24 décembre 2021, à la veille de Noël. En fin d’après-midi, le commissariat de Vaulx-en-Velin appelle en urgence la SPA de Lyon et du Sud-Est.
Des dizaines d’animaux sont livrés à eux-mêmes dans un logement laissé vacant depuis plusieurs semaines. Sans eau ni nourriture, des lapins, des tortues, des lézards, de nombreuses gerbilles et d’autres rongeurs pataugent dans leurs déjections et les cadavres d’autres animaux.
Le soir-même, 19 animaux ont pu être sauvés et recueillis au refuge de la SPA de Lyon et du Sud-Est, à Brignais.
Si l’association recueille chaque année des milliers de chiens abandonnés, sa mission ne s’arrête pas là. Comme pour ce sauvetage à Vaulx-en-Velin, le service « enquête » de la SPA de Lyon et du Sud-Est est fréquemment sollicité par des particuliers ou les forces de l’ordre, pour intervenir sur des cas de maltraitance animale.
Violences physiques ou même sexuelles, négligence, combats organisés… Dans les quatre départements couverts, le Rhône, la Loire, l’Ain et l’Isère, les signalements ne cessent pas.
30 signalements de maltraitance par semaine au service enquête de la SPA de Lyon
« C’est un sacerdoce, commente Sébastien Grève, responsable de l’un des deux refuges de la SPA de Lyon et du Sud-Est, à Brignais. Nous avons quatre employés à temps plein. Chaque semaine, il y a 30 signalements. »
Lui-même a été inspecteur dans ce même service enquête de la SPA de Lyon et du Sud-Est pendant 7 ans, avec 300 saisies par an environ.
« Une fois, on a trouvé une quinzaine de cadavres de chiens dans le vide sanitaire d’une maison », se souvient-il.
Téléphone vissé à l’oreille, Sébastien Grève s’excuse et s’éloigne de quelques pas. Un inspecteur vient de découvrir un cadavre de chien.
Dans le vaste bureau du service enquête, une jeune femme prénommée Julie est pendue au téléphone tandis qu’un gros lapin inspecte les lieux. Au bout du fil, un énième signalement concernant un élevage clandestin de chiens, bien connu de la SPA de Lyon.
« Chaque jour, on a au moins un signalement, explique Julie en raccrochant. Il y a des gens qu’on suit pendant des années. On ne peut pas aller plus loin que la législation. »
D’après le texte en vigueur de cette législation, pour un chien par exemple, il suffit que l’animal ait un local avec de la lumière et une aération, un enclos de 5 m² ou une niche, de l’eau et de la nourriture, et une longe d’au moins trois mètres s’il est attaché.
80 plaintes pour maltraitance déposées chaque année par la SPA de Lyon et du Sud-Est
Chaque signalement fait au service enquête de la SPA de Lyon est anonyme. L’association procède ensuite en partenariat avec les forces de l’ordre, les mairies et les directions départementales de la protection des populations, selon les situations.
Les deux inspecteurs du service enquête de la SPA de Lyon couvrent à eux seuls quatre départements : le Rhône, la Loire, l’Ain et l’Isère. Après chaque signalement, ils se déplacent sur les lieux au maximum dans les 15 jours. Dans le cas où un animal serait en urgence vitale, ils arrivent immédiatement.
La SPA peut également se constituer partie civile et porter plainte contre les propriétaires maltraitants. Ce qu’elle fait environ 80 fois par an.
Les animaux rescapés sont recueillis par le refuge de Brignais et soignés. Certains peuvent aussi être pris en charge par des associations spécialisées, comme par exemple le Groupement de Réflexion et d’Action pour l’Animal (Graal) qui s’occupe des animaux de laboratoire.
Sébastien Grève se désole de la lenteur des procédures judiciaires pour maltraitance qui peuvent durer jusqu’à deux à trois ans, que les animaux maltraités passeront au refuge, sans pouvoir être proposés à l’adoption.
Des chiens catégorisés, des malinois et même des moutons saisis
Souvent, les inspecteurs interviennent auprès de personnes souffrant de troubles psychiatriques comme les syndromes de Diogène et de Noé, qui consistent à accumuler des objets et des animaux chez soi. Mais aussi dans le cadre du trafic de chiens.
« Il y a six mois, on a saisi 56 chiens de race chez une éleveuse de la Loire, c’était un élevage clandestin, commente Sébastien Grève. On a aussi eu récemment un cas de zoophilie sur un chiot dans le Jura. »
Parmi les chiens saisis pour maltraitances, les chiens catégorisés (comme les pit-bulls, pour exemple) et les bergers belges malinois sont sur-représentés.
Le service enquête constate une augmentation du nombre de signalements, qui est liée, selon ses agents, au fait que les témoins de situations de maltraitance seraient désormais plus prompts à agir. Ainsi, les espèces saisies par la SPA de Lyon varient.
« On intervient de plus en plus sur les abattages illégaux, surtout en période de l’Aïd », précise Sébastien Grève qui évoque la saisie récente de 12 moutons.
D’après lui, comme dans le cas de Vaulx-en-Velin cité au début de cet article, les « nouveaux animaux de compagnie » (NAC) – rongeurs, oiseaux, reptiles, batraciens, etc – ne sont pas épargnés par ces actes de maltraitance, bien au contraire.
« Nous avons de plus en plus de cas de sévices graves »
Les équipes du service enquête constatent une augmentation de la proportion de maltraitances dites « actives ». Sébastien Grève évoque notamment des chats découpés à la machette ou balancés contre les murs, des chiens jetés du 14e étage d’un immeuble, dans l’agglomération lyonnaise.
« Nous avons de plus en plus de cas de sévices graves. Il y a 50 ans, c’était principalement de la maltraitance passive, comme de la négligence. Dans une société qui est de plus en plus violente, les humains sont de plus en plus violents envers leurs congénères donc aussi envers l’animal. »
Quant aux combats de chiens, le responsable du refuge assure qu’il y en a toujours, bien qu’ils se fassent plus discrets en communiquant via les réseaux sociaux.
Depuis décembre 2020, la SPA de Lyon et du Sud-Est propose aux forces de l’ordre et aux administrations une formation gratuite aux questions de maltraitance animale. Le programme présente notamment la réglementation en vigueur, les autorités compétentes et le fonctionnement du service enquête de la SPA de Lyon.
« On fait comme les forces de l’ordre d’autres pays, explique Sébastien Grève. Nous, on veut professionnaliser quelque chose qui n’existe pas. »
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