280 élus écologistes et une vingtaine de collaborateurs faisaient étape à Grenoble trois jours durant, du 3 au 6 février. Et comme dans tout bon festival, il y avait le In et le Off. Organiser d’un côté une « mobilisation historique » pour la Cop21, débattre de la réforme territoriale et des prochaines échéances électorales et, de l’autre, prendre le temps d’observer la « divine surprise des municipales » de ses propres yeux et se familiariser avec « (leurs) plus grande ville de France ».
Pour accueillir ces journées annuelles de formation, la ville avait l’avantage du cas d’étude pour Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’EELV :
« Grenoble nous montre ce dont sont capables les écologistes à la tête d’une grande collectivité et comment ils fonctionnent dans leur exécutif : leurs méthodes, leurs débats. Et leurs difficultés ».
Mailler silencieusement le territoire
C’est dans ces congrès qu’Emmanuelle Cosse et Eric Piolle fourbissaient encore récemment leurs connaissances de la mécanique politique, eux qui ont en commun d’avoir décroché leur premier mandat politique aux régionales de 2010.
À chaque scrutin, d’autres élus viennent compléter les strapontins clairsemés. Catherine Hervieu, présidente de la fédération des élus verts et écologistes, tient les comptes.
« Nous avons 34 parlementaires nationaux et européens, 60 conseillers généraux, 260 conseillers régionaux, 1500 élus municipaux, dont 380 adjoints et 113 maires. 10 dans des villes de plus de 10.000 habitants. Contrairement à l’exposition médiatique de Grenoble, quelque chose de très silencieux est en train de se produire. Nous maillons tout le territoire ».
Voyage initiatique et live-tweet
De la conquête du pouvoir d’hier, jusqu’à son exercice aujourd’hui, les élus écolos de tout l’hexagone observent « avec bienveillance » ce qui se fait dans la ville. Comme les jeunes écolos en novembre, certains n’ont pas attendu cette formation pour effectuer leur voyage initiatique en terre promise iséroise.
C’est le cas d’Elen Debost, adjointe au maire du Mans, qui est déjà venue passer quelques jours en octobre :
« Pour l’ensemble de la famille écolo, Grenoble est un laboratoire ».
Emanuelle Cosse, la chef du parti, confie suivre régulièrement le live-tweet et la retransmission des conseils municipaux, en direct sur internet depuis l’arrivée de la nouvelle majorité.
Ni la suppression d’espaces publicitaires de la voie publique, ni le chantier des cultures engagés par Eric Piolle et son équipe n’ont échappé à un élu breton.
« Aucune tête ne devait dépasser »
Pour leurs 30 ans, les Verts se sont donc offert la plus grande ville de leur histoire politique. Si bien que certains pensent avoir trouvé la recette du gâteau pour le cuisiner à nouveau. Thierry Brochot, président du Conseil fédéral d’EELV liste les ingrédients :
« C’est le résultat d’un travail militant de 20 ans et d’une préparation de l’élection deux ans avant le scrutin pour constituer un projet rassembleur. Aucune tête ne devait dépasser par ambition personnelle. C’est ensuite le collectif qui a désigné Eric Piolle, qui avait le profil pour les représenter. »
Ce cadre du parti qui ne s’attendait pas à la conquête de la capitale iséroise à la barbe des socialistes sortants ajoute cependant :
« Mais nous devons rester lucides. Tout n’est pas transposable dans l’immédiat à d’autres endroits ou à d’autres échelles. Grenoble, c’est surtout une grosse leçon d’humilité. »
Pour les élections départementales de mars prochain en Isère, les écolos et leurs alliés se rêvent à reproduire l’exploit des municipales en réchauffant les plats. Même recette, mêmes composantes, même stratégie et même graphisme de campagne.
Pierre Meriaux, conseiller municipal écolo à Grenoble et conseiller régional Rhône-Alpes paraphrase Karl Marx :
« L’histoire ne se répète pas, au mieux elle bégaie. On ne peut pas faire du copier-coller de ce qui s’est fait à Grenoble pour garantir la victoire. Ca ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’inspirer de nos bons principes : la co-construction sur le long-terme et ne pas rentrer dans une démarche de cartellisation d’appareils politiques qui dégoute les citoyens. Renouveler la politique, c’est changer ses pratiques ».
Alliance EELV/PG : un test grandeur nature
À Grenoble où les écolos partagent le pouvoir avec le Parti de gauche et des citoyens engagés, la ville a pourtant valeur de test grandeur nature pour les Verts qui se déchirent sur la question des alliances.
Jean-Luc Mélenchon (PG), Pierre Laurent (PCF), Cécile Duflot, Emmanuelle Cosse, mais aussi EELV en tant qu’organisation figurent parmi les premiers signataires, fin janvier, de la tribune « Chantiers d’espoir », une plateforme destinée à définir les convergences entre le Front de gauche et les écolos.
Début de la rencontre #FDG–#EELV. pic.twitter.com/vALQOmwXDx
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 3 Février 2015
Quand – porté par la victoire grecque de Syriza – Jean-Luc Mélenchon veut faire de Grenoble le « vaisseau amiral » de cette recomposition de la gauche dans l’optique des présidentielles de 2017, Thierry Brochot, président du Conseil fédéral d’EELV s’agace de cette précipitation :
« Jean-Luc Mélenchon a le sens du raccourci. Mais nous sommes trop imprégnés de notre réponsabilité vis à vis des électeurs et de la planête pour nous satisfaire de ses réponses toutes faites ».
Emanuelle Cosse, moins impatiente, conclue en rappelant l’organisation fédérale d’EELV :
« Des rassemblements de ce type vont se multiplier et perdurer, notamment pour les élections départementales, mais nous avons aussi des alliances avec les socialistes sur d’autres territoires. On ne prendrait pas les choses dans le bon sens en partant de la structure alors que c’est à partir du projet qu’il faut bâtir la politique ».
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