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Dans une tribune au « Monde », le sociologue Farhad Khosrokhavar estime que faute de moyens, l’administration pénitentiaire est incapable de gérer les détenus radicalisés.
« La France a un système carcéral complexe, mais dont le nœud gordien est la maison d’arrêt. Celles qui sont proches des villes posent problème.
Dans des cellules de 9 mètres carrés où sont entassés deux, trois, voire quatre détenus, l’agressivité de ceux-ci est légitime ; leurs conditions de vie sont inhumaines ; ils se comportent en « bêtes sauvages » parce qu’ils sont traités comme des bêtes sauvages.
Dans les maisons d’arrêt à proximité des grandes villes, un surveillant doit s’occuper d’une centaine de détenus, parfois plus. C’est à proprement parler inhumain, pour les incarcérés comme pour ceux qui les gardent. Il faudrait un surveillant pour trente à cinquante détenus, afin qu’il puisse non seulement s’acquitter de sa tâche routinière, mais être aussi à l’écoute des détenus et leur faciliter la vie carcérale.
D’autre part, la France est le premier pays européen en nombre de djihadistes partis pour la Syrie et l’Irak. Nous n’avons pas de politique unifiée à ce sujet, et les projets de « déradicalisation » sont malheureusement dans un état de coma prolongé, contrairement à des pays comme le Danemark, le Royaume-Uni, voire l’Allemagne et la Norvège, où l’on tente de mettre en place des procédures qui ne soient pas uniquement répressives.
L’administration pénitentiaire, faute d’effectifs suffisants, est obligée de parer au plus pressé, et les surveillants surchargés suspectent les « barbus », ou ceux qui ont coupé leur barbe récemment, de radicalisation, alors que la perception des phénomènes de radicalisation en prison nécessite un personnel nombreux et expérimenté.
Par ailleurs, une grande part de la surpopulation carcérale est due au fait que bien des personnes n’y ont pas leur place : d’abord celles qui souffrent de problèmes psychopathologiques et qui devraient être admises en hôpital psychiatrique ; puis celles ayant commis des délits certes punissables par la loi, mais qui devraient se trouver dans d’autres institutions que la prison (délits liés à la conduite en état d’ivresse, récidiviste de l’excès de vitesse…).
Si on retirait ces gens de la prison, il y aurait de 20 % à 30 % de détenus en moins, ce qui réduirait la nécessité d’embaucher du personnel ou de construire de nouvelles prisons. Mais il est difficile de faire entendre ce message à une société traumatisée par le djihadisme et confrontée à de nombreux autres problèmes sociétaux. »
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