu ce jeudi 11 mai. Alors qu’il s’adressait aux élus LR, Grégory Doucet a relevé une tournure des événements « très grave » :
« Je me tourne à ma droite pour que vous portiez ce message au président de Région, a commenté le maire écologiste. (...) Il serait peut-être temps qu’en tant qu’élus lyonnais, vous fassiez entendre notre voix et que vous défendiez les institutions lyonnaises. »

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