1er mois à 1€

Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Annouck Curzillat, triathlète aux Jeux paralympiques grâce à un pompier de Lyon

En août 2021, la rédaction de Rue89Lyon dressait le portrait de quatre athlètes de participant aux Jeux paralympiques de Tokyo. Trois ans plus tard, ils sont tous en course pour les épreuves de Paris, du 28 août au 8 septembre. À cette occasion, nous rediffusons leurs portraits. Ici, celui de la triathlète Annouck Curzillat

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Lyon, abonnez-vous.

Annouck Curzillat

. 

Annouck Curzillat n’est pas de celles qui cherchent à se faciliter la vie. À 29 ans, la jeune sportive de Lyon participe cet été à ses premiers Jeux paralympiques, à Tokyo. Non-voyante, elle va concourir dans une discipline complexe : le triathlon.

Au Japon, elle va réaliser une course comprenant 750 mètres de natation, 20 kilomètres de vélo et 5 kilomètres de course à pied. Pour cela, elle sera accompagnée d’une guide, Céline Bousrez, attachée à elle tout au long du parcours. Un défi de taille qui n’effraie pas la championne. 

Depuis toute petite, la triathlète a dû se battre pour faire du sport. Toute jeune, celle qui souffre d’une rétinite pigmentaire, a fait du ski et de l’équitation « à l’ancienne ». À l’époque, la plupart des clubs ne savent pas comment gérer son handicap.

« Toute ma vie, nous avons poussé des portes de clubs avec mes parents et nous sommes tombés sur des gens qui n’y connaissaient rien », se souvient-elle.

Sur les terrains de sport comme sur les pistes de ski, elle a pris l’habitude d’entendre des membres de sa famille ou des entraîneurs crier pour la guider. Peu à peu, elle a su s’adapter.

Annouck Curzillat de Lyon Jeux paralympiques
Les Lyonnais Alexandre Lloveras et Annouck Curzillat ont été sélectionnés pour les JO handisports de Tokyo.Photo : PL/Rue89Lyon.

« Je suis arrivée dans le triathlon un peu par hasard »

En 2014, le triathlon entre dans sa vie de façon inattendue après le coup de téléphone d’un sapeur-pompier de Lyon. Ce dernier a vu une course guidée en biathlon handisport. Sportif valide, il veut faire la même chose dans son sport, le triathlon, qui allie nage, vélo et course à pied. Il contacte le milieu du handisport et au cours de ses recherches il rencontre Annouck Curzillat.

Après coup, le pompier se rendra compte qu’il ne peut pas courir avec une femme, du fait du règlement de la fédération française handisport. Trop tard, la jeune femme a mordu au projet.

À l’époque, elle n’est ni une nageuse, ni une coureuse. Arrivée à Lyon pour ses études, elle est tout juste en train de terminer son diplôme pour être kinésithérapeute.

« Toute ma scolarité, le sport ça a été pour me détendre plus que pour faire de la compétition, relate-t-elle. Je suis arrivée dans le triathlon un peu par hasard. Je me suis dit : tiens, on va essayer. »

Rapidement, la discipline lui plaît. Celle qui n’aime pas s’ennuyer voit dans les alternances entre les trois disciplines un bon moyen de varier les plaisirs. Difficile, le sport devient incroyablement technique lors des changements de discipline pour la mal-voyante. Dans l’eau comme sur terre, elle est attachée à sa guide.

« Nous devons être séparées de 50 centimètres », décrit-elle.

En sortant, elle doit enlever sa combinaison, mettre un casque, ses lunettes noires, et enfiler des chaussures déjà accrochées aux pédales du vélo. Puis, 20 km plus loin, elle devra poser le vélo et courir jusqu’à ses baskets, le tout sans voir ce qui se passe autour d’elle. « C’est un peu un truc de fou », admet-elle. Mais ça lui plaît.

« Le triathlon est venu à moi. Mais il m’a bien trouvée. »

De Lyon aux Jeux paralympiques de Tokyo

Apparemment peu compétitrice, elle se laisse prendre par le sport. Six ans plus tard, la sportive de Lyon finit par être sélectionnée aux Jeux paralympiques de 2020 à Tokyo, décalés d’un an en raison de la crise sanitaire.

« Le report avec la crise du Covid-19 a été un choc, souffle-t-elle. Je commençais à compter les mois qui restaient avant la compétition. Et voilà que tout a été reporté. »

Cependant, elle l’assure : l’hiver lui a permis de passer des caps techniques, notamment en natation. Cinquième aux championnats du Monde, quatrième aux championnats d’Europe, la multiple championne de France espère faire une bonne position cette année.

Et après ? Dans un contexte particulier lié à la pandémie, beaucoup de coureurs français pensent plus aux Jeux de Paris 2024 qu’à ceux de Tokyo 2021. Pas elle.

« Certes, Paris, il y aura du public, la famille… Mais bon, ce n’est qu’à deux heures de train », pouffe la sportive, pas fan des petits projets.

À Lyon, Annouck Curzillat représente une des chances de médaille françaises aux Jeux paralympiques de Tokyo. Rencontre avec une battante.
Annouck Curzillat participera aux Jeux paralympiques de Tokyo.Photo : Facebook Annouck Curzillat

« Quand je sors, je ne vois pas clair (…) Je ne peux rien faire toute seule »

Sur le long terme, elle se pose la question de continuer une carrière de triathlète. Ne pas avoir de vacances, sacrifier sa vie privée… Elle se pose les mêmes questions que ses confrères « valides », avec des contraintes supplémentaires.

Contrairement à certains « professionnels » du sport, en plus de ses entraînements, la kiné travaille à l’hôpital de Givors, au sud de Lyon. Depuis 2019, elle est aidée par son statut de sportive de haut niveau.

« Cela me permet de travailler moins tout en conservant un niveau de rémunération », indique-t-elle.

Au cours d’une semaine classique, elle va s’entraîner entre 10 et 12 heures chez elle, à la piscine de Vaise ou sur les quais du Rhône. En stage, ses entraînements avec le Tandem club rhodanien la font s’entraîner entre 20 et 25 heures. Elle ne pourrait pas faire plus.

« Le problème n’est pas tant l’entraînement, mais la logistique autour, regrette-t-elle. Quand je sors, je ne vois pas clair. Je suis obligée d’avoir quelqu’un pour aller courir, nager, faire du vélo… Je ne peux rien faire toute seule. »

Régulièrement, cette habitante de Lyon depuis 11 ans répète manquer de confiance en elle. En termes de classement, elle semble ainsi prudente et estime pouvoir terminer troisième. « Cela dit, on ne sait jamais ce qui peut se passer, des filles peuvent tomber devant », avance-t-elle.

Ou alors, peut-être les dépassera-t-elle ? Pour le savoir, rendez-vous le 28 août. 

À Lyon, Annouck Curzillat représente une des chances de médaille françaises aux Jeux paralympiques de Tokyo. Rencontre avec une battante.
La liaison entre la natation et le vélo est un moment important de la course.Photo : World Triathlon Media

#Handicap

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

Autres mots-clés :

#Handicap#Jeux olympiques#Société#Sport
Partager
Plus d'options