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À Lyon, le tourisme fluvial sort la carte verte

Ce mercredi 26 avril, des professionnels du tourisme fluvial et des élus de la métropole étaient réunis à Lyon pour présenter un projet d’installation de bornes électriques pour électrifier les bateaux de croisière. Objectif : donner une image positive et verte de cette activité, parfois peu appréciée des habitants.

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Le paquebot l'Amakristina

« Il y a un peu de retard, mais elle va arriver très vite »

Cécile Avezard a un sourire légèrement gêné, ce mercredi 26 avril. Sur les quais du Rhône, au niveau du pont de l’Université (Lyon 7e), la directrice territoriale Rhône-Saône des Voies navigables de France (VNF) présente l’emplacement, encore vide, où sera présent une future borne dite « IRVE » (Infrastructure de recharge de véhicule électrique).

En tout, il y en aura trois sur Lyon d’ici la fin de l’année. Onze le long de l’axe touristique Rhône-Saône allant de Saint-Jean-de-Losne (Bourgogne) à Port-Saint-Louis-du-Rhône (Bouche-du-Rhône). 

Dans la métropole, les premières seront basées pont de l’Université, au niveau du musée des Confluences et sur les quais Rambaud (côté Saône). Celles-ci seront toutes opérationnelles d’ici octobre prochain.

Objectif : alimenter en électricité des paquebots de croisière à quais. Six d’entre eux pourront se brancher, en simultané, sur cette borne. Jusqu’à aujourd’hui, ces bateaux qui font voyager 110 000 touristes « d’un certain âge » par an (États-uniens, Allemands ou Australiens) s’alimentent en électricité à quai, à l’aide de groupes électrogènes. 

Une énergie qui alimente les cuisines, les chambres… Bref, l’ensemble de la vie à bord. Une hérésie en termes d’économie d’énergie et un motif d’agacement pour les riverains du 7e arrondissement.

Cécile Avezard et Bruno Bernard, le 26 avril, lors de l’annonce de la mise en place de bornes électriques sur les quais du Rhône.Photo : PL/Rue89Lyon.

Un verdissement du tourisme fluvial sur les quais de Lyon

En ce sens, le président de la Métropole, Bruno Bernard (EELV) marque :

« On veut un tourisme plus responsable. Pour cela, il faut changer les pratiques et ce projet s’inscrit dans cet objectif. »

Ces installations de Saône confluences escales, une filiale de Engie (ex-GDF) Solutions, sont donc particulièrement attendues. Pour un investissement de 8,5 millions d’euros, l’émission de 8 500 tonnes de CO2 sera évitée sur l’ensemble du réseau géré par les VNF. Ce chiffre serait de 5 800 rien que sur le territoire de la métropole lyonnaise. Un bon début. Sur le bassin Rhône-Saône, les bateaux passent 68 % de leur temps à quais.

« Dans le cadre de la ZFE [Zone à faible émission, ndlr], cet investissement est primordial, poursuit Bruno Bernard. Comment pouvons-nous contraindre les habitants à accepter de nouvelles contraintes si des bateaux ne les respectent pas sous leurs fenêtres ? »

Un verdissement du tourisme fluvial qui s’accompagne de mesures sur le traitement des déchets des paquebots. Plutôt qu’une logistique routière, les acteurs du fluvial cherchent à débarrasser les déchets des paquebots par le fleuve. Un développement qui serait un autre motif de satisfaction pour les habitués des quais.

Ainsi, le Zulu 5, un bateau géré par la société Servis II et l’entreprise Blue Line Logistics, une filiale du transporteur Sogestran, doit récupérer les détritus directement sur le fleuve. En 2023, 21 bateaux, sur les 26 qui traversent Lyon, utilisent ce service travaillant cinq jours par semaine.

Le tourisme fluvial confronté à des conflits d’usage à Lyon

En plus de cette installation, la concession octroyée par les VNF prévoit l’installation d’une régie afin de faire échanger les habitants du quartier, les élus locaux et les acteurs du fluvial. Une autre manière d’éviter les « conflits d’usages », qui font grincer des dents certains habitants.

Après l’installation du service de logistique ULS l’année dernière ou les expérimentations menées côté Saône avec le bateau le Tourville, ces investissements montrent un regain de développement pour ce secteur longtemps en décroissance, entre Rhône et Saône. Alternative à la route, le fluvial intéresse à l’heure de la mise en place de la ZFE pour éviter l’utilisation de poids lourds ou de cars côté tourisme.

Une carte verte à travailler pour le fluvial

Ses partisans aiment à le rappeler : un bateau permet de remplacer pas moins de 250 camions. Le gain en terme écologique semble donc indéniable. Côté tourisme, 60 % des émissions de CO2 sont générées à quais. Sur ce point, ces bornes vont apporter un gain certain. Reste quand même 40 %.

« On dit souvent que le transport fluvial est écologique parce qu’il est massifié et c’est vrai, défend Cécile Avezard, en bonne défenseur de ce mode de transport. Mais il faut aussi travailler sur la qualité propre des bateaux. Nous n’en sommes pas encore au zéro émission carbone. »

Interrogés par Rue89Lyon à ce sujet, les acteurs du fluvial ne cachent pas certaines difficultés. Des moteurs puissants, et consommateurs de gasoil, sont encore nécessaires pour faire avancer des bateaux imposants capables de transporter 100 à 120 personnes. « Aujourd’hui, nous avons une mer d’huile [Mer très calme, sans vague ndlr]. Mais le Rhône peut se montrer capricieux. Or, si un paquebot ne peut plus bouger, ça pose problème », commente Léo Beilmann.

Représentant de la société Servis II et de la société Agis, spécialisé dans le conseil aux paquebots de tourisme, ce connaisseur du milieu essaye de relativiser l’impact environnemental du tourisme fluvial. D’après lui un touriste de paquebot consomme six à sept litres de carburant par jour. Ce qui représenterait, toujours d’après lui, une consommation relativement faible. « Mais on peut faire mieux », reconnaît-il.

D’après lui, la solution sur le court terme passe par le développement de bateaux hybrides, combinant électricité et carburant. Ces derniers sont également appelés à évoluer. « Nous testons notamment sur notre vedette Rhône l’utilisation de l’hydrogène », rappelle Cécile Avezard, pour les VNF. 

Des solutions industrielles à envisager sur le long terme

L’utilisation de biocarburant est également une solution envisagée. En 2022, la compagnie de transport Sogestran avait notamment testé un nouveau biogazole de synthèse. En mars 2023, une station a été inaugurée par les VNF à Lyon pour proposer aux utilisateurs du fluvial des carburants alternatifs, moins polluants.

Mais ces changements prennent du temps. La construction de bateaux de tourisme, comme de fret, est beaucoup plus « artisanale » que celle de poids lourds, nous glisse à propos un membre de l’entreprise Neptunia, qui gère cette fameuse plateforme d’énergies mise en avant par les VNF.

Économie d’échelle oblige, les industriels ont moins intérêt à développer de nouveaux moteurs, car la demande est moindre que pour les poids lourds. De même, un bateau vit souvent près de 50 ans, soit bien plus de temps qu’un poids lourd. 

Autant de freins industriels qui peuvent expliquer les difficultés d’évolution de la flotte. Cette dernière aura cependant certainement plus de facilités à jouer la carte verte qu’un secteur « routier » mis en difficulté dans la métropole de Lyon par le développement de la ZFE. 

Le tourisme fluvial cherche à verdir son image sur les quais du Rhône, à Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon.

#Transport fluvial

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