Quand on entre dans l’épicerie-cantine, les étagères et étals remplis de fruits de légumes, de pots, de bouteilles font du lieu une petite maison de poupées. Puis viennent d’agréables odeurs de cuisine et, derrière le comptoir, se tiennent Morgane et Sébastien, un couple expatrié de la région parisienne.
« Tout est fourni en circuits courts. Les produits frais viennent de l’Ain ou du Rhône, pour la plupart. On voulait mettre en avant les petits producteurs chez qui il y a beaucoup de savoir-faire. »
C’est en vrai connaisseur que Sébastien parle. Fils d’un agriculteur de l’Ain, il a fait ses études et sa carrière de commercial au sein du monde agricole, pendant laquelle il a pu tisser des liens avec les paysans de la région.
« On connaît chaque producteur, on sait comment ils travaillent car on a vu leurs exploitations. Le but est de les connaître au mieux pour ensuite pouvoir nous-mêmes expliquer au clients d’où viennent leurs produits. On a d’une certaine façon labellisé tous nos produits. Mais c’est un label tout personnel. »
Pas d’intermédiaire entre les producteurs et l’épicerie, les produits sont évidemment de saison, provenant de petites exploitations.
Pâtes, farines, terrines de poissons, saucissons, purée de fruits, sorbets, si l’épicerie est bien fournie, c’est surtout du côté des fourneaux que les affaires marchent.
« On a toujours aimé la bonne bouffe »
Il y a en encore trois ans, Morgane, titulaire d’un master stratégie de développement durable, développait des activités de mécénat auprès des banques. Aujourd’hui, la jeune femme qui ne se sentait pas « l’âme d’une entrepreneuse » cuisine tous les jours pour ses clients.
« À l’origine, on aime la bonne bouffe, alors on cuisine surtout ce qu’on aime. Mais on invente beaucoup, car la carte change tous les jours. Ce sont toujours des choses très simples. Une cuisine familiale. »
Et elle plait. La restauration marche bien auprès des personnes travaillant dans le quartier, qui viennent passer ici leur pause-déjeuner. Le menu évolue au gré des saisons et de la disponibilité des produits, ce qui impose aux cuistots d’avoir de l’imagination et aux clients de la curiosité.
« Les banques n’ont pas osé parier sur nous… Elles ont eu tort. »
Il a fallu une année pour avoir une liste solide de producteurs, pour monter un business plan et trouver le cadre global le plus adapté à leurs envies. Mais aussi pour s’informer sur les circuits courts déjà en place dans la ville.
C’est en faisant leur étude de marché que le couple décide d’installer leur commerce dans le 6ème arrondissement, un quartier « où il y a peu de concurrence et une clientèle qui a les moyens ».
« On cherchait dans le 6ème et plus spécialement près du métro Foch. Ça a été très difficile de trouver un local car les règlements de copropriété sont très stricts pour la restauration. Finalement, on a trouvé ce local dans lequel les travaux étaient déjà faits, plus éloigné du métro mais tout proche du parc de la Tête d’Or. »
L’emplacement relativement isolé des rues commerçantes n’a pas aidé à trouver des financements. Il a fallu démarcher sept banques et essuyer presque autant de refus.
« Les banques étaient frileuses à cause de l’emplacement. On ne demandait que 55 000 euros, ce qui n’est pas un gros prêt, mais elle n’ont pas osé parier sur nous. A tort, parce que l’on s’en sort très bien, » signale Morgane avec un sourire aux lèvres.
Le couple a également déposé un dossier auprès de Rhône Développement investissement (RDI) qui a permis l’obtention d’un prêt à taux zéro pour les créateurs d’entreprise : 7000 euros par personne.
Cet argent leur permet d’acheter le matériel dédiée au froid, mais aussi d’avoir une trésorerie suffisamment importante pour un départ serein et « avoir le temps de voir venir ».
Pour appuyer leur projet, Morgane et Sébastien ont écumé les forums d’entrepreneurs.
« La restauration était notre point le moins fort, il nous a fallu apprendre pour connaître les marges, créer un service rapide, gérer la clientèle. »
« Si l’on grossit trop, on aurait peur de perdre notre âme »
Les affaires marchent bien pour le couple, même s’il reste « des détails à fignoler ».
« L’autre jour, quelqu’un est venu et nous a demandé si nos fraises venait du Maroc… Le marketing n’est pas notre truc, il faut vraiment qu’on revoit notre com’. »
Malgré quelques couacs, l’affaire tourne et le travail ne manque pas.
« On a atteint la imite de ce que l’on pouvait faire à deux. »
Ce qui a poussé le couple à embaucher une personne à mi-temps. Ils rêvent à de nombreux projets : développer un service de réservation en ligne, organiser une activité de traiteur, ou encore lancer un brunch le dimanche matin.
« On veut rester dans quelque chose d’assez familial, nos clients nous connaissent et apprécient l’atmosphère. Si l’on grossit trop, on au aurait peur de perdre notre âme. Mais cela fait malgré tout envie de se dire qu’un deuxième Label et Sébastien pourrait ouvrir ses portes. »
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