Mais tu vois, lecteur, sans parloir, pas de livres puisque ceux envoyés par la poste sont mis systématiquement à la fouille, et si je n’en n’avait pas je devrais me contenter des bouquin de la « bibliothèque ». Je peux te dire que je n’irais pas loin avec ça. Heureusement j’ai des proches qui me soutiennent puisqu’en gros, j’en reçois trois par semaine. Imagine un taulard que tout le monde a laissé tomber, et c’est fréquent, dans quelle misère il se trouve.
Donc, je n’ai pas encore lu ce livre, mais son interview me semble d’ores et déjà éclairant. Et je vais en parler ici car l’ennui, avec ce genre de livre, c’est que la personne lambda ne va pas l’acheter, ce n’est pas du Trierweiler et du secret d’alcôve. Et les abonnés de Médiapart sont loin d’être légion.
L’effet dissuasif de la prison ne fonctionne pas
L’effet dissuasif de la prison ne fonctionne pas dit Didier Fassin. Ce n’est pas le scoop du siècle, je te l’accorde, lecteur, mais il est bon de le rappeler à ceux qui croit que la punition ça marche.
Et immédiatement il parle du taux de suicide le plus élevé de tous les pays occidentaux (trois en une semaine rien que sur la taule de Nantes dernièrement), de l’inflation carcérale, à savoir le doublement de la population carcérale depuis 10 ans alors que le nombre de crimes, qui ne représente que 2 % de cette population, est le plus bas en France par rapport à tous les pays européens et continue à baisser.
Je le répète encore une fois, inlassablement, 98 % de la population carcérale est en taule pour des délits mineurs.
Il ajoute que la prison non seulement ne dissuade pas, mais est carrément contre productive car, je cite :
« L’ultime vérité de la condition carcérale réside en ceci que la prison est un lieu vide de sens et que ceux qui y sont enfermés font progressivement et indéfiniment l’expérience de cette vacuité ».
C’est joliment dit et surtout fondamentalement vrai. Et je peux t’assurer, lecteur, qu’il ne parle pas de la vacuité Bouddhique, chemin du Nirvana.
Pour faire court, il dit clairement que la prison ça ne marche pas. Les deux missions qui sont officiellement celles de la pénitentiaire sont inexorablement ratées, et ceci depuis le début de l’existence de la prison.
- La prison ne protège pas la société puisque, lorsque les gars ressortent comme des loups.
- En aucun cas, la prison réinsère ceux qu’elle a exclus puisque la récidive est aux alentours des 60 %.
En durcissant les peines, en refusant les aménagements, en développant un système sécuritaire, on aboutit au contraire du but fixé. Incroyable non ? Et les tenants du tout répressif veulent plus de ce qui ne marche pas pour que ça marche mieux !
Regarder les taules en face
Loin de moi l’idée de défendre Christiane Taubira, mais on voit bien la manipulation que font ces gens du tout carcéral en la taxant de laxiste, alors qu’en vérité, excepté la suppression des peines planchers, absurdes par essence, on sait qu’elle est dans la même lignée que ses prédécesseurs. Ses pataquès autour de sa conférence de consensus n’ont été que de la façade publicitaire, du ramdam pour satisfaire son ego. La montagne a accouché d’une souris.
Certains de ceux qui lui tombent sur le dos sont des imbéciles notoires, c’est connu, mais les autres sont parfaitement conscients de ce constat de ratage. Alors ça pose une grave question : qu’est ce qui les animent, en vérité ? Pourquoi veulent-ils à tout crins maintenir et renforcer une erreur manifeste et néfaste? C’est bizarre quand même, non ?
On peut en avoir le pressentiment quand Didier Fassin dit, très bien, que la prison n’est que le reflet de la société. Autrement dit, si les citoyens veulent se faire une idée de la société dans laquelle ils vivent, ils n’ont qu’a regarder en face leurs taules et ils auront la réponse.
C’est certainement la raison essentielle pour laquelle les gens de pouvoir, les politiques et tutti quanti font tout ce qu’ils peuvent afin que rien ne sorte des taules, que le black-out soit le plus hermétique possible et qu’ils nous enfument régulièrement avec leurs bons sentiments poisseux fondés sur la peur et la culpabilité et les activités culturelles bidons.
La prison : pour maintenir l’opinion publique dans la peur
Non, je ne parle pas de complot, lecteur, mais d’idéologie !
Allez je te donne une piste de réflexion, si tu veux t’en saisir : Pourquoi, aujourd’hui, le CDI devient exception et qu’en contre-partie le CDD se transforme en norme ? En CDD, les gens sont en permanence préoccupés par la nécessité qu’ils ont de retrouver rapidement un autre contrat, ils n’ont plus la disponibilité d’esprit pour s’intéresser aux frasques et autres détournements des élus, aux licenciements massifs, aux débats creux que diffuse la télé, bref à leur rôle de citoyen. Ils deviennent de gentils moutons qui sont prêt a fermer leur gueule pour bosser et donc ne même pas penser à se révolter. Les raisons économiques invoquées pour justifier les CDD sont évidemment très secondaires et permettent seulement à ceux qui sont dans les clous, les chefs d’entreprise, de gagner un peu plus de pognon, ce qui n’est pas négligeable pour leur motivation.
Hé bien il y a quelque chose de ça avec la prison pour maintenir l’opinion publique à la fois dans la peur de l’insécurité et dans la crainte d’être un jour puni eux mêmes pour occulter la vacuité des taules.
Le thème de la sécurité est le cache misère des politiques qui veulent dissimuler leurs ratages monstrueux dans les tous autres domaines. « Je vous protège, ne vous occupez pas du reste ». Sans parler du bénéfice secondaire qui consiste à assouvir leur soif inextinguible de pouvoir, là aussi dissimulée sous leurs discours grandiloquents de dévouement pour les autres. Quand va-t-on leur signifier la fin de la récré ?
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