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La grande expo au MAC : un Robert Combas qui lasse…

À travers plus de 600 œuvres, le Musée d’art contemporain remet sous les feux de la rampe le peintre de la Figuration libre, un peu oublié, Robert Combas. Malgré son indéniable talent et sa puissance d’imagerie, sa peinture nous laisse indifférent sur le plan plastique et émotionnel.

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Nous sommes en province en 2005, le pouvoir d’attraction de prêteurs d’œuvres et le budget du Musée d’art contemporain (MAC) ne sont pas illimités. Avec les moyens du bord, le MAC a alors la bonne idée d’organiser une exposition Warhol dévoilant une face méconnue de l’artiste, son « œuvre ultime ». L’événement est intéressant et réussi et, mieux encore, le public s’y précipite (autour de 150 000 visiteurs). À l’époque déjà, conservateurs et pouvoirs publics ont les yeux rivés sur les chiffres de fréquentation des lieux culturels. La belle et astucieuse exposition de la Pop star Warhol se retourne alors en obligation un peu cauchemardesque : réitérer régulièrement ce genre d’événement «blockbuster». D’où les rétrospectives Keith Haring (sympathique), Ben (vide) et, aujourd’hui, Robert Combas. Soit un artiste relativement facile d’accès et connu, soutenu par une bonne campagne de communication. En plus, l’artiste a eu la bonne idée de naître à Lyon et d’y rester quatre ans, même s’il reste beaucoup plus rattaché à la ville de Sète où, avec quelques autres (Hervé Di Rosa, François Boisrond….), il forma le turbulent groupe de la Figuration libre au début des années 1980.

 

Brillant

À une époque où la terreur moderniste, le refoulement de la peinture et des mouvements aussi arides que Support-Surface règnent, les trublions de la Figuration libre ont dû apporter une bonne bouffée d’air frais ! Sexe, drogue et rock’n’roll : l’art renoue ses liens ancestraux avec la culture populaire, en l’occurrence ici avec le cinéma, la bande-dessinée, le graff, l’humour et la provocation… De l’autre côté de l’Atlantique, Keith Haring, Julian Schnabel, David Salle, Jean-Michel Basquiat déversent aussi sur les toiles énergie, rage et vivante spontanéité. Pour des raisons peut-être stratégiques et commerciales, mais aussi, soyons honnêtes, pour des raisons purement artistiques, les «Américains» voleront rapidement la vedette à nos vaillants «Français». L’histoire de l’art et le marché perdent leur trace à la fin des années 1980 et Robert Combas, en particulier, ne réussira jamais vraiment à «percer» au-delà de l’hexagone où l’on finit aussi par l’oublier. L’artiste est pourtant bardé de qualités : dessinateur virtuose, créateur prolifique, coloriste doué, Combas est aussi capable de sculpter, d’improviser des performances picturales, de peindre sur des photographies, de recycler des dessins, d’aborder tous les genres, des scènes de batailles ou religieuses aux portraits, nus, paysages, natures mortes…

 

Bruyant

La rétrospective du Musée d’art contemporain, au parcours chronologique et thématique, se propose de montrer toutes les facettes virtuoses de l’artiste, et ce à travers une scénographie réussie. Reste un problème de taille : rien au fond ne ressemble plus à un Combas qu’un autre Combas et en découvrir 600 d’affilé donne la nausée. Très vite dans sa carrière, Robert Combas adopte ses fameuses compositions labyrinthiques, fourmillant de scènes et de personnages à différentes échelles, entortillés les uns dans les autres ; avec ici et là quelques variations superficielles, comme l’utilisation de coulures par exemple.

 

L’imagier génial est aussi et surtout un artiste qui nous touche ou nous émeut rarement, et dont l’œuvre paraît dénuée d’enjeux sociétaux, formels, philosophiques actuels. Bref, on est davantage du côté de l’illustration et de l’imagerie que de la création, de la rencontre avec de nouveaux affects, perceptions, idées. L’exposition lasse vite et notre un ennui n’est trompé que par quelques exceptions : les débuts de l’artiste, une grande toile plus récente représentant un autiste perdu au milieu d’une jungle, la chute de quelques anges sur fond blanc, les deux petites salles consacrées respectivement aux dessins érotiques et aux représentations de «têtes de mort». Tous ceux qui ont quelque respect pour l’art musical éviteront le troisième étage consacré aux rapports étroits de Combas avec la musique pop-rock. L’artiste et son nouveau groupe les Sans Pattes y présentent notamment des clips aux chansons impitoyables pour les organes auditifs.

Par Jean-Emmanuel Denave

 


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