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Barouf et photos à l’hôtel de Beauvau placent Caroline Collomb sur orbite

Plutôt que de prendre la pose dans la maison familiale lyonnaise, c’est sous les ors de la République, sur le parvis et dans un bureau cossu de l’hôtel de Beauvau (Paris 8è), que Caroline Collomb a choisi de recevoir la presse people locale.

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Capture d'écran du magazine Lyon People.

A ce stade, c’est presque de la fascination pour Lyon People que nous nourrissons, tant pour sa capacité à mettre en scène sous leur meilleur jour les détenteurs-trices du pouvoir, que pour ce que le magazine leur permet de dire. Comme si se dessinait une série dédiée aux « candidats à la candidature pour Lyon 2020 », nous avions déjà plongé avec une délectation assumée, il y a quelques semaines à peine, dans un autre numéro de ce titre, dédié à Georges Képénékian.

Le magazine s’amuse lui-même de ce qu’il soit si facilement choisi pour des déclarations publiques qui ne disent pas leur nom. Candidat.e mais pas trop, peut-être, on verra bien.

« Déjà, ça commence à l’envers, et ce n’est pas pour nous déplaire, écrit le rédacteur en chef Marc Polisson. Le maire divers droite du 6ème Pascal Blache a choisi le magazine Lyon Capitale (ancré à gauche) pour déclarer sa candidature, tandis que Lyon People (qui penche à droite) sert de rampe de lancement à la macroniste Caroline Collomb. »

Dans le storytelling familial que Caroline Collomb délivre, « Gérard » a réalisé un « sacrifice » en délaissant Lyon pour Paris, n’écoutant que son sens des responsabilités. Elle-même a alors dû ré-organiser des aspects de sa vie pro et perso, avec une facilité qui a justement agacé ses collègues magistrats.

Caroline Collomb s’épanche en deux pages sur la vie politique locale, sur l’avenir de Lyon et sur son engagement pour ce territoire. Tout ça… depuis la place Beauvau, là où se trouve désormais son ministre de mari.

« Je ne renonce jamais »

Caroline Collomb dans le numéro de mars 2018 de Lyon People.
Caroline Collomb dans le numéro de mars 2018 de Lyon People.

Pour la photo prise par Jean-Luc Mège, elle pose droite dans ses bottes au sommet de l’escalier de l’hôtel de Beauvau.

La journaliste Jocelyne Vidal a pénétré l’appartement de fonction ministérielle et nous apprend que sur le bureau du séjour a été négligemment mis à disposition un roman de Jean-Christophe Ruffin, Le Tour du monde du roi Zibeline. Pour l’anecdote, il s’agit du récit de vie d’un baron -cela ne s’invente pas, un certain Maurice Beniowski devenu explorateur avant de finir roi de Madagascar.

Le prétexte pour jouer le jeu du journal pipole, c’est le mois de mars et sa « Journée des droits de la femme ». Lyon People a fait poser en rang d’oignons, dans l’hôtel de Beauvau, plusieurs lyonnaises (dont Caroline Collomb mais aussi Dominique Hervieu, Tabata Mey, Claudia Stavisky…), pour son « Top 50 des femmes d’influence ». Et sur la photo se tient en bonne place Gérard Collomb, central et tout sourire, une main amicale posée sur les épaules de deux d’entre elles.

Des femmes lyonnaises en groupe pour la photo, à l'hôtel Beauvau -avec Gérard Collomb, central.
Des femmes lyonnaises en groupe pour la photo, à l’hôtel Beauvau -avec Gérard Collomb, central.

Présentée comme une « jeune polyglotte bardée de diplômes » (ce qui, entre les lignes, raye d’un trait un éventuel mauvais procès en incompétence), Caroline Collomb dit sans ciller :

« Seul compte mon engagement au service de ce mouvement [celui de la République en marche, ndlr], je ne suis pas de ceux qui entrent en politique pour avoir un mandat, cela reviendrait à faire passer des ambitions personnelles avant mes convictions, une forme de cynisme qui signe la mort de la politique livrée à des partis de cadres. »

La principale flèche décochée dans sa direction est aussi son meilleur contre-argument : ce n’est pas parce qu’elle est « femme de » qu’elle ne peut pas agir, voire nourrir des ambitions propres.

