Puit de forage à Mansfield, en octobre 2013. ©François Damerval
L’invitation du Forum européen de l’énergie pour une visite à Washington est arrivée dans la boîte mail de ma députée, comme tant d’autres auxquelles nous ne prêtons guère attention, et pourtant, celle-ci a attiré mon attention à plusieurs titres…
D’abord parce qu’elle est intervenue dans une période particulière : nous étions en train de travailler sur la directive agrocarburants avec des lobbyistes (l’industrie des agrodiesels, agroéthanols et des agrocarburants avancés), mais aussi les ONG de développement et de protection de l’environnement.
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51 députés « épaulés » par les energéticiens
La puissance invitante européenne est le Forum européen de l’énergie avec les membres associés Foratom, Westinghouse et Shell, qu’il n’est pas besoin de présenter. Attardons-nous sur le Forum européen de l’énergie.
Il était l’organisateur du déplacement à Singapour et en Malaisie en partenariat avec Neste Oil et auparavant sur les sables bitumineux au Canada, pendant la négociation sur l’accord de libre échange.
Il regroupe 51 députés du Parlement européen qui siègent au sein des commissions Envi et Itre principalement. Il travaille sur toutes les questions énergétiques mais est trusté par les énergéticiens.
Quelques députés travaillent sur les renouvelables, Corinne Lepage en fait partie aux côtés de Fiona Hall (GB) et Jo Leinen (DE). Néanmoins, le nucléaire, et notamment les acteurs américains, sont très influents au sein de ce club et insistent régulièrement sur une relance du nucléaire, en Europe et dans le monde.
Ne pas laisser le champ libre à cette initiative
Alors cette invitation a fini dans le parapheur avec une mention « programme intéressant mais inenvisageable ». Le parapheur est resté deux jours sur le bureau et au moment de faire le tour de l’agenda, nous avons pris le temps de parler.
Ainsi, le programme prévisionnel prévoit la visite d’un site d’exploitation de gaz de schiste par Shell à Wiliamsport, la visite d’une centrale nucléaire à Charlotte, une rencontre avec les membres du Congres et un briefing à la Maison Blanche, du 27 au 31 octobre 2013.
Le traumatisme malaisien était toujours là et nous sommes en pleine négociation sur l’accord de libre échange. Il ne faut pas laisser le champ libre à ce type d’initiative car il suffit d’un député par groupe faisant le travail et des majorités se font et se défont au Parlement européen.
Nous avons donc décidé que le bureau serait représenté si et seulement si les organisateurs acceptent la place pour un assistant parlementaire, que l’intégralité des frais (hôtels et transports) ne soit pas couverte par les entreprises invitantes en dehors des considérations logistiques sur place (correspondances,…) ET que le récit de ce déplacement fasse l’objet d’une communication (ce qui est chose faite avec ce texte).
L’assistant parlementaire de Corinne Lepage, François Damerval, s’est rendu à Mansfield, la capitale américaine des gaz de schiste. Une visite organisée et millimétrée par les lobbies du secteur. Un voyage où les questions qui fâchent sont exclues. Et où l’on apprend à argumenter en vue de la procédure législative européenne sur le sujet.
Un récit à lire sur Rue 89
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