L’impact de cette étude, publiée cette nuit dans le journal scientifique The Lancet Diabetes & Endocrinology, pourrait dépasser les seules préoccupations liées à la pandémie de Covid-19. Entretien avec Cyrielle Caussy, sur les résultats, les méthodes employées et les conséquences que ce travail pourrait avoir sur la reconnaissance de l’obésité comme maladie.
Rue89Lyon : Vous co-signez une étude inédite sur l’obésité et le Covid-19. Pourquoi cette étude et sur quel échantillon a-t-elle été réalisée ?
Cyrielle Caussy : Cette étude a été mise en place sur une cohorte de patients suivis pour une infection Covid-19 au sein des Hospices civils de Lyon. Nous avons commencé le 27 mars. A ce moment-là, il n’y avait aucune étude de publiée sur le Covid-19 et l’obésité dans les revues scientifiques.
Tout ce qui avait été dévoilé dans les publications issues de Chine ne donnait aucune donnée sur le poids, la taille ou l’IMC des patients hospitalisés pour Covid-19. Il nous a paru urgent d’essayer de répondre à cette question et surtout de publier dans des revues scientifiques pour que la communauté scientifique puisse avoir des données fiables.
En moins d’une semaine, nous avons réussi à collecter les données médicales de 340 patients hospitalisés aux Hospices civils de Lyon le 27 mars 2020 pour Covid-19. Parmi ces patients, 110 se trouvaient hospitalisés en réanimation. Pour tout le monde, nous avions les données de taille, poids, IMC [Indice de masse corporelle, ndlr], l’âge, le sexe, mais également les antécédents médicaux, notamment les facteurs de risque connus : l’hypertension, le diabète, le fait d’avoir une pathologie pulmonaire chronique ou bien un cancer.
Quelles ont été les grandes étapes de votre recherche et quelles sont les conclusions principales de l’étude ?
Nous avons regardé en premier lieu quelle était la prévalence de l’obésité pour les patients hospitalisés pour forme sévère de Covid-19. Il y avait une forte prévalence de l’obésité dans la cohorte. Mais pour que cela ait du sens il fallait le comparer à la prévalence de l’obésité dans la population générale. En période de pandémie tous les gens ont a priori le même risque d’être infecté par le virus. S’il y a beaucoup d’obèses dans une population, on risque d’avoir beaucoup d’obèses dans les services de médecine.
Parmi les patients hospitalisés pour Covid-19, les patients obèses sont 40% plus nombreux que dans la population générale. En réanimation c’est encore plus parlant : il y a deux fois plus de patients obèses qu’en population générale.
Cependant, la population de réanimation n’est pas forcément comparable à une population générale. Elle peut avoir d’autres maladies ou des facteurs de gravité qui les ont conduits en réanimation. Grâce à nos collègues du service de réanimation qui ont une database de recherche extrêmement bien standardisée, nous avons pu extraire les données d’environ 1.200 patients hospitalisés en réanimation de 2007 à 2019.
Cela nous a permis d’avoir une population de comparaison.
Là aussi, nous avons deux fois plus d’obèses en réanimation Covid-19 que dans la population de comparaison.
Enfin, nous avons comparé les caractéristiques des patients hospitalisés pour Covid-19 en service de médecine classique, dans notre cohorte, par rapport à ceux qui sont allés en réanimation.
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