« Je ne renonce jamais », lâche-t-elle au canard.

Un « devoir de réserve » idéal pour maîtriser la com’

Caroline Collomb est donc à la fois référente du parti LREM dans la Métropole de Lyon, fief de la Macronie, et pendant deux jours par semaine juge administrative à Paris. Cette fonction a posé, dès la désignation de son époux au poste de ministre de l’Intérieur, la question du conflit d’intérêt, comme Rue89Lyon l’avait signalé -« Caroline » devant trancher des situations impliquant l’Etat et l’autorité publique, représentée par « Gérard ».

Nous lui avions posé la question lors de la soirée organisée à la préfecture à l’occasion du second tour des élections présidentielles. Caroline Collomb avait répondu en souriant que « bien sûr qu’il n’y aurait pas de situation de conflit », qu’elle se déporterait de « tout dossier sensible ».

Finalement, le collège de déontologie du conseil d’Etat (saisi par un ancien élu Les Républicains, agitateur pertinent de la vie politique locale), a tranché en février dernier, en faveur de Caroline Collomb. L’autorité ne lui a pas demandé de se mettre en disponibilité de sa fonction de magistrate mais a émis des réserves qui concernent sa profession tout comme les fonctions politiques que la « femme de » a prises personnellement, dans le parti politique présidentiel.

C’est ainsi dit par le conseil d’Etat :

« L’acceptation, d’une responsabilité dans un parti politique […] et sa combinaison avec les attributions ministérielles, particulièrement sensibles, de l’époux de Madame Collomb implique de la part de celle-ci un surcroît de vigilance et de discrétion ».

La mise en garde pourrait en réalité bien arranger les affaires de la première concernée, qui va pouvoir mieux maîtriser sa com’, en choisissant les médias à qui elle ouvrira grand ses portes et ceux à qui elle opposera son fameux devoir de réserve.

Caroline Collomb et ses filles apprennent la victoire d'Emmanuel Macron le 7 mai 2017. Au QG d'En Marche ! à Lyon. ©Eric Soudan
Caroline Collomb et ses filles apprennent la victoire d’Emmanuel Macron le 7 mai 2017. Au QG d’En Marche à Lyon. ©Eric Soudan

« Baronne » et « omniprésente »

Pour Lyon People, le doute n’est pas permis, celle qui est présentée comme une « first lady » serait donc dans les starting blocks pour 2020, année d’élections municipales. Ou peut-être bien pour 2019, année d’élections européennes. En tant que référente de LREM dans le Rhône, elle a d’ailleurs prévu une prochaine « grande marche pour l’Europe ».

Ce n’est pas la première fois que Caroline Collomb joue plus ou moins subtilement avec la possibilité de se faire élire.

En plus des multiples occasions évoquées depuis 2001, elle avait annoncé très officiellement sa présence sur la liste du socialiste Jean-Jack Queyranne en 2015, une époque ou Emmanuel Macron-en marche n’était pas encore né. Avant de rétropédaler, d’une part parce que sa position sur la liste ne lui a pas convenu, d’autre part parce que face à Laurent Wauquiez, la victoire était compromise. La suite de l’histoire a donné raison au couple Collomb.

Dans le Progrès de Lyon, elle est l’ « omniprésente », ou une ambitieuse qui joue la carte des militants plutôt que celle des élus locaux, ces derniers ne la voyant pas nécessairement débarquer d’un bon œil. Caroline Collomb est aussi la « baronne » dans Libé. Le quotidien rappelle notamment son adhésion, un poil conservatrice, aux Poissons roses, un micro-mouvement chrétien créé en marge du PS, parti qu’elle a rejoint par ailleurs à l’âge de 18 ans.

La revue de presse la concernant s’épaissit quasiment chaque jour. Cet article participe du barouf ; difficile de ne pas céder à la tentation de la chronique d’une saga familiale en marche.

 

 

 


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