« Dites-moi, c’est pour vous les deux palettes de capotes là ? »
La scène est peu habituelle pour ce coiffeur du 6e arrondissement de Lyon. À 11h, ce jeudi, il vient de voir se garer un long camion noir floqué de grands préservatifs roses à moustache. Il n’a pas pu s’empêcher de tirer une drôle de tête. Jérôme Bénozillo, le propriétaire du camion, n’a pas pu s’empêcher d’aller le taquiner. « Non non… Il y a erreur », répond timidement le coiffeur, en manquant de faire tomber ses ciseaux.
En refermant la porte du salon de coiffure, Jérôme Bénozillo se marre : « T’as vu sa tête ? ». Il est le « Capotier » (marque déposée), habitué de ces plaisanteries.
« L’humour, c’est essentiel dans le boulot, il faut que les filles sourient. Sinon, on ne tient pas. »
Depuis 17 ans, il parcourt Lyon et ses environs avec son camion couvert d’images de préservatifs XXL. À l’intérieur, des préservatifs, des tapis de sol ou encore du gel lubrifiant à destination des travailleurs et travailleuses du sexe du Rhône et d’ailleurs.

À 66 ans, le Capotier a la « tête » de l’emploi. Atypique. Chemise blanche bien repassée, bacchantes élégantes, queue de cheval rabattue à l’arrière… Avant d’être pris en photo, il se lisse légèrement la moustache, histoire de rester classe. « J’ai remarqué que c’était important pour les filles », note-t-il.
Les « filles », elles l’ont toujours fasciné. La première fois qu’il parle à des prostituées, Jérôme Bénozillo a 20 ans et va leur vendre du muguet, sous le regard étonné de ses camarades. Dans la foulée, il commence à en promener quelques-unes en voiture avant d’arrêter pour ne pas faire « maquereau ». La deuxième fois, il a 50 ans.
Du muguet à la vente de préservatifs
Pompiste, commercial dans l’immobilier… Fils d’un importateur de ballons, le père de famille a déjà un CV bien rempli. En 1985, il a monté sa première entreprise spécialisée dans le matériel de plongée. Puis, il a vendu de l’équipement d’urgence et de premier secours.
« A posteriori, on m’a dit que c’était le point commun entre mes boulots : le côté sécurité et d’aide à la personne », commente-t-il.
En 2003, il se rend dans un marché international à Düsseldorf, en Allemagne. Là-bas, il tombe sous le charme de présentoirs de boîtes de préservatifs. En phase de transition professionnelle, l’entrepreneur embarque 5 000 pièces. À l’origine, il veut les vendre à des bureaux de tabac et maisons de presse. « Mais personne n’en voulait », se rappelle-t-il.
Rapidement, les boites commencent à encombrer le garage. Lassée de les voir s’empiler, son épouse lui demande de s’en débarrasser. Il va alors les donner aux premières utilisatrices de ce matériel : les prostituées de Perrache.
À cette époque, les filles de Lyon ont été poussées hors du centre-ville par un arrêté municipal de Gérard Collomb, interdisant le racolage à pied dans le centre-ville. Avec la loi de sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, elles ont commencé à vivre en camionnette. « Il y avait autour de 250 véhicules », se souvient-il.

Un conteneur de 1,2 à 1,5 million de préservatifs venu de Malaisie jusque Lyon

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