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Nouvelle grève des enseignants à Lyon : « On n’est pas là pour les salaires, on est là pour les élèves »

Après la mobilisation de février, plusieurs syndicats de l’Éducation nationale ont appelé mardi 2 avril à une nouvelle grève nationale des enseignants. À Lyon, plusieurs centaines d’entre eux ont manifesté au départ de la Place Guichard pour s’opposer, principalement, à la mise en place des groupes de niveaux. Reportage.

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Après la mobilisation (massive) début février, plusieurs centaines d'enseignant.es et personnels éducatifs ont défilé une nouvelle fois depuis la place Guichard (Lyon 3e) ce mardi 2 avril
Après la mobilisation (massive) début février, plusieurs centaines d’enseignant.es et personnels éducatifs ont défilé une nouvelle fois depuis la place Guichard (Lyon 3e) ce mardi 2 avril

« Non au tri social ». C’est le mot d’ordre qui a résonné dans les rues de Lyon ce mardi 2 avril. Après la mobilisation (massive) début février, plusieurs centaines d’enseignant.es et personnels éducatifs ont défilé une nouvelle fois depuis la place Guichard (Lyon 3e) guidés par les syndicats éducatifs (FFSU, CGT Educ’action, FNEC FP-FO, SUD éducation, Unsa Éducation).

Si les revendications sont multiples, c’est surtout le rejet des « groupes de niveaux » qui s’est fait entendre dans les rangs des grévistes. lls et elles dénoncent une réforme qui renforcerait la ségrégation scolaire au détriment d’une diversité qu’ils estiment bénéfique pour les élèves.

Les groupes de niveaux : principale raison de la grève des enseignants à Lyon

« On n’est pas là pour les salaires, on est là pour les élèves », lâche Sophie, professeure de français depuis 25 ans. Pancarte nouée autour du cou, elle fait savoir les raisons qu’il l’ont poussée à entrer en grève au coté des enseignant.es du collège Gisèle Halimi (Lyon 7e).

« On a l’impression d’une dégradation constante du système éducatif. Je ne suis pas devenue professeure pour trier mes élèves. Au début de la mobilisation, certains hésitaient à se mettre en grève, c’était un peu flou. Aujourd’hui, c’est plus le cas », confie t-elle, estimant le taux de grévistes à 90% dans son établissement.

Comme les autres professeur.es dans le cortège, sa principale préoccupation réside dans les « groupes de niveaux ». En décembre 2023, Gabriel Attal, Premier ministre, avait annoncé leur mise en place en français et en mathématiques au collège.

« On ne peut pas trier nos élèves à 10 ans. Ce n’est pas juste un problème social, cela va accentuer les inégalités. Les élèves les plus faibles ont souvent des situations familiales compliquées. On sait que ça ne fonctionne pas pour eux, ni pour les autres », tacle-t-elle, rappelant que cette réforme avait déjà été plusieurs fois « critiquée par des sociologues et des enseignant.es ».

Sur la place Guichard, avant le départ de la manifestation, les discussions tournent invariablement autour de ces « groupes de niveaux ». Les manifestant.es, qu’ils ou elles soient enseignant.es, AED, parents d’élèves, craignent que cette réforme impacte la santé psychologique des élèves.

« Il y aura une pression plus grande sur les enfants, avec une ambiance de compétition encore plus présente. L’apprentissage sous le stress et la peur, ça ne marche pas et notre gouvernement le sait très bien. Ils font passer cette réforme en connaissance de cause », s’indigne Viviane, professeure des écoles à Villeurbanne. Au loin, les enceintes des syndicats annoncent le départ de la manifestation, sous les drapeaux agités.

Les REP+ en première ligne

En avancant dans le cortège, Romain, enseignant au collège Môrice-Leroux à Villeurbanne, exprime son inquiétude concernant le possible « tri social » induit par cette réforme. « On sait très bien qu’en fonction du capital économique et du capital culturel, les enfants les plus favorisés seront dans les groupes « de bons élèves ». Quant aux plus pauvres, ils vont se retrouver relégués dans les classes de « mauvais »», témoigne cet enseignant en collège REP+ (réseau éducation prioritaire).

Il ajoute : « Pour mettre en place ces groupes de niveaux, des moyens ont été enlevés à l’enseignement prioritaire, ce qui est complètement inadmissible ». Entre classes saturées et moyens humains insuffisants, des élèves aux situations sociales déjà difficiles se retrouveront pénalisés. Comme nous vous le racontions en février, les personnels des collèges du réseau d’éducation prioritaire voient leurs conditions de travail se dégrader d’années en années.

A Lyon, les enseignants en REP+ en première ligne lors de la manifestation ce mardi 2 avril.Photo : ©Laury Caplat/Rue89Lyon

En première ligne du cortège, en direction de Saxe-Gambetta, une dizaine de lycéens, pancartes à la main, scandent en coeur: « Du fric pour nos lycées pour pas finir policier ». Ce matin du 2 avril, ils et elles se sont levés à l’aube pour (tenter de) bloquer le lycée de Saint-Just (Lyon 5e).

Si l’opération blocus a été lancée pour soutenir la grève des enseignant.es, celle-ci témoigne plus généralement d’un rejet du système éducatif actuel. « On se mobilise contre le SNU (service national universel), contre Parcoursup et surtout contre la réforme « choc des savoirs », qui tente de mettre de côté des élèves déjà défavorisés. On nous impose toujours plus de tri, comme avec Parcoursup. C’est inégalitaire », explique Marc* (prénom changé), à l’écart du petit groupe de manifestant.es.

Les groupes de niveau devraient être mis en place à la rentrée 2024 pour les classes de 6e et 5e. Mais les enseignants rencontrés ce mardi ont promis de revenir dans la rue « si rien ne changeait ».


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