C’est une comparaison assez appropriée, car même un partisan d’Apple comme moi reconnaîtra qu’une partie de la popularité de la marque est liée à un gros marketing, qui semble éclipser tout le reste, au point que certains modèles no-name chinois sortis par la concurrence passent inaperçus.
Ma banlieue je l’aime et elle s’appelle le 8ème
Pourtant, Grand Trou, j’y habite depuis deux ans, et je m’y sens très bien. Contrairement à ce que son nom laisse entendre, il ne s’agit pas d’un secteur reculé isolé du reste, pour peu qu’on soit comme moi un citadin qui marche tranquille dans sa ville (ma banlieue je l’aime, et elle s’appelle le 8ème…).
Juste de l’autre côté du cimetière par rapport à chez moi, l’accès aux deux lignes de tramway T2 et T4 a permis d’ouvrir Grand Trou (si je peux me permettre le jeu de mots) sur le reste de l’agglomération, Confluence et Part-Dieu, et sortir de la stigmatisation datée qui était celle de ces blocs de logements sociaux parsemés de petites maisons au sein d’une bulle dortoir.
Et la construction prochaine du T6 à Moulin à Vent viendra compléter l’offre de transports en commun et poursuivre cette tendance au désenclavement. J’ose même dire qu’on circule bien dans mon Grand Trou, sans pour autant que la voiture n’envahisse à excès nos axes principaux.
Aux abords de la route de Vienne et la rue Pierre Delore, les constructions récentes se multiplient et se fondent avec harmonie au paysage.
Des « bons » et des « mauvais » quartiers, vraiment ?
Ce curieux constat peut sans doute être établi dans chaque ville en France, mais j’ai l’impression qu’il est encore plus vrai à Lyon qu’ailleurs : il y a une hiérarchie implicite des quartiers dans la cité, avec souvent des clans d’habitants, historiques ou pièces rapportées, prêts à réciter haut et fort à qui veut l’entendre pourquoi ils sont à ce point amoureux de leur voisinage ou pâté de maisons, ou en quoi leur rue est THE place to be.
En effet, qui ne connaît pas un amoureux des Pentes, un toqué d’Ainay, ou encore un ardent défenseur des Brotteaux ? (Ou bien un parisien qui ne jure que par les arrondissement à un chiffre, ça marche aussi). Dans le cas de Lyon j’ai moi- même été, en tant que pionnier, un des partisans les plus engagés de Confluence en construction. On sait comment ça s’est fini.
On peut légitimement se demander si tout ceci a bien un sens, car le malheureux corollaire de cette affirmation de base serait donc l’existence de lieux d’habitat de seconde zone, au sein de ce qui devrait être une seule et même entité. Est-ce bien cohérent de chercher à s’opposer, à sans cesse se classer ou se comparer, à l’intérieur d’un même ensemble urbain, quand il existe déjà tant de sujets de division dans la société ?
Et en y repensant, qu’est-ce qui a contribué à la réputation des quartiers dits « d’élite », et sont-ils surestimés ? Je veux bien admettre qu’en termes d’immobilier, l’emplacement est primordial. Mais en quoi de vieux immeubles séculaires froids et mal insonorisés comme à Confluence priment-ils sur des constructions récentes qui auraient le malheur d’être situées en dehors des lieux prisés ?
Et quand il s’agit de bâtiments neufs qui ont la cote, s’agit-il du seul élément favorable au cadre de vie ?
Gentrification du 8ème ?
Ma vision de la métropole moderne ne va pas jusqu’à l’homogénéisation totale de tout ce qui la compose. L’âme d’un quartier, c’est avant tout celle des gens qui le font vivre. Et pour avoir déjà fréquenté des nids à mémés friquées hautaines et agressives qui ne sont pas à un coup de canne près pour gruger une place dans la file au marché, j’ai envie de dire « plus jamais ça ».
Même si le net imposable de mon foyer fiscal est supérieur à mon code postal (69008), je suis animé par une certaine notion du vivre-ensemble dans laquelle les inégalités de revenu ne doivent pas être un déterminant social.
Comme le dirait la chanson du générique d’Arnold & Willy : « Il faut de tout pour faire un monde » et la ghettoïsation de riches comme de pauvres est ce qui peut arriver de pire pour le développement. Je suis content quand un inconnu croisé sur le trottoir m’aide à tenir la porte de ma résidence ouverte quand je veux entrer avec ma poussette, j’aime discuter de tout et rien, des travaux de la voirie, et des dernières promotions du catalogue avec les gens qui attendent avec moi l’ouverture du Super U à 08h30.
Je ne cherche pas non plus à forcer le phénomène de « gentrification », ou d’embourgeoisement, à cause duquel les populations historiques d’un endroit s’en font chasser par une hausse de prix brutale causée par ces salauds de parvenus. Brooklyn s’est peut-être assaini de sa criminalité en trente ans, c’est parce que Manhattan est trop chère pour que tous les New-Yorkais s’y installent.
Pas un Brooklyn lyonnais
Et donc une certaine classe moyenne supérieure a pris d’assaut l’autre côté du pont. Grand Trou n’est pas un Brooklyn lyonnais, j’affirme y voir un début de modèle positif de ce que peut être la ville bien pensée. A savoir un lieu où je me sens bien pour faire vivre mon fils, dans un appartement de qualité correctement évalué, dans le respect de ses voisins, et dans un compromis de tranquillité sans trop d’éloignement de l’attractivité urbaine.
Et c’est justement cette transition sur ma progéniture qui me permet d’aborder un thème qui mitigera ce qui était jusque là un dithyrambique encensement de mon espace de vie. Quid de l’école publique ici ?
Retrouve-t-on dans la scolarisation des enfants la même démarche de diversité d’habitation des parents que j’abordais précédemment ?
C’est peut-être encore le dernier rempart à faire tomber, mais il dépend d’autres paramètres dépendant d’un tout autre périmètre (grèves des cantines, rythmes scolaires…). Je tenais malgré tout à apporter cette nuance, car je m’attends à ce que des commentateurs avertis viennent expliquer que la carte scolaire est un atout majeur de valorisation d’un secteur. D’ailleurs, n’hésitez pas à réagir sur le fond de ce billet.
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