Une heure quinze durant, lui et ses quatre danseurs incarnent une multitude de « gens » qui s’abandonnent, à tour de rôle et sans retenue, au démon de la danse, se déhanchent, s’exhibent, se libèrent, se dévergondent, laissant libre cours à leurs fantasmes, leurs délires et leurs pensées les plus intimes.
Une plongée jouissive dans les gestuelles à travers les styles musicaux (funk, house, disco, techno…) mais qui, en filigrane, questionne des sujets plus sérieux comme le désir de séduction, le besoin d’être vu ou l’affreuse solitude qui entoure beaucoup de gens.
Petit Bulletin : De quoi parle Les rois de la piste ?
Thomas Lebrun : C’est un spectacle sur les danses populaires ou plutôt les danses de « tout le monde ». On a aussi cherché à s’intéresser aux danses dites de séduction, ou comment séduire en dansant. Du coup, on se retrouve avec une galerie de personnages hauts en couleur, parfois grotesques ou plus intimistes. Et plein de façons de danser. Un peu comme un Arturo Brachetti de danses de discothèques !
Nous sommes cinq danseurs, mais il y a une quarantaine de personnages qui défilent. Ce sont tous des gens qui nous ont accompagnés, que l’on a croisé ou qui nous ressemblent un peu à un moment donné de notre vie. Ainsi, j’ai été gogo dancer, enfin quand j’étais jeune et svelte (rires) ! On ne se moque jamais de toutes ces personnes que l’on incarne. Ce qui m’intéresse ici, c’est plutôt l’histoire d’un soir, comment des gens qui veulent être vus ou s’exposer s’y prennent ? Sont-ils à l’aise ou pas, là-dedans ? Est-ce pathétique ? Cohérent ? Même si c’est très festif, il y a des gens qui se sentent émus par la solitude qui se dégage de la pièce.
Écriture très léchée ou lâcher prise : comment définiriez-vous la danse que vous donnez à voir ?
Toujours sur le fil ! Parce que si l’on est trop dans le lâcher prise, la pièce ne marche pas. On est obligé pour tenir le sens du spectacle, le rythme, l’attention. Pour ne pas tomber dans la caricature non plus. En fait, avec toutes ces contraintes, il faut trouver la liberté d’interprétation. Et c’est toujours à remettre en cause.
Les passages des personnages sont très rapides, entre dix et quarante secondes sur le plateau, ensuite on court pour se changer, on va d’un personnage à l’autre (drag queen, banquier bourré…), du coup on valse énormément.
On est obligé d’être très clair sur quelle densité physique avoir, quelle vitalité, quelle attitude, quelle morphologie adopter…
Bien sûr, c’est une pièce d’interprètes. Mais il y a toujours chez moi un travail au millimètre sur la chorégraphie, l’espace, la musique. En même temps, il y a ici un coté burlesque qui prend plus de force que dans d’autres pièces.
Peut-on parler ici de danse-performance ?
Cela dépend du sens que l’on donne à performance. Une performance, normalement, c’est une proposition « unique », quelque chose qu’a priori on ne répète pas. Là, on parle d’un spectacle très écrit que l’on joue et rejoue. On peut parler de performance d’interprétation. Car si le timing ou le caractère du personnage (donc la physicalité, le style, l’allure) sont très précis, quelque part la danse n’est pas écrite, il y a donc une liberté dans les mouvements.
Il y aura même un grand bal de fin ?
Qu’on se le dise, quelques personnages des Rois de la piste vont se retrouver sur le dancefloor. Et sur la piste de danse, il va falloir mouiller la chemise sinon les gens vont se faire engueuler s’ils ne travaillent pas ! (rires)
Recueillis par Anne Huguet, sur Le Petit Bulletin.
Les Rois de la piste
Aux Subsistances du 30 janvier au 3 février
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