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« GPA, prostitution » : le mot d’ordre lyonnais de la Marche des Fiertés fait des vagues

Pas de GPA, pas de prostitution… Mais allez à la Marche

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Marche des Fiertés LGBT à Lyon, juin 2012. Crédit : Hétéroclite.

Plusieurs associations féministes et/ou lesbiennes ainsi que des partis politiques de gauche s’opposent au mot d’ordre de la dix-neuvième Marche des Fiertés de Lyon. En cause : des divergences sur les questions épineuses de la prostitution et de la gestation pour autrui.

Marche des Fiertés LGBT à Lyon, juin 2012. Crédit : Hétéroclite.
Marche des Fiertés LGBT à Lyon, juin 2012. Crédit : Hétéroclite.

«Droit des trans, PMA, IVG, GPA, prostitution : nos corps, nos choix !». En choisissant un tel mot d’ordre pour la 19e Marche des Fiertés LGBT de Lyon (qui se déroulera samedi 14 juin), les membres de la Lesbian and Gay Pride (LGP) de Lyon se doutaient qu’ils ne feraient pas que des heureux.

Car si la défense des droits des personnes trans et de l’avortement ou la demande d’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes célibataires ou lesbiennes font consensus parmi les associations LGBT et féministes, il n’en va pas de même dès que l’on aborde les thèmes beaucoup plus clivants de la prostitution et de la gestation pour autrui (GPA).

Dans le livret qu’elle a édité pour la Quinzaine des Cultures LGBT, la LGP qualifie d’«inapplicable et dangereuse» la proposition de loi « renforçant la lutte contre le système prostitutionnel » et demande l’ouverture d’un débat sur la gestation pour autrui.

Deux prises de position qui ont suscité la colère de la section rhodanienne d’Osez le féminisme ! (OLF69), l’association féministe proche du Parti socialiste, qui soutient la proposition de loi sur la prostitution et qui voit dans la GPA « une instrumentalisation des femmes concernées, réduites à leurs organes reproductifs ». Le 3 juin, elle a donc publié un communiqué pour se désolidariser de la Marche du 14 juin.

 

Parmi les signataires, on trouve à la fois des associations féministes abolitionnistes, des collectifs lesbiens (les Toulousaines de Bagdam, les Marseillaises du Centre Lilith, les Strasbourgeoises de La Lune, CQFD Fierté lesbienne ou la Coordination lesbienne en France – qui a récemment claqué la porte de l’Inter-LGBT pour les mêmes raisons) et des mouvements politiques à la gauche du PS (le Parti de gauche, le Mouvement des Jeunes Communistes de France, l’Union des Étudiants Communistes).

Le lendemain, c’est au tour du Parti communiste français (qui n’est pas en tant que tel signataire de l’appel d’OLF) de s’exprimer par la voix de sa secrétaire fédérale dans le Rhône, Danielle Lebail, qui explique que :

« Les communistes du Rhône refusent cette année de partager le mot d’ordre de la Lesbian & Gay Pride de Lyon » et juge « dangereux de faire l’amalgame entre les luttes contres les homophobies et la GPA et la prostitution, qui entrent dans le système marchand capitaliste ».

Enfin, le Parti socialiste s’est lui aussi désolidarisé de ce mot d’ordre. Dans un courrier (qu’il a rendu public) adressé à Edwige Marty (la présidente de la LGP), David Kimelfeld, premier fédéral du Rhône, regrette à la fois le mot d’ordre («dont la multiplicité de revendications ne facilite pas l’adhésion du plus grand nombre») et le ton employé dans le livret de la Quinzaine des Cultures LGBT, qui juge avec sévérité les « reniements » du gouvernement sur la PMA ou les droits des trans (deux thématiques sur lesquelles François Hollande avait pris des engagements durant la campagne présidentielle qui n’ont pas été tenus).

Le Parti communiste et le Parti socialiste précisent néanmoins qu’en dépit de ces désaccords, ils appellent leurs militants et sympathisants à se joindre à la Marche, « car ils restent solidaires de cette initiative et de sa philosophie initiale », selon les mots de David Kimelfeld.

 

Des abolitionnistes traditionnels

En soi, le communiqué de presse d’Osez le féminisme ! n’a rien de surprenant. L’association défend depuis sa création en 2009 l’ »abolition » de la prostitution et s’oppose à la légalisation de la GPA, « deux des pires produits des systèmes patriarcal et capitaliste ».

En novembre dernier, elle avait déjà quitté le conseil d’administration de la Lesbian and Gay Pride de Lyon lorsque cette dernière avait lancé une campagne pour dénoncer la proposition de loi visant à pénaliser les clients des travailleurs du sexe.

Rien d’étonnant non plus dans la réaction des différentes composantes du Front de gauche, où, en matière de prostitution, l’abolitionnisme est la règle, tant au Parti communiste français qu’au Parti de gauche. Les deux-tiers des députés du groupe Gauche démocrate et républicaine (qui rassemble les élus du Front de gauche et d’autres partis de gauche ultra-marins) ont ainsi voté en faveur de la proposition de loi visant à pénaliser les clients du travailleurs du sexe le 4 décembre dernier (deux se sont abstenus, aucun n’a voté contre).

 

Le soutien collant de la Manif pour tous 

Mais toutes ces contestations ne pouvaient que réjouir La Manif pour tous (LMPT), qui a décidé de s’en mêler en venant ajouter son grain de sel (et jeter incidemment de l’huile sur le feu) : le collectif En Marche Pour l’Enfance, l’une des principales composantes lyonnaises de LMPT, a publié lui aussi le 4 juin un communiqué de presse qualifiant sans surprise la Marche des Fiertés de «mascarade» «menée par une minorité ultra radicale qui visiblement ne représente plus qu’elle-même».

« Nous pouvons tous être unis pour nous opposer aux discriminations liées à l’orientation sexuelle », écrit ainsi le collectif qui, récemment encore, voyait pourtant dans la lutte contre l’homophobie un faux-nez de « l’idéologie du gender« .

« Mais la promotion des mères porteuses relève d’une toute autre logique : celle du trafic de filiation et celle de l’instrumentalisation du corps de la femme », poursuit-il de façon beaucoup plus attendue.

Avant d’apporter à OLF69 un soutien dont l’association se serait probablement bien passée :

« Il doit falloir du courage et de la liberté pour aller ainsi à contre-courant ! […] Si beaucoup de points semblent nous opposer, nous nous rejoignons sur le rejet de la marchandisation du corps humain sur lequel hétéro, gay ou lesb [sic] peuvent se retrouver ».

 

Les mots d’ordre à Lyon et leurs remous

Ce n’est pas la première fois qu’un mot d’ordre de la Marche des Fiertés LGBT déclenche une controverse et des débats houleux. Celui choisi en 2009 («respectons la transidentité, refusons la transphobie !») avait suscité la colère et l’incompréhension d’une partie des commerçants LGBT lyonnais, qui ne le jugeaient pas assez fédérateur.

Cela n’avait pas empêché la Marche des Fiertés LGBT de rassembler autant de personnes que d’habitude dans les rues de Lyon. Il semble donc peu probable que cette polémique ait beaucoup d’impact sur la fréquentation de la Marche cette année.

 

Par Romain Vallet, sur heteroclite.org.


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