« Ce qui est légitime est-il nécessairement légal »? Le tribunal de Lyon a planché plusieurs heures sur cette question philosophique, mardi 5 décembre. Trois militants du collectif Dernière Rénovation étaient jugés pour avoir couvert de peinture orange une partie des grilles, des escaliers, et de la façade de la préfecture du Rhône, le 22 mars dernier.
Leur objectif : alerter sur l’inaction climatique, et plus spécifiquement sur les manquements de l’État sur la rénovation énergétique du parc immobilier. Des actions similaires avaient eu lieu à Paris, Marseille, Nantes, Toulouse et Tours.
Non-violence et désobéissance civile
A Lyon, l’interpellation s’était déroulée dans le calme et sans violence. Il faut dire que les trois activistes ont attendu les forces de l’ordre, souhaitant assumer, et surtout revendiquer leur action. « C’est même nous qui avons rangé la peinture dans leur camionnette », a affirmé l’un des prévenus à l’audience, ce mardi 5 décembre.
Les trois trentenaires, un ingénieur en reconversion, une orthophoniste et un travailleur social, ont assuré devant le tribunal être conscients des risques encourus. Tous trois sont passés par les petites actions du quotidien, avant de se tourner vers l’activisme face à l’urgence climatique. « On a besoin d’un changement rapide. Si on veut faire bouger les lignes, il faut une désobéissance civile non-violente », a appuyé une co-prévenue devant le tribunal.
Rue89Lyon l’avait interrogée en mars dernier, devant la Préfecture.
« Aujourd’hui, résister c’est vital, scandait-t-elle, la main levée. Le gouvernement ne respecte ni ses lois, ni ses citoyens. Cette peinture orange est lavable à l’eau. Ce gouvernement commet des crimes climatiques qui, eux, ne sont pas réparables. »
Marjolaine, militante de Dernière rénovation, le 22 mars dernier
Dernière rénovation sommée de rendre l’argent ?
Un brin philosophe, le président de séance, qui n’a pas nié la légitimité de la cause, a interrogé les activistes : « Où placer le curseur de la légalité quand on défend un intérêt supérieur? Est-ce qu’un jour on va tuer 10 personnes si on peut en sauver 100? Cela risque d’être le chaos? »
« Nos actions sont non violentes. C’est si nos combats n’avancent pas que ça risque d’être le chaos », a répondu Marjolaine.
Pour appuyer son action, dont le passage devant un tribunal faisait partie, Dernière rénovation a fait venir deux témoins, présentés comme experts, pour parler dérèglement climatique et rénovation énergétique.
« Mettre de la peinture orange sur de la pierre n’a jamais fait baisser la température », a tancé le procureur, qui a requis 300 euros d’amende contre les militants. Une sanction qui n’était pas l’enjeu majeur de l’audience de ce mardi 5 décembre.
Par l’intermédiaire de leurs avocates, Département et préfecture, qui se sont partagés les frais de nettoyage, ont demandé des comptes à Dernière rénovation. La note présentée s’élève à plus de 122 000 euros pour le nettoyage et la remise en état du bâtiment, classé monument historique et propriété du Département. Un montant jugé exagéré pour la défense, qui affirme que la peinture utilisée était lavable à l’eau. Les avocats des trois prévenus ont plaidé la relaxe.
Les activistes seront fixés le 19 décembre prochain.
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