La preuve vient d’en être donnée, une fois de plus, avec la dernière baisse spectaculaire des demandeurs d’emploi, alors qu’il ne s’agit que d’une augmentation sauvage des radiations. Ceci dit, nous devons balayer devant notre porte car nous avons aussi tendance à les prendre, nous mêmes, pour argent comptant quand ça nous arrange, sans chercher à savoir si ils sont exacts.
Essayons donc de voir un peu plus clairement de quoi il en retourne quand il s’agit des chiffres de ce qu’on appelle « délinquance », car tu n’ignores pas à quel point ce sujet m’est cher et combien je suis vigilant à rétablir la réalité. J’avais d’ailleurs annoncé, dans un article précédent, que j’en parlerais.
Tu ne seras pas étonné si je te dis que ces chiffres là sont évidemment manipulés pour affoler le plus grand nombre et justifier la sécurité.
On nous dit en permanence que le nombre de crimes et de délits est toujours en augmentation alors que c’est faux. Il est en baisse régulière et inversement proportionnel au taux d’incarcération. Comment cela est-il possible ? Voici quelques explications non exhaustives.
Tout dans le même sac
Lorsqu’une plainte est déposée, le flic qui l’enregistre la compte dans ses statistiques. Mais ce qu’il faut savoir, c’est que cette plainte est souvent traitée ensuite par une autre personne, le plus souvent un officier de police judiciaire, qui n’appartient pas forcément au même commissariat. Lui aussi la comptabilise.
Ce n’est pas de la malveillance, mais cela est dû au fait de la politique du chiffre que les forces de l’ordre doivent faire valoir (démontrer leur efficacité, service par service) depuis les méthodes du « naboléon ». Donc, la majorité des plaintes, pour cambriolage par exemple, sont comptabilisées deux fois. C’est une des grandes causes de l’augmentation des chiffres statistiques.
Avec les lois faits divers, les remaniements des sanctions du code pénal, les nouvelles requalifications ou créations de délits ou crimes, on ajoute ces nouveaux critères, mais sans jamais les signaler dans les résultats globaux. Et on hurle à l’augmentation.
La nouvelle loi qui condamne à deux mois de prison ceux qui préviennent par réseaux sociaux qu’il y a des contrôleurs de transports en commun à tel endroit en est l’exemple. La judiciarisation des délits routiers illustre aussi parfaitement mon propos.
Pour rester simple et compréhensible, tout est ainsi regroupé dans de grandes catégories où tout se confond allégrement. Les fameuses incivilités dont on nous rebat les oreilles, à savoir insultes, menaces ou intimidations, souvent des propos tenus sous le coup de l’alcool ou de la colère, ne rentraient pas dans ces chiffres il y a quelques années de cela. Elles ne donnaient pas lieu à des audiences judiciaires, mais seulement à des sermons ou à des classements sans suite.
A présent elles sont comptabilisées sous la dénomination « agression » et sanctionnées comme telle.
Autre exemple : les gestes ou propos déplacés, inadmissibles, nous sommes d’accord, comme les attouchements ou frottages dans les transports en commun, ou encore des réflexions salaces, lorsqu’elles font l’objet d’une plainte, rentrent dans la catégorie unique d’agressions sexuelles et viol.
Je ne suis pas en train de minorer ces attitudes répréhensibles qui devraient cesser impérativement, mais juste en train de dire qu’il y a quand même une sacrée différence, malgré tout, entre des propos ou des gestes plus qu’insupportables et un viol.
Oui, la criminalité baisse
Enfin, il y a le fameux phénomène de la comparaison et la question des délais entre deux statistiques. Il n’en va pas de même si l’on met en rapport délits et crimes d’une année sur l’autre et sur une période de 10 ou 20 ans. Lorsque le temps est court entre 2 chiffres, et que ne sont pas distingués les « nouveautés », la progression est spectaculaire et les médias ne se privent pas d’utiliser exclusivement ces comparaisons là.
Mais lorsqu’on regarde avec rigueur la réalité sur une plus longue période, à critères constants, tous les spécialistes sérieux disent que ces crimes et ces délits sont en baisse constante depuis 40 ou 50 ans, ceci de manière sensible et non à la marge comme le prétendent certains manipulateurs, idéologues de la sécurité voulant maintenir une répression massive.
On tue largement moins en 2016 qu’en 1950 et ce qu’on appelle la grande délinquance organisée a quasiment disparu. Parallèlement, en 1950 il y avait seulement 20 000 prisonniers, aujourd’hui on frôle les 70 000.
Le monsieur criminalité des gouvernements, droite et gauche confondus si tant est qu’il existe encore une différence, intronisé comme dirigeant de l’observatoire nationale de la délinquance, en l’occurrence le sieur Alain Bauer, est obligé d’accréditer ces baisses notables de crimes et de délits, malgré qu’il fasse bouillir sa propre marmite avec l’insécurité.
Oui, il faut savoir qu’il a été président d’AB Associates, société de consultant en sécurité et actionnaire majoritaire dans de nombreuses boites de sécurité, en plus du département de criminologie qu’il dirige.
Tournier, lui aussi confirme cette baisse alors qu’il est exclusivement inféodés aux chiffres de la pénitentiaire. Je cite ces deux personnages car ce sont eux justement qui font très souvent référence et on peut voir la collusion entre ces fameux experts et les arrangements avec la réalité.
Pourquoi la population carcérale augmente-t-elle ?
Tu vas me dire, lecteur, que je raconte des histoires puisque la population carcérale augmente.
Mais elle n’augmente pas pour ces raisons là. C’est vrai que la croissance est hélas régulière et exponentielle mais par des causes qui n’ont rien à voir avec les statistiques évoquées juste avant. Le nombre de prisonniers augmente d’abord parce que les peines sont de plus en plus lourdes. Ensuite parce que les aménagements de peine sont de moins en moins prononcés.
Et enfin parce que, comme je le disais précédemment, des faits qui n’étaient pas sanctionnés par une incarcération le sont à présent par durcissement des lois. La preuve est que la durée moyenne d’incarcération, en 1970, qui était de 5 mois, est passé aujourd’hui à plus de 11 mois.
Tu pourrais maintenir tes objections en disant que j’affirme sans étaler les chiffres auxquels je fais référence. Je n’ai pas la place dans ces articles pour faire une démonstration sociologique. Et puis je me dis que si tu veux vraiment savoir, cherche, creuse, intéresse toi au fait qu’on t’enfume.
Sinon je serais à l’image de ces désinformateurs que sont les Pujadas et compagnie à te donner la becquée ou à te faire croire que seuls les spécialistes et autres experts savent de quoi ils parlent. Si tu affirmes telle ou telle chose, alors valide tes affirmations. Et avec le net, aujourd’hui, il est facile de le faire. Il te suffit d’aller voir attentivement les chiffres du ministère de l’intérieur, de l’ONISR, de l’INSERM ou encore d’eurostat, ils sont tout à fait accessibles.
Tu vois, lecteur, je balise ta recherche avec mes sources.
Je vais même te donner en plus un travail de réflexion. Que signifie idéologiquement et socialement le fait qu’une population carcérale soit en augmentation permanente alors que crimes et délits graves sont en baisse constante ?
Chargement des commentaires…