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Greenlys testé à Lyon : le réseau électrique du futur peu convaincant

Tester grandeur nature le réseau électrique de demain. C’est l’objectif du projet « Greenlys », mené depuis 2012 à Lyon et Grenoble, permettant de d’anticiper la consommation d’électricité et d’intégrer les sources d’énergie renouvelable. Quatre ans après le lancement, son bilan est quelque peu contrasté.

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Greenlys testé à Lyon : le réseau électrique du futur peu convaincant

Les foyers test de l'expérimentation Greenlys ont été équipés des outils de la gamme Wiser du fabricant Schneider Electric. © Greenlys
Les foyers test de l’expérimentation Greenlys ont été équipés des outils de la gamme Wiser du fabricant Schneider Electric. © Greenlys

A Lyon, on aime beaucoup les « smart grids ». Gérard Collomb du moins, le sénateur-maire de la ville, ne loupe jamais une occasion de dire à quel point sa ville est « smart ». Qu’est-ce que cela signifie ? Littéralement, un « réseau électrique intelligent ». Et ça sert à quoi ? Trouver des solutions techniques pour gérer au mieux la production et la consommation d’électricité via notamment des capteurs installés sur l’ensemble du réseau.

Dans le but de baisser notre consommation globale et d’augmenter la part des énergies renouvelables.

La loi sur la transition énergétique d’août 2015 fixe d’ailleurs des objectifs clairs et chiffrés :

  • 40 % d’émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030
  • 50 % de la consommation finale d’énergie d’ici 2020
  • les énergies renouvelables (ENR) devront représenter 1/3 de la production totale d’ici 15 ans.

400 beta testeurs à Lyon et à Grenoble

Le nouveau compteur électrique assurant la transmission des données de consommation, le fameux « Linky », est un des outils de ce futur réseau intelligent. Mais pas le seul. Nouveaux outils de gestion et reconfiguration du réseau en cas de panne, pilotage de la consommation et des appareils de chauffage par le consommateur, meilleure introduction des ENR, gestion des « pics de production », c’est sur toute la chaîne que le projet Greenlys a testé grandeur nature l’organisation d’un réseau électrique « du futur » (proche).

Pour cela, les principaux acteurs du secteur ont participé, soit :

  • ERDF
  • ENGIE (ex-GDF Suez)
  • GEG (Gaz Électricité de Grenoble)
  • Schneider Electric
  • ainsi que Grenoble INP pour le champ académique

Le projet a aussi impliqué la participation de clients « cobayes ». Ainsi, 400 « clients expérimentateurs » à Grenoble et à Lyon ont été équipés d’outils de gestion et de pilotage de leurs appareils de chauffage par smartphones ou ordinateurs et ont bénéficié d’offres tarifaires adaptées pour beaucoup pas encore commercialisées au grand public.

Schéma représentation l'organisation du réseau électrique en France du producteur au client final. © DR
Schéma représentation l’organisation du réseau électrique en France du producteur au client final. © DR

Les conclusions de quatre ans d’expérimentation ont été présentées jeudi 28 avril à Lyon. Lors de cette conférence de presse, tous les acteurs institutionnels et académiques de Greenlys n’ont eu de cesse de se féliciter de leur collaboration. Publications académiques, nouveautés techniques et « joie de travailler ensemble ». C’est non négligeable mais toutes leurs conclusions ou préconisations ne sont pas nécessairement aussi réjouissantes.

« Effacer sa consommation » fait-il baisser sa facture d’électricité ?

L’expérimentation a notamment été axée sur « l’effacement des consommations ». En clair, il s’agit de baisser la consommation en électricité d’un foyer ou d’un bâtiment tout cela à distance en prenant la main sur le système de pilotage des consommateurs.

L’objectif avoué est d’éviter au maximum les pics de consommation sur le réseau qui entraînent la mise en route de centrales de productions pour satisfaire les besoins et qui sont grandes émettrices de dioxyde de carbone.

Cet « effacement » de consommation d’une maison ou d’un immeuble représente-t-il réellement une baisse de consommation d’énergie ? Les tests ont consisté à baisser la température des appareils de chauffage d’un degré durant une heure dans un premier temps puis durant 15 minutes dans un second temps.

