Après celui de Fathia, découvrez celui d’Olivier, 46 ans. Ce cuisinier habitait un pavillon en banlieue lyonnaise avec sa femme et ses cinq enfants âgés de 3 à 17 ans.
Le loyer de 1250 euros semblait accessible pour ce couple qui travaillait mais c’était sans compter les factures d’énergie exorbitantes (400 euros en moyenne par mois) et le licenciement économique d’Olivier, qui s’est accompagné d’une perte de revenus de près de 800 euros.
« Cette maison était un gouffre »
Les problèmes ont commencé en 2012 à la suite de mon licenciement économique. Je me suis retrouvé au chômage alors que ma femme était à cette période en congé maternité. Le budget a rétréci et ça a été l’engrenage car, en même temps, ma fille est tombée malade, ce qui a entraîné de nombreux frais.
Malgré la mutuelle, il faut sortir les sous, notamment pour l’hospitalisation. Donc on a privilégié dans le budget les courses et les dépenses de santé. Et puis on a eu des retards de loyers, suivi d’EDF, et du gaz. Bref, c’est tout un ensemble de choses qui sont arrivées en même temps. Des frais additionnés.
On a donc dû choisir les priorités, c’est ça le problème.
Comme on avait de bons revenus, on avait une maison. C’était une agence immobilière qui nous louait un pavillon assez grand. Mais les factures d’électricité et de gaz étaient énormes parce que les gros radiateurs consommaient un max. Ils ne fonctionnaient pas correctement, ils chauffaient trop. On était en surconsommation. C’était affreux.
Même les prestataires qui venaient faire des relevés de compteur disaient que ce n’était pas normal. On avait toujours des dépassements. A chaque relevé on dépassait les 600 euros. Donc il y avait des charges énormes, et comme je me suis retrouvé au chômage les complications sont arrivées. C’était affreux, cette maison était un gouffre. Et le pire, c’est que l’agence ne voulait pas faire les travaux nécessaires. En même temps elle ne voulait rien savoir, vu qu’on ne payait pas le loyer !
« L’expulsion avec cinq enfants, c’est pas une expérience à vivre »
On a laissé passer un loyer, deux loyers et puis après on ne s’est pas rendu compte mais on ne pouvait plus rattraper. C’est ça, l’engrenage. Il y avait toujours un truc qui arrivait, qu’il fallait payer. On essayait de payer un loyer en plus mais on avait déjà trois, puis quatre, puis cinq loyers de retard.
On ne pouvait plus suivre et la procédure d’expulsion s’est mise en route.
Au début de l’année 2013, quand la procédure a été lancée, c’était presque trop tard. Nous, on voulait s’arranger avec l’agence mais ils n’ont plus rien voulu savoir. Ils voulaient surtout qu’on parte du logement. Du coup, on a décidé de ne plus payer du tout. Je ne sais pas si c’était une bonne chose. Mais, de toute façon, on avait compris qu’on ne pouvait pas rester.
On est arrivés jusqu’au bout du bout. Il y a eu le jugement. Puis une période où on était en trêve hivernale. Mais après la trêve hivernale, on pouvait se faire expulser du jour au lendemain.
On était toujours dans la crainte. Avec cinq enfants, c’est pas une expérience à vivre. Quand ça tape à la porte, on a le cœur qui monte. On se dit « voilà ça y est ils sont là, c’est la force publique ». On ne respire presque plus, on est en apnée tout le temps.
C’était vraiment difficile. Et dans le couple ça crée des tensions.
On avait fait tous les recours, y compris le juge de l’exécution qui aurait pu nous accorder des délais. Mais l’ordre d’expulsion a été donné et le commissariat a donné le rendez vous pour fixer la date. C’était vraiment limite.
On avait aucune solution parce qu’avec cinq enfants on allait aller où ? Les enfants seraient partis dans la famille et nous on se serait débrouillés mais ça aurait été le désastre.
« On n’est pas sortis d’affaire, on est à risque »
On a finalement monté le recours DALO. Grâce à une association on a trouvé un appartement dans le parc HLM à l’été 2014. On a monté en catastrophe le dossier de surendettement pour que notre dossier soit accepté par le bailleur. C’était limite parce qu’on avait une grosse dette et le bailleur ne voulait pas prendre de risque.
La dette était au moins de 17 000 euros, soit environ un an de loyer. Elle est lourde l’addition. Mais au total on a aussi des dettes de gaz et d’électricité. C’est pour ça qu’on a fait le dossier de surendettement d’ailleurs : pour geler ces dettes pendant un temps.
Dans notre nouveau logement, le loyer est à 700 euros. On est bien ici. Je m’en fous d’avoir un jardin ou quoi. Là ça va. Il y a de la place et puis ça chauffe comme il faut. Il y a un thermostat donc on n’a pas ces factures énormes. Et j’ai trouvé un travail, donc ça s’arrange. Mais j’ai mis du temps à retrouver un boulot fixe.
Franchement, on a eu de la chance. Après cinq ans de congés maternité ma femme a aussi réussi à retravailler. Là elle vient juste de signer un CDI donc on commence à sortir la tête de l’eau. Parce qu’en 2016, on sait que les deux ans de répit de la banque de France se terminent et qu’il faudra bien qu’on paie les dettes.
« Ne plus jamais le revivre »
On n’est pas sorti d’affaire, on est à risque. On est tout le temps en prévention. Quand on a connu cette galère, on ne veut plus du tout y retourner.
Maintenant, on met tout le temps de côté, comme une roue de secours. Comme ça dès qu’il y a un problème on peut compenser, et puis déjà on se prépare pour payer les dettes en 2016.
On commence déjà à mettre de côté car il faudra bien sortir ces sous. Et puis comme c’est bientôt les fêtes de Noël on commence déjà à acheter les cadeaux.
De toute façon, il faut qu’on anticipe.
Quand on a connu l’expulsion, on fait plus attention pour ne plus jamais le revivre.
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