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À Lyon, la manifestation contre la réforme des retraites grandit : « On n’a pas envie de mourir au travail »

Contre la réforme des retraites à Lyon, ils et elles étaient 45 000 à défiler, selon les syndicats, et 25 000 selon la police, ce mardi 31 janvier. Une mobilisation en hausse par rapport à la première manifestation du 19 janvier. Reportage

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manifestation contre la réforme des retraites

C’est à nouveau une marée humaine qui a déferlé sur le cours Gambetta ce mardi 31 janvier. Les manifestants ont été plus nombreux que lors du premier jour de mobilisation, le 19 janvier. Ils étaient 45 000, selon les syndicats (contre 38 000 le 19 janvier), 25 000 personnes, selon la préfecture (contre 23 000).

La manifestation a rapidement débuté, dès 14h10, depuis la manufacture des Tabacs et les prises de parole se sont faites en marchant. Le 19 janvier, le cortège était resté près d’une heure sur place avant de s’élancer.

La manifestation du 31 janvier a rassemblé 45 000 personnes, selon la CGT.Photo : PL/Rue89Lyon

« Les personnes qui ont travaillé toute leur vie ont le droit au repos. Nous proposons une autre réforme des retraites, une réforme juste qui augmente les pensions, qui permet de partir à 50, 55 ou 60 ans, selon la pénibilité », lance un syndicaliste au micro.

Peu après le début de la manifestation, un cortège de tête se forme, composé de gilets jaunes, et de manifestants sans drapeau ou signe distinctif. Arrivé à Saxe-Gambetta, un groupe de manifestants constituent un black bloc. Leurs banderoles, ironiques et un brin provocatrices, demandent la retraite à 35 ans et le Smic à 5000 euros.

Un black bloc s’est formé lors de la manifestation contre la réforme des retraites du 31 janvier à Lyon.Photo : MA/Rue89Lyon

Les banderoles finissent par disparaître et le bloc se dilue à nouveau dans le cortège de tête. Alors que la tête de la manifestation arrive au niveau de la rue de la Barre, gardée par les CRS, un incident éclate. Jets de projectiles et jets de lacrymogènes se répondent. Un nuage de lacrymogène est rabattu par le vent sur le reste du cortège, vers la place Antonin-Poncet.

Il disperse pour de bon le cortège de tête, qui laisse place au défilé des syndicats. Deux personnes seront interpellées, un peu plus tard, pour avoir incendié des drapeaux sur la place Bellecour.

Des gilets jaunes mobilisés contre la réforme des retraites à Lyon

Mathilde était dans le cortège de tête. Cette gilet jaune de 38 ans ne se voyait pas venir sans sa veste fluo à cette manifestation.

« Ça fait partie d’une identité. Pendant le mouvement des Gilets jaunes, j’ai défendu le niveau de vie des Français, donc sur ce combat pour les retraites, il a tout son sens. On se bat pour le droit d’avoir une vie digne et correcte. »

Mathilde (à gauche), gilet jaune revendiquée, se mobilise contre la réforme des retraites à Lyon.Photo : MA/Rue89Lyon

Elle évoque son cas personnel. « J’ai déjà un métier où ce n’est pas facile d’arriver à la retraite sans flancher. » La trentenaire travaille dans le social, auprès de la petite enfance. « Il y a un manque de reconnaissance…», constate-t-elle.

Sa colère contre le gouvernement et le président Emmanuel Macron est palpable. « J’espère qu’on sera entendus et qu’ils arrêteront de nous prendre pour des cons », peste-t-elle, en montrant sa pancarte. « On a pas envie de mourir au travail, on a le droit de travailler pour pouvoir profiter plus tard », conclut-elle.

Des agriculteurs dans la rue à Lyon pour s’opposer à la réforme des retraites

Un peu plus loin dans le cortège, quelques drapeaux jaunes de la Confédération paysanne (syndicat d’agriculteurs) sortent du lot. Nicolas, maraîcher de 49 ans, et Antoine Pariset, 36 ans, maraîcher du sud-ouest de Lyon, sont venus s’opposer à la réforme des retraites.

Nicolas lui, n’est pas venu pour défendre sa propre retraite. Agriculteur depuis une dizaine d’années, il se voit bien continuer de travailler, même après 60 ans. Pour autant, il est venu s’opposer à une réforme « inutile ».