Ces tests montrent qu’au moment du retour à la normale les appareils fonctionnent à plein pour retrouver le niveau de température souhaité. S’ensuit alors « une surconsommation en puissance de 50 % dans les minutes qui suivent l’effacement » et une « surconsommation en énergie comprise entre 40 et 60 % immédiatement après l’effacement et jusqu’à 95 % après 24 heures ».

Il s’agit donc plutôt d’un report de la consommation et les économies d’énergie sont donc minimes. Elles ne sont en tout cas pas automatiques avec un tel dispositif et les effets de surconsommation induits sont, selon le consortium, « maîtrisables avec des stratégies de reprises adaptées ». L’impact sur le confort des clients serait quasiment nul selon les études de satisfaction. Le chiffre 16 % de gains a été avancé mais seulement « certains jours ».

La baisse de la facture finale pour le client reste donc encore difficile à évaluer.

C’est toi qui a baissé le chauffage ? Non. C’est qui alors ?

Une telle gestion à distance de son chauffage ou de son chauffe-eau par un tiers implique également une acceptation de la part du client. Elle n’est donc pas neutre. Elle introduit un futur acteur du réseau électrique : l’agrégateur.

Il viendrait s’ajouter aux producteurs, distributeurs et fournisseurs d’électricité et jouerait, selon les acteurs de Greenlys, un rôle d’intermédiaire avec le client final. Il serait chargé de « valoriser les capacités d’énergie agrégées via les effacements de consommation » pour équilibrer « production et consommation » d’énergie.

En clair, il est préconisé de créer une sorte de marché où se vendraient les capacités à ne pas consommer des clients.

Selon les acteurs de ce « démonstrateur » grandeur nature, 82 % des ménages « beta testeurs » se sont déclarés satisfaits ou très satisfaits de l’expérimentation. Avec comme premier critère de satisfaction la possibilité de piloter soi-même son système de chauffage. Une telle reconfiguration du réseau électrique passe entre autres par l’installation du compteur électrique Linky permettant la transmission de données à distance pour connaître la consommation en temps réel et mieux gérer le réseau. Il permettra également, selon ERDF, la mise en place d’offres tarifaires adaptées.

Linky « n’est pas intrusif », on vous dit

Un compteur Linky (crédit : Alain Jocard / AFP)
Un compteur Linky (crédit : Alain Jocard / AFP)

Mais ce dispositif, déployé à Lyon depuis 2010 et dans la France entière d’ici à l’année prochaine, suscite de nombreuses réticences chez certains. Autour notamment de la question de la préservation de la vie privée. Avec des données concernant notamment la « courbe de charge » qui envoient des relevés heure par heure il serait ainsi possible de savoir pour ERDF quand les clients se trouvent à leur domicile, leurs heures de réveil, de coucher ou le type de matériel utilisé pour l’éclairage ou le chauffage.

La Commission Nationale informatique et libertés (CNIL) a d’ailleurs demandé à ERDF de ne stocker les données que dans le compteur lui-même.

De nombreux opposants se regroupent dans différentes régions de France pour refuser son installation. Ce qui est dans les faits très compliqué pour le client. C’est notamment le cas à Pont-de-Claix en Isère où des habitants exigent l’arrêt du déploiement des compteurs Linky. Une ville dirigée par Christophe Ferrari par ailleurs président de la métropole de Grenoble acteur du projet Greenlys.

Quand il fut demandé au parterre de donner des gages de confiance dans ce nouvel équipement, c’est le président de l’ADEME, Bruno Léchevin, qui est monté au créneau. Sans masquer son agacement :

« Linky n’est pas intrusif, c’est un moyen pour les gens d’être acteurs du changement, de leur impact sur l’environnement et sur leur pouvoir d’achat. C’est comme ça qu’on doit le vendre (sic). Si c’est mal compris c’est qu’on est trop resté entre ingénieurs », a-t-il déclaré.

Puisqu’on vous le dit.

Les acteurs du projet Greenlys espèrent désormais que leurs conclusions aideront les pouvoirs publics à moderniser le réseau électrique. Pour voir peut-être vraiment à l’œuvre des « villes intelligentes » ?


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Image tirée du film de Steven Spielberg, Minority report (2002).
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