Comme tous les quatre ans sur TF1, débarque un sport auquel la chaîne ne s’intéresse pas le reste du temps : le rugby. C’est la Coupe du monde.
Cette année elle se tiendra du 18 septembre au 31 octobre en Angleterre. Durant un bon mois vous n’échapperez pas à Bernard Laporte et Christian Jeanpierre devant leur micro ni aux fameuses « valeurs du rugby ».
Si vous ne voyez là-dedans que des velus et baraqués tenter de désosser l’adversaire et des entraîneurs motiver leurs joueurs à grand renfort de « on est pas pédés », les valeurs du rugby vous corrigeront : il s’agit en réalité de combativité, de solidarité et de convivialité. Pour démystifier ce joli produit marketing et rigoler d’un sport incompréhensible pour beaucoup, il y a un livre : celui de la Boucherie Ovalie.
Ce petit moment de réclame appelle dès à présent une explication. Dans « Boucherie ovalie », ouvrage paru ce 27 août, il y a un petit peu de Rue89Lyon, par l’intermédiaire de notre journaliste Bertrand Enjalbal. Pour les amateurs de clichés, sachez qu’il est originaire de Toulouse où le rugby est, comme tout le monde le sait, religion d’État. Dans ce livre, il s’agit plutôt de tourner le sport en dérision. On ne saurait donc vous conseiller la lecture de ce que ses auteurs qualifient objectivement de #MeilleurLivreDuMonde.
Sous-titré du slogan du collectif, « la vie est trop courte pour comprendre le rugby alors autant en rigoler », ce livre dresse le portrait d’un sport professionnel depuis à peine vingt ans qui cultive son image de terreux aux âmes rudes mais pures, alors qu’il devient un produit à vendre.
La Boucherie Ovalie est « un groupe qui vit bien », caché derrière l’écran de son site, depuis 2009. Six ans au cours desquels ces jeunes gens (oui il y a des femmes bouchères) bénévoles et parfois même respectables dans le civil ont « mis les ingrédients » dans leur plume pour moquer, désacraliser et parfois dégonfler les égo boursouflés des « Dieux du stade », comme Sébastien Chabal bien connu par ici.
Une « équipe qu’il faut respecter » assurément donc. D’ailleurs, entre tous ces guillemets se sont glissés poncifs et éléments de langage qui rebondissent à longueur d’interviews de bord de terrain et que le collectif aime tourner en dérision.
A travers des fiches des clubs français, des équipes nationales, de figures emblématiques du rugby mais aussi des jeux, des découpages et des images pour les moins courageux, le livre use de la satire pour tenter de rapprocher le lecteur de ce sport d’initiés. Rappelez-vous que vous allez en manger pendant plus d’un mois alors ne vous trompez pas de fournisseur.
En guise d’amuse-gueule, voici comment ces sales gosses parlent des quelques clubs de la région.
« Le LOU a pour emblème un loup, confirmant ainsi la volonté de la ville de casser son image austère et d’oser le calembour. C’est en définitive aussi réussi que la métamorphose d’Alain Juppé en homme jovial et candidat du renouveau. D’ailleurs, comme le maire de Bordeaux, le club est plus que centenaire et compte même deux titres de champion en 1932 et 1933. Des titres remportés durant une période trouble marquée par la montée du fascisme, un chômage à deux chiffres et une production nationale en berne. Tout est donc réuni aujourd’hui pour le voir dominer à nouveau le rugby hexagonal. »
Le CS Bourgoin-Jallieu :
« Par la suite, le club deviendra un des « gros » du championnat grâce à son mécène, Pierre Martinet (traiteur intraitable dans le civil), à son centre de formation et à son entraîneur de génie à la joie communicative : Philippe Saint-André. Malheureusement, vendre du taboulé en boîte dégueulasse rapporte moins que des bandes dessinées, et le CSBJ doit laisser partir ses meilleurs joueurs chaque année, faute de moyens suffisants pour les conserver.
Ce sera ensuite la descente aux enfers avec une relégation sportive en Pro D2, puis une relégation administrative en Fédérale 1 en raison d’une gestion financière digne de celle de l’UMP. Remonté en seconde division depuis 2013, le CSBJ connaît toujours des problèmes avec la DNACG, qui s’accroche comme une ex-petite amie envahissante. »
Le FC Grenoble :
« Après un court passage en Fédérale 1 pour refaire le plein de valeurs en 2005- 2006, le FCG végète en Pro D2 jusqu’à la saison 2011-2012 et le titre, synonyme d’accession en Top 14. (…) Cette remontée en Top 14 éloignera Grenoble de son rival local, Bourgoin-Jallieu, relégué dans la division inférieure. Les journalistes (et la cellule Communication du club) inventent donc maintenant des « derbys des Alpes », ou des « derbys rhônalpins », mais le cœur n’y est pas.
(…) Au cours de cet autre siècle, le FCG a accueilli dans son effectif de nombreux grands joueurs tels que Jean de Gregorio, Oliver Merle, Didier Camberabero, Jamie Cudmore, mais aussi formé Vincent Clerc, Sylvain Marconnet, Olivier Brouzet, le double champion de France Pierre-Gilles Lakafia et Vincent Clerc, ainsi que Vincent Clerc. »
Mais le livre de la « Boucherie Ovalie », ce sont encore les lecteurs qui en parlent le mieux :
L’Art de se foutre de la gueule de tout le monde, sauf du lecteur. Un must. pic.twitter.com/lsz51XNDbt
— Olive M (@marcais_olive) 1 Septembre 2015
Boucherie Ovalie, la vie est trop courte pour comprendre le rugby alors autant en rigoler, Editions Solar, 29,90€, préface de Daniel Herrero. Sorti le 27 août 2017. En vente dans toutes les bonnes librairies (mais aussi chez les grands méchants vampires en ligne).
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