Direction le parc de la Feyssine, un samedi après-midi ensoleillé. Deux jeunes hommes accrochent des sangles aux arbres. Peu à peu, d’autres jeunes gens les rejoignent. A la fin de la journée, ils seront près d’une dizaine. Hommes comme femmes, au style plutôt détendu, s’adonnent à cette nouvelle passion qui consiste à tenir en équilibre sur une ligne.
Une slack, puis deux, puis cinq sont installées dans le parc. A côté, les slackliners attendent leur tour en jonglant ou en discutant, allongés sur l’herbe. L’ambiance y est décontractée.
Des badauds, intrigués, s’approchent de ces funambules modernes. Certains descendent de leur vélo pour tester la « slack ».
Portraits de mordus
Romain Chagny a très rapidement adhéré à la jumpline. Cette discipline est devenue un sport à part entière, avec des compétitions nationales et internationales. Avec une bande plus courte et plus tendue, le « jumpliner » profite du ressort de la ligne pour faire des figures.
Ce qui lui a plu, c’est le côté extrême :
« Avant je faisais du BMX, c’est qui m’a permis de venir à la « jump », pour retrouver des sensations fortes. Maintenant, je fais des contests (championnats) depuis deux ans. »
La jumpline est entrée dans sa vie tout simplement. Dans un parc, avec des amis, on lui fait une démonstration de slackline :
« J’ai galéré à passer ma première slack de huit mètres. J’y ai mis la journée » confie-t-il, « mon défi était de traverser cette sangle. »
Il accroche immédiatement. Puis il se met à la jumpline.
Cet ancien plombier-chauffagiste entame aujourd’hui une formation de cordiste. Il explique :
« J’adore être sur une highline, être en hauteur. Cette formation me permet d’associer loisir et travail. »
Romain ne regrette pas d’avoir arrêté le BMX. Il se retrouve complètement dans le milieu des slackiliners, « plus convivial, plus tranquille », d’après lui.
L’an dernier Romain était 3e au championnat de France. Pour le moment, il est premier, à la suite de deux contests.
Orianne connaissait la slackline. Elle avait vu des sessions de higline diffusées à la télé, lors de reportages. Mais lorsqu’elle est arrivée à Lyon, elle a eu du mal à trouver des slackliners. Sa première fois, c’était lors d’une démonstration à la salle d’escalade Azium, proposée par l’association Ekilibre.
Elle se souvient de sa première ligne, c’était le 15 février 2014 :
« Pour moi, c’est le plaisir d’être toujours en bascule et de retrouver des sensations aériennes. J’avais fait de la gymnastique pendant 10 ans. »
Orianne slack au moins une fois par semaine. La highline et la jumpline l’ont attirée immédiatement, mais elle avoue avoir un peu peur du vide, surtout depuis qu’elle s’est blessée.
Après avoir suivi une formation de graphiste, elle s’est réorientée en psychologie. Son but est de devenir psychométricienne, spécialisée dans la gestalt thérapie. Il s’agit d’appréhender les difficultés psychiques par le corps. Cette tension entre le corps est l’esprit, c’est la définition qu’elle donne à la slackline :
« Pour moi, il s’agit de me replacer au niveau de mon corps, ça a du sens. C’est retrouver aussi mon propre équilibre dans la vie. »
Nathaniel Seror était sportif. Il faisait du vélo et de la natation. Depuis qu’il a découvert la slackline par hasard dans un parc, il a totalement délaissé les autres activités :
« Ca fait presque deux ans que j’en fais de manière intensive. Et maintenant je fais de la highline entre deux falaises, c’est une passion assez dévorante. »
Pour lui, la highline permet de passer des week-ends à la montagne avec des amis. Mais aussi de partager des moments forts, « parce que c’est psychologiquement éprouvant », explique-t-il.
« Ca demande plus d’efforts, plus d’exigences, mais ça ne m’empêche pas de poser une slack entre deux arbres dans des parcs le reste du temps. »
Selon lui, rien ne le prédestinait à la highline.
« Au départ, la montagne, l’escalade et les sports de nature c’était pas du tout mon délire, je m’y suis mis depuis. »
Nathaniel tient à rassurer les curieux de cette discipline extrême :
« C’est la pratique la plus impressionnante mais finalement, c’est la moins dangereuse. Quand on chute, on est accroché à une corde, ce qui n’est pas le cas pour la slackline. »
Un sport qui s’officialise
Outre ces trois mordus de slackline, ils sont 1000 membres au compteur du groupe Facebook Ekilibre, fondé il y a quatre ans. La slack est un sport qui se démocratise. Mais les relations avec les autorités, mairie et forces de l’ordre, ne sont pas toujours au beau fixe.
Il n’existe pas d’accord officiel entre les slackliners et la mairie de Lyon. Rien n’est explicite. La pratique repose sur un accord tacite fondé sur une certaine tolérance des autorités publiques à l’égard des slackliners.
L’association Ekilibre a notamment eu quelques différends avec le directeur du Parc de la Feyssine. Dans Lyon, certains parcs, comme celui de la Tête d’Or sont interdits. Les arbres sont protégés.
Sans législation, la slackline connaît quelques dérives : des problèmes de sécurité, des accroches de slack à des arbres trop fins. L’association Ekilibre a alors décidé d’élaborer une charte de bonne conduite. Ils ont établit un partenariat avec l’adjoint délégué espaces verts, cadre de vie, nouveaux modes de vie urbains et qualité de l’environnement Alain Giordano de la mairie centrale.
Ekilibre écrit la charte et la mairie du 6e la distribue à tous les revendeurs de matériel de slackline. L’association est également en contact avec l’adjoint au sport du sixième Xavier Simond, le responsable espaces verts de la mairie du 6e arrondissement. Grâce à ces liens, Ekilibre se réunit dans les locaux de la mairie du 6e pour organiser les événements de l’association.
C’est d’ailleurs dans le sixième arrondissement que s’est déroulé le « Rock the Line » au Parc de la Tête d’Or, pour un contest de jumpline.
Les lieux conseillés pour « slacker »
Spots conseillés par l’association Ekilibre pour pratiquer la slackline à Lyon.
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