« L’enjeu de la réforme c’est d’aller chercher 13 milliards supplémentaires, pour combler un budget des retraites de 350 milliards. Ils sont en train de mettre la population dans la rue pour si peu. »

Quelques agriculteurs de la Confédération paysanne, Antoine Pariset à gauche et Nicolas à droite, étaient présents dans le cortège du 31 janvier.Photo : MA/Rue89Lyon

À côté, Antoine Pariset, porte parole du syndicat, tient à s’exprimer à la fois pour les chefs d’exploitation, comme lui, mais aussi pour les salariés agricoles.

« Dans le secteur agricole, on produit de mieux en mieux et de plus en plus par rapport à nos ancêtres. Où sont passés les profits ? Il faut récupérer cet argent pour nos retraites. Notre travail est dur et épuisant qu’on se soit installés à 19, 25 ou 40 ans, sans parler du salariat agricole. Un salarié agricole de 64 ans ? Rien que cette phrase montre le problème. Ils devraient partir à la retraite beaucoup plus tôt. »

Le syndicaliste évoque aussi les 1000 euros minimum de retraite promis pour les agriculteurs par Emmanuel Macron, en 2019.

« Cette mesure n’est toujours pas mise en place, il y a de quoi s’étouffer. Ce sera ça nos retraites, pour service rendu à la nation ? Pour avoir nourri le pays ? », proteste-t-il.

Les « robins des bois » de l’énergie mobilisés à Lyon

Juliette Lamoine, secrétaire générale du syndicat lyonnais de l’énergie.Photo : MA/Rue89Lyon

La CGT Énergie avait fait parlé d’elle suite à la première manifestation du 19 janvier. Partout en France, des techniciens avait rétabli le courant à des familles, réduit de moitié, ou totalement, les factures énergies de HLM, hôpitaux ou des crèches. À Lyon, cela n’a pas encore été le cas, « mais on s’organise pour » assure Juliette Lamoine, secrétaire générale du syndicat lyonnais de l’énergie.

Au côté de ses collègues, elle se bat contre cette réforme et pour défendre le régime spécial des travailleurs de l’énergie : un calcul de la retraite sur les six derniers mois de carrière et la prise en compte des pénibilités du métier.

« Nous sommes souvent d’astreinte et nous travaillons en 3×8 pour l’entretien des réseaux électriques et gaziers. Il y a aussi tous ceux qui travaillent en hauteur sur les lignes ou les gaziers qui rentrent dans les mines, qui doivent creuser des tranchées… Tout ça pour des salaires en dessous de 2000 euros net », détaille-t-elle.

Pour elle, cette manifestation est aussi l’occasion de défendre un vrai service public de l’énergie avec un régime spécial pour les salariés de ce service public. Elle craint que le gouvernement ne souhaite s’y attaquer avec « de nouvelles embauches hors contrat. »

La jeunesse de Lyon mobilisée pour les retraites

Au cœur de la manifestation, un cortège se fait remarquer par son dynamisme. Étudiant·es et lycéen·nes forment un bloc uni derrière quatre banderoles, menées par une militante munie d’un haut-parleur. Encore au lycée, Gaël·le a tenu a être présent·e dans le cortège pour s’opposer à la réforme des retraites. L’élève est aussi porte-parole du Mouvement national lycéen.

« Nous sommes là parce que les jeunes sont les plus touchés par la précarité et le chômage. Or, cette réforme des retraites s’inscrit tout droit dans une liste de réformes menées par Macron, notamment celle du chômage. On est aussi là par solidarité envers nos proches. Autour de nous, on voit les adultes travailler jusque tard et aller mal à cause de ça. »

Gaël·le (à droite), représentant·e du Mouvement national lycéen, est descendue dans la rue à Lyon pour s’opposer à la réforme des retraites. MA/Rue89Lyon

Mais cette mobilisation est loin d’être sa première, puisque Gaël·le a déjà participé à des mouvements écologistes et féministes. Des causes qu’iel met aussi en lien avec la réforme des retraites, qui « pénalisera plus les femmes » et « mettra en danger la planète ». Un argumentaire qu’on perçoit par bribes tant le reste du cortège est bruyant. Dans le même temps, les manifestants entonnent le refrain des Bérus : « La jeunesse emmerde le Front National. »

Après cette journée de mobilisation, l’intersyndicale appelle à deux nouvelles mobilisations, le mardi 7 février et le samedi 11 février. Un nouvel appel à la grève est aussi lancé chez EDF pour les 6, 7 et 8 février. La CGT et Sud-Rail ont également déjà appelé les cheminots à deux journées de débrayage les 7 et 8 février.


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