« Ça fait quarante ans que ça devrait être fait. Ça fait tellement longtemps qu’ils nous en parlent ! »
Cet habitant de Divonne-les-bains n’y croit même plus tant le projet est ancien. Pourtant, en juin dernier, un cap décisif a probablement été franchi : la demande de permis de construire pour l’usine d’embouteillage a été déposée par la société Andrénius.
« À ce jour, le permis n’est toujours pas délivré », rappelle Jean Di Stefano, élu d’opposition à la mairie de Divonne (liste « Divonne Autrement », sans étiquette). Dès qu’il le sera, l’usine d’embouteillage d’Andrénius verra le jour. Des bouteilles de cette eau de source pourront alors être vendues en France et à l’étranger avec la marque « Divonne-les-bains », déposée par la mairie.
Étienne Blanc, maire (LR) de Divonne depuis 1991 – et actuel vice-président de Laurent Wauquiez à la région Auvergne-Rhône-Alpes, et tout juste déclaré candidat pour la mairie de Lyon en 2020 – a bataillé pour concrétiser ce projet. Et pour cause : ville thermale cossue, Divonne pourrait, à l’instar d’Évian ou de Vittel, développer son rayonnement en apposant son nom sur des millions de bouteilles.
« C’est une bonne chose pour l’image de la ville », s’enthousiasme une jeune divonnaise.
Une vingtaine d’emplois en prévision
« Ça va créer des emplois locaux, dynamiser la ville », se réjouit un habitant de longue date. Si le collectif Eau bien commun – fervent opposant au projet – souligne qu’une usine de ce type ne demande pas énormément de main d’œuvre en raison de sa forte automatisation, le projet doit tout de même ouvrir quelques poignées d’emplois. Le Dauphiné Libéré avançait en juin dernier le chiffre de « plus d’une vingtaine de salariés ».
Peter Wagner, membre d’Eau bien commun et conseiller consultatif à la Régie des eaux gessiennes pour l’association Eco-pratique, s’inquiète :
« Ce ne seront pas des postes d’ingénieurs, de spécialistes. Ils ne nécessiteront pas de grandes compétences. Donc les salaires seront bas et ne permettront pas de s’installer à Divonne. »
En cause, le coût de la vie élevé dans cette ville frontalière, où de nombreux habitants travaillent en Suisse. L’association « Eau bien commun », comme certains habitants du pays de Gex, estime que ces emplois risquent de s’adresser essentiellement à des travailleurs vivant dans le Jura, où le coût de la vie est plus faible.
Mais derrière la création d’emplois et l’image de la ville, les opposants soulèvent d’autres enjeux. L’inquiétude majeure pour les Gessiens concerne le trafic routier. Sous le feu de leurs critiques, la perspective d’une forte hausse du nombre de camions prévue sur les routes de la région pour transporter les bouteilles. Les militants d’ »Eau bien commun » parlent de 80 camions par jour.
Une habitante de Gex, ville voisine, s’agace :
« Au niveau de l’encombrement sur les routes, je pense que ça va être catastrophique, avec un vrai souci de circulation, de fréquentation… »
Des bouteilles en verre et d’autres en plastique
« Eau bien commun » s’inquiète aussi de l’impact environnemental de ce trafic routier. Sur le plan écologique, leur argument majeur ne porte cependant pas sur le transport, mais sur la production elle-même d’eau en bouteille.

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