C’est sûrement le passage le plus tumultueux qu’il ait connu à Vaulx-en-Velin. Le 11 août, le cirque Zavatta a quitté la ville après deux semaines de représentations. Connu pour ses lions, ses girafes… Ce cirque historique, fondé par le clown Achille Zavatta, a rencontré cette année une opposition nouvelle : celle du « Collectif citoyen pour des cirques sans animaux à Vaulx-en-Velin. »
« Citoyennes et citoyens, écologistes et animalistes de Vaulx-en-Velin, nous sommes profondément choqués par les pratiques de ce cirque », indiquait ainsi le collectif dans un communiqué signé par les associations Eco Défense, Paris Animaux Zoopolis et Code Animal.
En les enfermant et en les promenant de façon itinérante, l’équipe du cirque va contre les besoins biologiques des animaux, selon eux. Reprenant une position de la fédération des vétérinaires d’Europe de 2015, ils soulignent que cette pratique peut représenter des risques graves pour la santé des animaux.
« On peut faire rêver nos enfants autrement qu’en montrant des animaux en cage », s’agace une membre du collectif.
Membre d’Extinction Rebellion et de plusieurs associations écologistes, cette militante de 33 ans dénonce une captivité qui peut avoir des conséquences « pathologiques » pour les félins et autres animaux. « Certains vont jusqu’à la dépression, voire au suicide », s’inquiète-t-elle.
Bien-être animal à Vaulx-en-Velin : la mairie dans le viseur
Au-delà du cirque, ils reprochent à la mairie de Vaulx-en-Velin de ne pas agir sur cette question du bien-être animal. Pour eux, cette dernière pourrait, au moins, faire voter un vœu contre l’installation de ce type de cirques. « Villeurbanne l’a fait », affirme Mathieu, un autre membre du collectif.
En ce sens, le Vaudais, proche de plusieurs associations animalistes, appelle à prendre les devants sur une possible interdiction nationale. En septembre 2020, la ministre de la transition écologique Barbara Pompili avait annoncé une fin « progressive » des animaux sauvages dans les cirques itinérants. Une loi qui n’est toujours pas en vigueur, rappelle le cirque Zavatta.
Du côté du collectif, on indique avoir contacté l’élu délégué au bien-être animal à Vaulx-en-Velin, sans réel retour de sa part. Une pétition en ligne. « pour que la Mairie de Vaulx-en-Velin s’engage pour l’interdiction des animaux dans les cirques ». Au soir du 18 août, cette dernière avait été signée par près de 22 700 personnes.
Pour certains élus : un mouvement mené par des Lyonnais plus que des habitants de Vaulx-en-Velin
Contacté par Rue89Lyon, le cabinet de la maire (PS) Hélène Geoffroy n’a pour l’instant pas donné suite.
Le communiqué du collectif avait déjà provoqué l’ire de Stéphane Gomez, premier adjoint de la ville, sur Facebook. Dans des échanges houleux avec un soutien du collectif, ce dernier s’emporte contre un groupement « non-vaudais » qui vient donner des leçons dans sa ville.
« Le temps des colonies est fini : les pères blancs de la Métropole n’ont pas à venir expliquer aux sauvages des banlieues comment se comporter, écrit-il. Créez un mouvement local militant et lui aura une crédibilité pour interpeller la Ville, et sans cacher son objectif. »
Outre le débat sur les conditions d’accueil des animaux, l’élu pointe ce qui est pour lui un phénomène hors-sol, loin des préoccupations des Vaudais.
« Qui est Vaudais dans le collectif ? Pas ceux qui s’adressent à la presse en même temps qu’ils envoient un mail sans dire qui ils sont et sans évoquer le sujet sur lequel ils construisent une polémique, marque encore l’élu. Donc oui, c’est une logique coloniale : des extérieurs viennent faire leur beurre sur la ville tout en nous faisant la leçon ! [sic] »
Par ce discours, l’adjoint d’Hélène Geoffroy revient sur une question récurrente dans ces débats : celle de la localité, ou non, du groupe militant. En janvier 2020, la mairie de Bourg-en-Bresse, sur un sujet similaire, avait également mis en avant un « réseau national » pour parler de la réussite d’une pétition pour le bien-être animal dans sa commune.
« Comme si à Vaulx, les gens n’en avaient rien à faire du bien-être animal »
« Nous sommes une majorité de Vaudais dans le collectif, affirme Mathieu qui souhaite rester anonyme comme tous les membres de se collectif que nous avons contacté. Pour l’instant, on tourne autour d’une cinquantaine de membres. » Face aux accusations du 1er adjoint, il rappelle avoir été lycéen à Vaulx. Il est propriétaire dans la ville depuis sept ans et travaille sur place depuis 15 ans.
« Comme si à Vaulx, les gens n’en avaient rien à faire du bien-être animal », s’énerve-t-il.
Père de deux enfants, il souhaite que ces derniers soient éduqués au fait que « la privation de liberté n’est pas un spectacle. »
Même constat pour une autre membre du collectif. Mère de famille, habitant Vaulx-en-Velin depuis huit ans, elle a rencontré Mathieu dans une marche pour le climat. Progressivement sensibilisée aux questions écologiques, elle a éduqué sa fille dans ces valeurs.
« Le message est clair : quand un enfant sait ce qui se passe dans un cirque, il ne veut pas y aller, affirme-t-elle. Quand nous étions enfants, nous ne savions pas. Maintenant nous savons. »
Sur ce point, Edmond Zavatta (lire par ailleurs) répond que ses animaux sont suivis par les services de la Direction départementale de protection des populations qui « effectuent des opérations de contrôle tous les trois mois ».
Il se place lui-même en « défenseur du bien-être animal ».
« Quand ils reviennent dans leur milieu naturel, ces bêtes sont souvent victimes de braconnage », rappelle-t-il.
Dès que possible, les animaux sont mis dans des plus grands enclos, ils sont gardés, à leur retraite, dans des espaces plus grands, les véhicules sont aménagés pour eux… Bref, le maximum est fait, selon lui.
Pour le reste : « Nous n’allons pas contre la loi », rappelle-t-il.
Un potentiel nouveau sujet pour EELV à Vaulx-en-Velin
Là-dessus, le collectif rappelle qu’il ne cible pas le cirque Zavatta en particulier mais tous ceux faisant travailler des animaux. Dans cette optique, le collectif cherche à s’étoffer et à se structurer. Une page Facebook a été créé mardi 17 août en ce sens. Elle est gérée par quatre membres du collectif.
En attendant, leur message a déjà une répercussion dans la politique vaudaise. À Vaulx, une des rares villes où les socialistes et écologistes ne s’étaient pas alliés au deuxième tour des élections municipales de 2020, l’opposition EELV pourrait bien se saisir de la question lors d’un prochain conseil. Son ancienne tête de liste, et aujourd’hui conseiller municipal Richard Marion, n’a en tout cas pas manqué de partager le communiqué sur les réseaux sociaux.
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