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Extrême droite : deux attaques le week-end dernier à Lyon

Des membres du collectif 69 Palestine se sont faits agresser le 14 octobre en marge d’un rassemblement qu’ils avaient organisé dans le Vieux-Lyon. Deux jours plus tard, ce sont les grévistes de Lyon Perrache qui se sont faits voler leurs banderoles. Derrière ces deux actions, on retrouve la signature de l’extrême droite lyonnaise.

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Les deux attaques ont été revendiquées par ces militants d'extrême droite de Lyon. Photo issue de Ouest Casual.

Vendredi 14 octobre, un groupe de jeunes hommes a agressé des membres du collectif 69 Palestine, en marge d’un rassemblement organisé dans le Vieux-Lyon. Deux jours plus tard, ils ont décidé de faire irruption sur le piquet de grève des agents de service de la gare de Lyon Perrache. Les deux attaques ont été revendiquées sur les canaux de communication de l’extrême droite, à l’aide de photos et vidéos sur lesquelles posent ces mêmes jeunes hommes, en exhibant plusieurs symboles néo-nazis.

Les deux attaques ont été revendiquées par ces militants d’extrême droite de Lyon. Photo issue de Ouest Casual.

« Je me suis retourné et j’ai vu une vingtaine de gars masqués avec des battes de baseball »

Samy, 29 ans, fait partie depuis deux ans du collectif 69 Palestine qui milite pour « un règlement politique et pacifique du conflit israélo-palestinien », d’après leur site web. Le 14 octobre, les militants organisaient un rassemblement déclaré devant l’ancien Palais de justice, près du Vieux-Lyon.

Ce lieu de rassemblement avait été choisi en raison de sa charge symbolique, pour dénoncer la longue incarcération du militant communiste libanais Georges Ibrahim Abdallah, emprisonné en France depuis près de 40 ans. Samy explique que ce n’est qu’en arrivant devant les 24 colonnes qu’il s’est rappelé de la proximité du tribunal avec le Vieux-Lyon, quartier dans lequel l’extrême droite possède différents locaux.

Au début, la mobilisation se déroule sans accroc, malgré quelques éléments qui rendent les militants nerveux.

« Il y avait deux gamins qui nous prenaient en photo. Un ami leur a dit d’arrêter, ils se sont énervés mais sont partis. Vers la passerelle il y avait un gars qui nous fixait bizarrement aussi, de manière insistante. »

Malgré ça, Samy et ses amis ne s’inquiètent pas outre mesure. À la fin du rassemblement, le gros du collectif se disperse – « majoritairement des personnes âgées blanches, de 70 à 80 ans », précise Samy. Le jeune homme emprunte la passerelle en compagnie de huit militants plus jeunes. Ils avancent d’un pas tranquille en direction de Bellecour, traversent la Saône et commencent à longer les bars alignés le long du quai, quand l’un d’eux interpelle brusquement Samy :

« Il m’a crié « Samy, on va se battre ! Il faut courir ! ». Je me suis retourné, et là j’ai vu une vingtaine de gars masqués avec des battes de baseball. »

« Il s’est fait défoncer, il était en sang, avec des dents cassées »

À ce moment-là, Samy raconte avoir entendu « un cri de guerre » de la part des hommes masqués, et avoir pris les jambes à son cou. Un de ses amis affirme de son côté être certain d’avoir reconnu un slogan fasciste, sans pouvoir se souvenir précisément des mots employés. Samy dit avoir immédiatement fait le lien avec le comportement étrange des trois jeunes hommes en marge du rassemblement, persuadé désormais qu’il s’agissait de militants d’extrême droite.

« J’avais peur. On s’est dispersés et on a tous pris des directions différentes. Je me suis réfugié dans le métro Bellecour avec quelques autres. »

Cinq de leurs camarades tentent de se mettre à l’abri dans un bar. Les assaillants masqués les attendent de pied ferme à la sortie quand, soudain, ils lèvent le camp. La raison de ce départ précipité s’appelle Julien (le prénom a été modifié). Militant du collectif 69 Palestine comme Samy, le jeune homme a pris la fuite seul, en direction de la place Bellecour, quand sa route a croisé celle des militants d’extrême droite.

« Il s’est fait défoncer, il était en sang, avec des dents cassées », raconte Samy.

Les agresseurs ont pris la fuite quelques minutes avant l’arrivée de la police, alertée par des passants qui ont assisté à la scène. Julien, lui, s’en sort avec quelques dents cassés et des séquelles psychologiques.

« La police nous a dit que le Vieux-Lyon, c’était le quartier de l’extrême droite et qu’il valait mieux éviter d’organiser des rassemblements là-bas », s’indigne Samy.

Lyonnais d’origine, le jeune homme avait déjà entendu parler des agressions commises par l’extrême droite. Mais il n’avait jamais pensé en être victime un jour :

« Je ne m’étais jamais fait courser comme ça. Je pensais que les militants d’extrême droite s’en prenait principalement aux antifas… »

Au moment de notre entretien, le collectif n’avait pas encore porté plainte contre cette agression.

Les grévistes de Lyon Perrache dépouillés de leur matériel syndical par des militants d’extrême droite

Apparemment, l’extrême droite s’en prend aussi aux grévistes désormais à Lyon. Les 22 agents de service de la gare de Lyon Perrache sont en grève depuis le 12 octobre. Salariés de la société de propreté Arc-en-Ciel, sous-traitant de la Métropole de Lyon, ils accusent la collectivité de vouloir changer de prestataire fin décembre.

Ce dimanche 16 octobre dans la soirée, deux d’entre eux ont eu la désagréable surprise de voir un groupe de jeunes hommes faire irruption sur leur piquet de grève pour voler la banderole et des drapeaux du syndicat CNT-Solidarité ouvrière. « Il n’y a eu aucune violence », précisait le syndicat à nos confrères de Rapports de Force, en expliquant ne pas avoir identifié immédiatement l’extrême droite.

Pour le syndicat, le caractère raciste de cette attaque est évident : « La quasi totalité des agents sont d’origine étrangère. »

Dans les deux cas : la marque de l’extrême droite de Lyon

Les doutes planants sur l’identité des voleurs ont été dissipés quelques heures plus tard, quand ces derniers ont revendiqué les deux attaques sur le canal Telegram d’extrême droite Ouest Casual, photo et vidéo à l’appui.

On y voit notamment cinq jeunes hommes – dont un très grand – qui arborent fièrement le matériel syndical de la CNT-SO, à l’envers. Leurs visage sont dissimulés derrière des foulards décorés de croix celtiques, de Totenkopfs (un emblème nazi) ou de blasons lyonnais. Des symboles affectionnés tout particulièrement par les militants d’extrême droite.

L’un deux exhibe en outre un tee-shirt floqué de l’inscription « Clermont Nationaliste » – un groupuscule néo-nazi qui vient parfois prêter main fort au « Guignol Squad » lyonnais. D’après les informations de Rue89Lyon, on retrouverait dans ce Guignol Squad des membres du groupuscule nationaliste-révolutionnaire « Lyon Populaire », issu de la dissolution du Bastion Social, ainsi que de Génération identitaire, groupe lui aussi dissous.


#Extrême-droite

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Photo : PL/Rue89Lyon

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