Crédit photo : Mickaël Draï
GO Pub s’est donc penché sur le diagnostic et la mise en place de la TLPE (taxe locale sur la publicité extérieure) au sein de l’espace public. Depuis janvier 2009, cette taxe, censée réduire l’accumulation des panneaux de pub et lutter contre la pollution visuelle, doit être payée par les exploitants du dispositif, les incitant à limiter leur surface publicitaire. Un dispositif qui est doublé d’une taxe locale, proportionnelle à l’importance des enseignes, votée en conseil municipal fin juin 2011 et mise en application depuis le 1er janvier dernier.
60 panneaux illégaux
Mais si l’APIE tient aujourd’hui pour acquis qu’environ 60 panneaux de publicité 4×3 ont été recensés comme illégaux sur la commune, elle souhaite depuis plusieurs mois pouvoir avoir accès au rapport GO Pub. Un document qui permettrait à l’association de porter plainte contre les commanditaires des dispositifs concernés. Mais la mairie n’a à ce jour toujours pas accédé à la requête. Une attitude qui énerve Christopher Thornton, bénévole au sein de l’association :
« Il n’y a aucune raison que le public ne puisse consulter les résultats d’une étude réalisée avec des fonds publics. En matière d’écologie, la convention d’Aarhus de 1998 institue l’accès à l’information pour le public, et donc à ce rapport d’inspection. Mais devant les refus répétés de la mairie nous avons saisi la CADA (Commission d’Accès aux Documents Administratifs), en juin, qui a expliqué que le document était « communicable à toute personne qui en fait le demande » ».
Une « victoire » dont s’est très vite réjoui l’APIE. Pourtant, n’ayant toujours pas eu de réponse, l’association envisage un recours en justice pour se faire enfin remettre une copie du rapport :
« C’est malheureux de traiter ça par le juridique, sachant que la mairie va devoir finir par donner une copie du document. En plus elle se ridiculise en se faisait condamner par une décision administrative, et par sa non-transparence. »
Une « version épurée » du rapport
Mais de son côté la ville de Bourgoin a une toute autre version de l’histoire. Christian Maronne, responsable du service communication, assure qu’une « réflexion en matière de présence de panneaux publicitaires dans l’espace public » est en cours :
« On n’a pas attendu pour agir. C’est une préoccupation réelle des élus, et notamment d’Yves Montanier, le conseiller municipal délégué à l’embellissement de la ville. Mais concernant la diffusion du rapport, comme il comprend certaines annotations individuelles concernant des particuliers, la Ville à considéré qu’elle n’a pas à transmettre des informations aussi précises (en se rattachant à l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978 relatif au « comportement d’une personne (pouvant) lui porter préjudice »). C’est pourquoi nous allons leur faire parvenir une version épurée des remarques ».
Un signe d’ouverture très limité pour l’APIE qui refuse l’idée de « cacher les coupables qui sont dans l’illégalité ».
Pourtant, pour la municipalité qui se dit « soucieuse de ne pas laisser la pub s’installer de façon anarchique », la démarche de fond est engagée depuis « la vérification juridique », c’est à dire depuis l’obtention des résultats du rapport de GO Pub. Mais elle « ne peut pas agir plus vite » estime Christian Marrone, pour qui le travail ne doit pas se faire dans la précipitation :
« Nous sommes en pleine phase d’informations auprès des annonceurs : un courrier a été adressé à 1700 entreprises de Bourgoin en février. On leur laisse du temps pour les inciter à réduire ou à adapter d’eux-mêmes les espaces publicitaires non-conformes. Environ 80 dispositifs ne sont pas réglementaires, mais certains y remédient déjà. Et nous engagerons une médiation directe avec ceux qui ne l’aurons pas fait, voire si nécessaire une action en justice. »
Bourgoin trop « laxiste » ?
Si l’APIE insiste autant pour récupérer les conclusions du rapport GO Pub, c’est qu’elle souhaiterait « vérifier comment l’évaluation de la légalité ou non des panneaux a été faite ». Car selon ses estimations, il y aurait « bien plus que 60 panneaux 4×3 illégaux sur la commune, sans parler des panneaux plus petits ». L’APIE dénonce « un certain laxisme » de la municipalité :
« La mairie nous a informés qu’elle n’applique pas plusieurs dispositions de son propre règlement local de la publicité : interdiction de panneaux à moins de 10m d’un panneau de signalisation routière, obligation d’une distance d’au moins 100m entre les panneaux. »
Pour l’association, le rapport commandé pourrait ainsi être biaisé par les recommandations et les partis pris aléatoires de la municipalité :
« Si ce sont de telles consignes qui ont été données au cabinet GO Pub, pas surprenant qu’ils aient trouvé « seulement » 20% de panneaux 4×3 illégaux sur la commune. »
L’APIE, qui a par ailleurs déposé un recours au tribunal administratif de Lyon en juin dernier pour l’enlèvement de six panneaux illégaux, souhaiterait de la mairie qu’elle prenne un arrêté définitif pour faire enlever l’intégralité des dispositifs non-règlementaires. Christopher Thornton reste toutefois sceptique :
« On sait que l’adjoint à l’embellissement de la Ville est conscient que c’est moche comme tout, mais il se heurte à plusieurs problèmes. D’abord politiques puisqu’il se mettrait à dos les annonceurs et les publicitaires. Puis économiques, car les propriétaires de zones d’affichages touchent de l’argent pour recevoir de la publicité et demandent des subventions en contrepartie s’ils doivent y renoncer. »
La mairie, elle, assure « faire le nécessaire », dans le dialogue.
« L’entrée de Bourgoin ressemble de plus en plus à une zone commerciale »
Dernière incertitude qui tracasse l’APIE : la prise en compte des enjeux esthétiques dans l’élaboration en cours du futur plan local d’urbanisme (PLU) de Bourgoin-Jallieu :
« On aimerait que la problématique des espaces publicitaires fasse partie intégrante du projet urbain à venir, pour éviter de tout faire deux fois. Avec l’entrée de la ville qui ressemble de plus en plus à une zone commerciale, il faut être vigilant à ce que les enseignes publicitaires ne s’y développent pas par un phénomène d’accoutumance. C’est une bataille sociale car cette incitation permanente à la consommation rend les gens malheureux. »
Christian Maronne est quant à lui formel :
« La phase de diagnostic du PLU est terminée et englobe tous les enjeux futurs en termes de publicité dans l’espace public. »
Le nouveau PLU sera d’ailleurs présenté et débattu en conseil municipal autour du 5 novembre prochain. Entre temps, un rendez-vous « prévu de longue date » entre Yves Montanier et les représentants de l’APIE aura lieu le 14 septembre. L’occasion sûrement de confronter deux visions différentes de la préservation de l’environnement sur la commune.
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