« On a compté en toute objectivité : 500 personnes selon la Police, et 500 personnes selon les manifestants », a indiqué Pierre Tholly en souriant.
Il est le secrétaire régional du syndicat Alliance et il a pour habitude de compter lui-même les manifestants.
Cette fois, il est venu pour exprimer son propre blues, répondant à l’appel national du syndicat majoritaire Alliance. Environ 300 agents se sont rassemblés devant la préfecture de Lyon, selon notre comptabilité.
Contrairement à Paris où des incidents ont éclaté, le rassemblement de Lyon est resté calme. Une contre-manifestation était également prévue à quelques rues de la préfecture, mais elle a été interdite à midi par le préfet.
Marseillaise entonnée et terrorisme visé
Le rassemblement a commencé par les discours des principaux représentants des syndicats, en hauteur mais légèrement chancelants, pieds joints sur un poteau de la ville. Pierre Tholly a déclenché les hostilités face à une foule réceptive.
« Nous ne laisserons pas une minorité menacer la démocratie. Les policiers sont fatiguées, harassés, mais ils resteront debout ! », s’est-il exclamé au micro.
Poursuivant un parallèle avec le mouvement Nuit Debout.
« C’est qui la France debout ? Celle qui protège ? Celle qui combat le terrorisme ? C’est qui ? »
La foule lui a répondu en chœur : « C’est nous ! »
Il a aussi rappelé le nombre de policiers blessés lors des manifestations, au nombre de 350 en France selon lui. Et s’est insurgé contre les « prises de position irresponsables » des hommes politiques. Les discours se sont terminés par une Marseillaise, entonnée avec ferveur.
Quelques hurlements jetés par un homme adossé à la préfecture a bousculé le rassemblement. Le protestataire a vite été rejoint par quatre policiers. L’un d’eux lui a asséné :
« Pendant la Marseillaise, on ferme sa gueule ! »
La nouvelle secrétaire départementale du FN, Muriel Coativy, est venue faire un tour en soutien. Elle a rejoint l’ancien tête de liste FN aux élections municipales de Vénissieux de 2015, Damien Monchau, CRS de profession.
— COATIVY Muriel (@COATIVY_M) 18 mai 2016
« Pas de solution immédiate au mal-être policier »
Dans les rangs des manifestants, on a entendu un peu partout les policiers ou leurs soutiens raconter ce qu’ils ont vu ou entendu. Crachats, insultes, parfois plus encore. Aziz est secrétaire zonal d’un nouveau syndicat né en septembre 2015 : Alternative Police nationale. Il raconte être tombé sous le coup des bombes agricoles, pendant les manifestations de ces dernières semaines.
Julien, 36 ans, est en service depuis 19 ans. Il s’est exclamé, la voix grave :
« On est passé à un stade supérieur. On se demande si maintenant leur but est pas de tuer du policier ? »
On est aussi tombé sur Anne (le prénom a été modifié à sa demande), officier de police qui n’a pas voulu révéler son grade (« sinon ils vont me tomber dessus »). Elle nous a expliqué être présente pour soutenir ses collègues qui sont sur le terrain.
« Il y a un manque de répondant par rapport aux manifestants. On ne se sent pas soutenus ».
C’est sans doute qu’elle n’a pas vu le tweet du Premier ministre dans la matinée.
Policiers et gendarmes protègent chaque jour citoyens et institutions. S’en prendre à eux, c’est s’attaquer à nous tous. #AvecNosPoliciers
— Manuel Valls (@manuelvalls) 18 mai 2016
« Il faut une prise de parole. Si les collègues se font tabasser, ce n’est pas normal, ajoute-t-elle. Les manifestations de policiers sont rares, mais là nous en avons ras le bol ! »
Mais elle n’est pas là que pour cela, contrairement à la majorité des policiers réunis devant la préfecture. Anne veut avant tout plus de reconnaissance pour son métier, ainsi que les risques qu’ils encourent.
« On ne se sent pas soutenus, que ce soit au niveau des autorités ou de la population. Du côté de la population ça va encore, se reprend-elle, mais c’est surtout pour les autorités. Il y a un manque de reconnaissance au niveau de l’administration de la Police Nationale, pour l’ensemble des grades, que ce soit pour le gardien de la paix où les officiers. Ça doit bien faire 20 ans que cela dure, donc ce n’est pas politique. Gauche ou droite, c’est pareil ! »
Elle estime qu’il n’y a pas de solution immédiate au mal-être policier.
Et les violences policières ?
Quand on lui demande ce qu’il répond aux accusations de violences policières faites à l’encontre de manifestants pacifistes, Julien, le policier de Vaux-en-Velin, a l’air las.
« Ils manifestent d’ailleurs de manière légitime contre la loi travail. Les policiers sont là pour assurer leur sécurité. Et une petite minorité infiltre ces manifestants. »
Les consignes sont claires pour ceux-là : ils doivent être sortis du groupe de manifestants. Les policiers estiment faire leur travail du mieux qu’ils peuvent.
« Il ne faut pas faire de dommages collatéraux, ces groupes sont donc difficiles à interpeller. À Vaux-en-Velin par exemple, il y a 30 à 40 casseurs sur 200 manifestants. Par contre ils sont déterminés », explique Julien.
Vers 13h30, le rassemblement de policiers a pris fin.
> Article mis à jour le 23 mai à 20h, avec le tweet de la secrétaire départementale du FN
Chargement des commentaires…