Nouveau coup d’éclat du Bloc identitaire. Le groupuscule d’extrême droite voudrait faire déprogrammer le concert du chanteur Kéry James programmé le 15 décembre prochain au théâtre Théo-Argence, à Saint-Priest. Il lui reproche « un dénigrement systématique de la France et des Européens » ainsi que des « paroles à la limite de l’incitation à la haine ».
C’est notamment dans sa chanson « Lettre à la République » tirée de son nouvel album, 92.2012, que Kéry James serait spécialement dangereux selon le Bloc identitaire.
Depuis le 4 juillet, le site internet de ce regroupement de nationalistes et d’identitaires en appelle à la mobilisation de tous les lyonnais et rhonalpins qui « n’apprécient pas de se faire ainsi cracher dessus par un artiste en mal de reconnaissance » :
« Tous à vos téléphones et claviers pour dissuader la ville de Saint-Priest et son théâtre Théo Argence de programmer en décembre 2012 le rappeur Kery James qui nous crache dessus dans ses « chansons » déplacées. Vous avez six mois pour envahir l’espace de leurs répondeurs et boites mail. »
Le mouvement politique, comme il se définit, cite deux extraits du titre « Lettre à la République » pour justifier son action et tenter d’obtenir la déprogrammation du rappeur, né en Guadeloupe :
« Tous ces racistes à la tolérance hypocrite/ qui ont bâti leur nation sur le sang » et « Que personne ne s’étonne si demain ça finit par péter. Comment aimer un pays qui refuse de nous respecter. »
Des paroles jugées comme un « véritable appel à la haine » selon le mouvement politique, tel qu’il se définit.

De son côté, la municipalité de Saint-Priest exclut, selon Le Progrès, d’annuler la venue de Kery James, malgré la réception de cinq courriels de protestation :
« Le Bloc identitaire n’est pas invité à définir la programmation d’un espace de liberté et de création comme le théâtre Théo-Argence. Vouloir imposer à tous une culture unique et maîtriser la création est un vieux rêve de l’extrême droite. »
La mairie de Saint-Priest qui concède « ne pas partager certains propos pour ce texte précis », reconnaît tout de même au rappeur le droit de s’exprimer « au nom de la liberté d’expression dès lors qu’ils (les propos, ndlr) n’appellent pas à la haine, à la violence, à une quelconque forme de rejet. »
Elle précise également que le même phénomène se produit à chaque représentation de l’artiste.
En effet, la programmation du rappeur à la MC2 (Maison de la culture) de Grenoble, les 15 et 16 mai derniers avait fait l’objet d’une même campagne de protestation de la part du Bloc identitaire. La venue de l’auteur de la chanson « Lettre à la République » avait fait dire à Fabrice Robert, président du mouvement d’extrême-droite :
« On en a assez des rappeurs qui crachent sur la France. Si Kery James n’est pas satisfait, qu’il aille vivre en terre musulmane. »
Ces déclarations et les protestations n’avaient à l’époque pas empêché la tenue du concert.
Mais elles ont parfois déjà abouti. En février 2007, le Nice Rap Contest, un événement regroupant des artistes tels que 113, Sinik ou Sefyu, organisé à Nice, avait été annulé sous les pressions de Nissa Rebella, un groupe d’extrême droite lié aux Jeunesses Identitaires.

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