Mauvaise nouvelle pour la qualité de l’air dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. L’année 2022, ses températures élevées et ses faibles précipitations ont provoqué une augmentation des concentrations de polluants dans l’atmosphère, en particulier de l’ozone. Il s’agit des conclusions inquiétantes rendues jeudi 27 avril par l’observatoire de la qualité de l’air, Atmo, et la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal). Les deux organismes notent ainsi une augmentation de 18% de la concentration d’ozone dans la région depuis 2007, malgré des années de baisse.
« On espérait qu’il avait été possible d’enrayer cette pollution à l’ozone avec cette diminution sur les 15 dernières années, mais ce n’est pas le cas en 2022 », déplore Didier Chapuis, directeur des actions d’Atmo.
Les particules fines ne sont pas en reste : les concentrations de PM10 et PM2,5 (encore plus fines) ont elles aussi augmenté sur l’année 2022.
Pour améliorer la situation avec des solutions adaptées, Atmo et la DREAL ont mis au point une nouvelle méthode présentée jeudi 27 avril. Les enjeux n’étant pas les mêmes à Lyon, Roanne ou Salers, la région Auvergne-Rhône-Alpes a ainsi été découpée en quatre grandes zones, des territoires les plus densément peuplés et les plus exposés aux émissions de polluants aux endroits encore préservés.
La région lyonnaise et le Nord-Isère les plus touchés par des épisodes de pollution en 2022
Sans surprise, la région lyonnaise se trouve dans le haut du classement. Cette première zone rassemble les grandes agglomérations de plus de 150 000 habitants, où les habitants sont les plus exposés à la pollution de l’air. Aux côtés de Lyon, on trouve les agglomérations de Grenoble, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand, Valence ou encore Annecy. Plus d’un tiers de la population régionale est concerné.
Dans cette zone numéro un, la qualité de l’air a été jugée « non satisfaisante ». Atmo et la DREAL notent que la quasi-totalité de la population de ces territoires est exposée à des concentrations d’oxyde d’azote et de particules très fines (PM2,5) bien supérieures aux valeurs recommandées par l’OMS.
« La région lyonnaise et le Nord-Isère sont les territoires qui ont été le plus concernés par des épisodes de pollution à l’ozone et aux particules fines en 2022, précise Didier Chapuis. On a constaté une légère augmentation d’oxyde d’azote sur les sites de proximité routière de la métropole de Lyon. Ça reste relativement modéré mais on est loin de la tendance à la diminution de ces dernières années… »
Alors, que faire ? Pour Atmo comme pour la DREAL, il faut agir « prioritairement » sur les mobilités, en favorisant les mobilités douces et les Zones à faibles émissions (ZFE), ainsi que sur l’urbanisme. Les organismes recommandent également la rénovation des bâtiments pour améliorer leurs performances énergétiques.
Une mesure revendiquée depuis un an par les activistes de Dernière Rénovation, qui mènent des campagnes de désobéissance civile. Ils et elles ont entamé une quatrième vague d’actions à Lyon il y a quelques semaines.
Plus de 4000 décès liés à la pollution aux particules fines dans la région
« Plus de 4000 décès sont liés aux particules fines en Auvergne-Rhône-Alpes, alerte sombrement Éric Fournier, président d’Atmo. Les agglomérations moins importantes sont touchées aussi. »
Cette pollution de l’air n’épargne pas les villes moyennes (zone 2), qui représentent un tiers de la population régionale, ni les petites villes moins peuplées (zone 3), où vivent deux millions d’habitants sur la moitié de la surface de la région. Atmo et la DREAL notent même que les émissions de particules fines par habitant sont quatre fois plus importantes dans les petites villes que dans les grandes agglomérations.
En cause, d’après eux, une pollution liée au chauffage au bois, associée à des pollutions industrielles ou agricoles souvent proches des habitations, en particulier des émissions importantes d’ammoniac. Autre source de pollution commune à ces deux zones : la voiture individuelle. Indispensable, souvent, dans ces territoires peu voire pas desservis par les transports en commun.
Atmo et la DREAL recommandent donc le recours au covoiturage ou au télétravail, un changement des pratiques agricoles, sans produits phytosanitaires, et un renouvellement des types de chauffage.
Face à la hausse des prix de l’énergie, le retour du chauffage au bois, source de pollution dans la région
Le chauffage au bois est problématique dans l’ensemble de la région Auvergne-Rhône-Alpes, y compris dans la quatrième zone de ce classement, les territoires dit « préservés ». Là, il y a cinq fois plus d’appareils de chauffage par habitant que dans le reste de la région. On trouve dans cette catégorie principalement l’Auvergne, dont le Cantal, connu pour ses hivers rigoureux. Atmo et la DREAL notent toutefois que l’air y est « de bonne qualité » malgré les émissions liées au chauffage et à l’agriculture.
Plus généralement, le chauffage pourrait expliquer que cette année 2022 ait vu la concentration des polluants augmenter dans la région. Et ce alors que les températures élevées de l’hiver laissaient présager un moindre recours au chauffage et donc une diminution des émissions.
« Un tiers des logements sont équipés en chauffage dans la région, détaille Matthieu Papouin, directeur adjoint de la DREAL. Parmi ceux-ci, 50% sont des chauffages d’appoint, dont 70% ne sont pas performants, parce qu’ils sont vieux, qu’il s’agit de foyers ouverts… »
« Avec le coût de l’énergie, il y a eu une augmentation de l’utilisation du chauffage au bois et des chauffages d’appoint, avec des combustibles moins chers donc plus polluants », explique Didier Chapuis.
Or, l’année 2023 voit déjà des températures déjà élevées et une hausse continue des prix de l’énergie. Dans ce contexte, la qualité de l’air ne devrait guère s’améliorer.
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