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[PODCAST] Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de « space dominance »

Les milliardaires et l’espace : tourisme de golden boy ou prémisses du nouveau colonialisme spatial ?

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À quand le tourisme spatial ? Une photo SpaceX Falcon Heavy Launch

. Depuis Blue Marble, l’image de notre planète Terre totalement éclairée prise en 1972, qui n’a pas rêvé d’aller dans l’espace pour faire cette expérience hors norme ?

Ces questions seront abordées au cours de la session des Mercredis de l’Anthropocène du 20 octobre. Des débats qui repensent les clichés au sujet de la conquête spatiale en perspective.

Cette troisième séance de la saison 6 se déroulera de 18h30 à 20h à l’Hôtel71 (Lyon 2è) dans le quartier Confluence, sur les bords du Rhône. La présentation d’un pass sanitaire valide et le port du masque sont obligatoires. À écouter également en podcast. Cette conférence s’inscrit dans le cadre de la Rentrée Anthropocène #2021.

Retrouvez ci-dessous le texte écrit par Gilles Rabin, économiste et directeur de l’innovation, des applications et de la science du CNES.

Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de « space dominance »

Après l’avion orbital de Richard Branson, le saut de puce de Jeff Bezos et la randonnée spatial d’Elon Musk, nous avons le choix entre admiration technologique, jalousie de ne pas en avoir été, et mépris devant ce nouveau tourisme qui consomme tant d’énergie dans ce monde ou le gâchis de ressource nous mène à l’abime.

Le plus aisé serait de croire qu’il s’agit juste d’un jeu de cours de récréation entre milliardaires qui s’ennuient, fortune faite, et qui cherchent un terrain pour s’affronter à coup de milliards et de show télévisés que sont devenus leurs tentatives.

D’abord la technologie. Si on décale de quelques centimètres son point de vue il faut admettre que les trois tentatives mêlent une communication aboutie et exploit technologique. Si Richard Branson joue le Bernard Tapie entre son premier job de vendeurs de journaux, puis de labels musicaux et enfin de Pdg de compagnies aériennes, Bezos et Musk ont d’abord été des techniciens qui rêvent d’espace bien avant d’être milliardaire. Et Musk est même resté Cto (directeur en charge de la technologie) chez SpaceX démontrant à la fois son énergie et sa compétence. Le milliardaire cache l’ingénieur et non l’inverse. On est loin de milliardaires revenus en enfance et cherchant à avoir le plus beau jouet dans le magasin. Ce sont des rêveurs de l’espace et leurs fortunes leurs permettent de réaliser ces rêves.

« L’avènement d’un spatial mondial et moins cher »

Le tourisme n’est donc que la face cachée de l’Iceberg. Depuis les années 2000 l’industrie spatiale n’est plus la chasse gardée d’industriels et de quelques pays qui se partageaient les orbites. Avec l’apparition notamment de SpaceX, mais aussi de Planet et en Europe récemment d’Isar Aerospace développant des micro lanceurs, avec l’émergence de nouveaux pays, Israël, l’Inde, les Emirats arabes unis, l’Australie… le spatial n’est plus cette Ivy League réservée à quelques acteurs.

Ajoutez la révolution numérique et donc pour le spatial la miniaturisation et donc la perte de poids et vous avez un spatial mondial et moins cher. Le Newspace n’est alors que la 4è révolution industrielle appliquée au spatial. Mais ce Newspace ce n’est pas comme l’affirme la presse dite économique, la privatisation de l’espace au profit de grandes entreprises. Le spatial est toujours financé par les Etats à hauteur de plus de 80%, y compris aux Us. SpaceX c’est Apple financé par la Nasa et la défense américaine. Alors tout bouge et rien ne change comme dans le Guépard de Visconti ? Pas tout à fait. Ce tourisme spatial est une nouvelle étape de deux phénomènes qui se percutent.

« L’homme est une espèce multi planète »

D’abord la « vision politique » des acteurs de Newspace qui à la manière des Gafam cherchent moins à nous vendre des objets ou services qu’à changer profondément nos modes de vie. Pour Bezos et Musk il s’agit de faire de l’espace ce que les américains appellent la frontière infinie (endless Frontier). Après la course au Mississipi du Far west, la course à l’espace des années 60, la prochaine étape sera une base sur la lune
et plus tard sur Mars.

« L’homme est une espèce multi planète » comme l’affirme Elon Musk et notre destinée est de sauter de planète en planète pour conquérir l’univers. En plus, cela tombe bien, la planète Terre n’est plus très en forme.

À quand le tourisme spatial ? Une photo SpaceX Falcon Heavy Launch
À quand le tourisme spatial ? Une photo par SpaceX du Falcon Heavy Launch

Le tourisme spatial est donc la prémisse de cette colonisation à venir et pour prouver que c’est possible, on acclimate le terrien aux voyages en orbite, en attendant de faire de tour de la Lune comme l’a promis SpaceX. On est loin de l’image de milliardaires jouant dans la cour de récréation.

« Le spatial s’affirme comme le nouveau champ de bataille des super puissances »

Second phénomène, le « space Dominance Us » ou la stratégie d’être leader dans le spatial pour nos amis américains et chinois. L’orbite base (entre 400 et 800 km) sera le champ de bataille militaire et civil. Pour les militaires comme pour les civils c’est de cette orbite que l’on peut voir et communiquer en temps réel sur l’ensemble de la planète.

Aujourd’hui, la constellation de satellites de télécommunication StarLink permet d’avoir l’internet à très haut débit sur la quasi-totalité de la planète, ce qui est un gain pour l’ensemble des services à offrir pour les territoires isolés mais aussi un avantage stratégique pour les forces armées Us. Envoyer des touristes Us dans l’espace c’est aussi démontrer la prédominance américaine.

Pendant que nous regardons les milliardaires s’amuser, le spatial s’affirme comme le nouveau champ de bataille des super puissances. L’orbite basse, la Lune et Mars sont les prochaines étapes de cette guerre. Du moment que les images sont belles…

« Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de space dominance » une conférence en direct le 20 octobre de 18h30 à 20h puis disponible en podcast.

Avec :

– Gilles Rabin, économiste. Parmi toutes ses activités, il fut délégué général au développement économique et à la politique foncière de la Métropole de Lyon. Depuis 2017, il est le directeur de l’innovation, des applications et de la science du CNES, centre chargé d’élaborer et de proposer au gouvernement le programme spatial français, puis de le mettre en œuvre.

– Arnaud Saint-Martin, sociologue, chargé de recherche au CNRS. Ses recherches alternent entre l’histoire des sciences et techniques, notamment astronomiques, et l’étude des transformations de l’astronautique, de la guerre froide à l’avènement du « New Space ».

Animation : Valérie Disdier


#anthropocène

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