Le 23 février 2022, le député de la 2e circonscription de Lyon, Hubert Julien-Laferrière (Génération écologie, membre du groupe Écologiste et de la Nupes), fait les louanges d’un homme d’affaire camerounais à l’Assemblée Nationale lors d’une séance de la commission des affaires étrangères, dont il est membre. Il évoque le « Limcoin », cryptomonnaie créée par Émile Parfait Simb, et demande à ce que la France « accompagne cette émergence ».
Problème : cet homme d’affaire est aujourd’hui soupçonné d’être l’organisateur d’une fraude massive aux cryptomonnaies en Afrique. Deuxième couac : cette intervention du député lyonnais lui a été soufflée par le lobbyiste Jean-Pierre Duthion, révèlent notre partenaire Mediapart. Ce dernier est au cœur de l’enquête « Story killers » du consortium Forbidden Stories.
Un député de Lyon à l’écoute d’un lobbyiste pour des puissances étrangères ?
Jean-Pierre Duthion est accusé d’avoir fourni au journaliste de BFMTV Rachid M’Barki des microreportages réalisés par des puissances étrangères. Le journaliste a depuis été écarté de la chaîne d’info.
Quant à Hubert Julien-Laferrière, il aurait été approché pour la première fois par Jean-Pierre Duthion fin 2021. Celui-ci lui a ensuite envoyé par message un article de RFI sur Émile Parfait Simb, message qui a donné l’idée au député à intervenir à l’Assemblée. Contacté par Mediapart, Hubert Julien-Laferrière assure ne pas avoir été rémunéré et reconnaît avoir « un peu déconné». Il explique ne pas avoir su que Duthion était lobbyiste :
« Il se présentait comme journaliste, qui faisait des piges à droite à gauche,raconte le député. Il a un côté bling-bling qui ne m’intéressait pas trop, mais [il est] intelligent, intéressé par le Moyen-Orient et l’Afrique. »
À Lyon, le député reconnaît de nouveau « une erreur d’appréciation manifeste »
Dans un communiqué paru quelques heures après la sortie de l’article de Mediapart, Hubert Julien-Laferrière revient plus en longueur sur cette affaire et reconnaît de nouveau « une erreur d’appréciation manifeste ».
« Je démens fermement les affirmations selon lesquelles je serais “au service” de JP Duthion. Je réfute l’idée que je pourrais me servir d’une quelconque façon de mes statuts de secrétaire, ou référent de la commission au sein du groupe écolo, pour porter des sujets téléguidés », écrit-il.
Peu après, son opposant macroniste aux dernières législatives, Loïc Terrenes a également réagi à cette affaire dans un communiqué.
« Comment [Hubert Julien-Lafferière] justifie-t-il de tels propos en totale contradiction avec son propre programme de campagne et à celui du parti qui l’a soutenu, EELV ? Peut-il nous garantir que cette prise de parole n’a fait l’objet d’aucune contrepartie financière, notamment dans le cadre du financement de précédentes campagnes électorales ? Conserve-t-il toujours des liens avec des représentants d’intérêts comme M. Duthion ? »

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