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L’Italie vote une loi pour protéger les migrants mineurs isolés. Une première européenne

C’est la première fois en Europe qu’une telle loi sur la protection des mineurs étrangers non accompagnés est votée. Ils sont près de 26 000 à avoir débarqués seuls en Italie en 2016.

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Migrant boat // Matt Brown // Flickr

Les enfants et les jeunes mineurs isolés qui arrivent en Italie sans famille ne pourront pas être renvoyés. Ils devront recevoir les mêmes droits que les jeunes européens de leur âge. C’est le sens de la loi sur « la protection des mineurs étrangers non accompagnés » adoptée définitivement mercredi 29 mars par la chambre des députés en Italie. 375 pour, 13 contre (la Ligue du Nord) et 41 abstention.

Que propose la loi ? Une prise en charge adaptée.

  • Interdiction de reconduction à la frontière
  • Instauration d’un système uniformisé sur l’ensemble du territoire d’évaluation de l’âge des jeunes.
    – La loi part du principe qu’une marge d’erreur de plus ou moins deux ans est possible avec les tests osseux (poignet et main) controversés. Cela ne suffit donc plus à établir l’âge.
    – la loi oblige la présence d’un médiateur culturel durant la procédure (très présents en Italie, les médiateur sont des personnes arrivées en Italie depuis plusieurs années et qui ont suivi une formation. Ces travailleurs sociaux s’adressent directement aux migrants dans leur langue, et connaissent le pays.)
    – l’évaluation se fait dans une structure sanitaire désignée par un juge, et par une équipe pluridisciplinaire (dont le médiateur)
    – l’enfant doit être tenu informé et consentir aux tests
    – il s’agit d’examens auxologiques (voir le développement staturo pondéral) « utilisant les méthodes les moins invasives possibles et respectueuses de l’âge présumé, du sexe et de l’intégrité physique et psychique de la personne. »
    – s’il reste des doutes sur la minorité (en prenant en compte la marge d’erreur de plus ou moins deux ans), la minorité est présumée.
    – dans le rapport, la marge d’erreur doit obligatoirement apparaître (ce qui n’est pas le cas aujourd’hui)
    – enfin, le jeune migrant doit recevoir la notification de l’évaluation de son âge dans une langue qu’il comprend et d’une manière adaptée à son âge
  • Une enquête doit être lancée pour trouver des majeurs de la famille susceptibles de s’occuper de l’enfant.
  • Trente jours maximum après leur arrivée, contre 60 auparavant, les enfants dont aucun membre de la famille n’a été trouvé devront être transférés vers un centre d’accueil spécifique.
  • Un tuteur volontaire et le placement en famille d’accueil seront alors mis en place.
  • Un dossier sur la situation sociale de l’enfant est monté et transmis aux antennes sociales compétentes et au procureur de la République afin de trouver une situation adaptée sur le long terme.
  • Vu que le raccompagnement à la frontière ou l’expulsion des mineurs est désormais interdite, la loi prévoit de leur attribuer un permis de séjour valable jusqu’à leur majorité.
  • Tout au long de la procédure, le mineur a le droit d’avoir un référent légal, le tout à la charge de l’Etat.
  • Un programme spécifique s’adresse aux mineurs victimes de traite
  • L’accès aux soins et à l’éducation leur seront assurés.
  • Les associations inscrites au registre pourront intervenir à tout moment dans la procédure (plusieurs associations et ONG sont à l’origine de la loi) et peuvent recourir à l’annulation « d’actes illégitimes ».

En France, la loi ne s’inquiète que de la détermination de l’âge

En France, après la crise migratoire de 2013, une circulaire voulue par la ministre de la Justice Christiane Taubira prévoyait la prise en charge des mineurs isolés sur le territoire. Cette circulaire a partiellement été retoquée par le Conseil d’Etat en 2015.

Depuis, une loi de mars 2016 précise que les examens osseux ne peuvent suffirent à déterminer la minorité du jeune étranger et un décret de juin 2016 demande, comme en Italie, que les autres tests permettant de déterminer l’âge de la personne soient réalisés dans une « approche pluridisciplinaire » et dans une langue comprise. Mais la loi française ne s’inquiète que de la détermination de l’âge.

Migrant boat // Matt Brown // Flickr
Près de 26 000 mineurs ont débarqué seuls en Italie en 2016 // Migrant boat, Matt Brown @Flickr

25 846 mineurs isolés sont arrivés en Italie en 2016

Paolo Gentiloni, chef du gouvernement italien, a salué « un choix de civilisation, pour la protection et l’intégration des plus faibles. »

L’Organisation Non Gouvernementale (ONG) Save the children est allée dans le même sens :

« L’Italie peut se dire fière d’être le premier pays d’Europe à se doter d’un système organique qui considère les enfants migrants avant tout comme des enfants ».

Plusieurs ONG, dont Save the children, la section italienne d’Amnesty International et Caritas, travaillaient depuis trois ans à l’approbation de cette loi, déjà votée par le Sénat. Une loi organique, relative à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics. En 2013, lors de la présentation du projet de loi, les mineurs isolés n’étaient que 7000 à débarquer sur les côtes italiennes. En 2016 selon le ministère de l’Intérieur, 25 846 mineurs non accompagnés sont arrivés en Italie, plus du double par rapport aux 12 360 arrivés l’année précédente.

Ces mineurs isolés représentaient 14 % du total des arrivées en Italie en 2016. Or, au bord de l’implosion, le système d’accueil italien n’a pas toujours proposé des solutions adaptées pour ces enfants.

Selon Save the children, plus de 6000 auraient même disparus. Des fugues, souvent pour rejoindre des proches dans d’autres pays d’Europe, qui exposent les mineurs aux réseaux mafieux, criminels ou de prostitution. Inquiétant selon l’ONG, les jeunes femmes sont de plus en plus nombreuses à arriver seules en Italie.


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Photo d'illustration ©Fondation Abbé Pierre

Photo : Fondation Abbé Pierre

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