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Législatives : Thomas Rudigoz, député macroniste, cherche report de voix

Thomas Rudigoz (Ensemble) compte sur les reports de voix pour l’emporter au second tour des législatives de la 1ère circonscription du Rhône

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Thomas rudigoz législatives lyon

Thomas Rudigoz serre des mains, claque des bises. Au marché du Point du Jour ce mardi matin, le député, ancien maire du 5e arrondissement entre 2014 et 2017, peine à faire quelques mètres. Les passants – pour la plupart d’un certain âge – défilent pour lui serrer la main.

Ici, ce centriste de longue date est en terrain conquis. Candidat aux législatives 2022 dans la 1ère circonscription du Rhône, il a réuni 49,4% des voix au premier tour au bureau de vote à côté du marché.

Son ancien mandat de maire plane toujours au-dessus de sa tête. Alors qu’il fait campagne comme député, on le questionne sur le kiosque à journaux qui n’a toujours pas ouvert, sur les feux de circulation temporaires qui fonctionnent mal, on l’invite au tournoi de pétanque de vendredi…

Ancien maire du 5e arrondissement, Thomas Rudigoz est interpellé sur le kiosque à journaux de la place, toujours fermé.Photo : Marie Allenou/Rue89Lyon

Hors du 5e, Thomas Rudigoz se heurte à l’union de la gauche

« Alors les résultats ? », lui lancent quelques passants, pas très renseignés sur l’élection mais qui connaissent bien celui qu’ils appellent « Thomas ».

« Je ne suis pas content, je pensais faire mieux. La France Insoumise me dépasse de 4,5 points », répond le député macroniste, qui appelle ses partisans à mobiliser leurs proches.

À quelques mètres, des militants de la Nupes tractent pour leur candidate Aurélie Gries, insoumise et adjointe à la petite enfance à la maire écolo du 7e.

Dans cette 1ère circonscription du Rhône, qui englobe le 5e et une partie des 8e, 9e, 7e et 2e arrondissements de Lyon, l’union de la gauche (Nupes) est arrivée en tête avec 37,75% des voix, contre 32,96% pour Rudigoz.

En 2017, Thomas Rudigoz s’était placé largement en tête du premier tour avec plus de 47% des voix face à un candidat insoumis qui avait peiné à réunir 13,7% des suffrages. Cette année, la bataille s’annonce bien plus serrée et le député se veut « combatif mais pas fanfaron ».

Des réserves de voix pour le second tour des législatives

Pas fanfaron, donc, le candidat ne se montre pas très inquiet non plus et rassure ses partisans qui viennent le saluer : « Si le 5e vote bien, ça passera, j’ai le réservoir de voix qu’il faut ». La Nupes, bien qu’arrivée en tête à l’issue du premier tour du 12 juin dernier, ne pourra compter que sur les abstentionnistes – et peut-être le Parti Animaliste ou Lutte Ouvrière – pour trouver d’autres électeurs au second tour.

Au contraire, Thomas Rudigoz peut espérer récupérer les 2000 voix qui lui manque. D’abord auprès des électeurs de la candidate LR, Anne Prost (8,70%), mais aussi chez l’électorat du candidat PRG, Grégory Dayme. Soutenu par l’ancien maire de Lyon Gérard Collomb, il n’a remporté que 3,76% des voix, signe d’une perte d’influence de l’ancien édile.

Affiche de campagne de Grégory Dayme, candidat dissident LREM sous étiquette du Parti Radical de gauche (1ere circonscription du Rhône) pour les élections législatives 2022 à Lyon. Photo BE/Rue89Lyon

« La Nupes a fait un joli coup politique, il faut le reconnaître. Dans ma circonscription, ce que je regrette c’est que Monsieur Dayme m’ait pris des voix, alors qu’on aurait pu être dans un mouchoir de poche avec la Nupes. »

Les querelles politiques lyonnaises ont refait surface pour ces législatives. Ex-Modem, puis centriste collombiste avant de passer à LREM, Thomas Rudigoz a fait toute sa carrière dans le monde politique. Il a d’abord été chef de cabinet à la Région, puis conseiller général au département du Rhône avant d’être élu maire du 5e arrondissement sur les listes du socialiste Gérard Collomb en 2014.

En 2017, il bénéficie du soutien de l’ancien maire de Lyon pour les élections législatives sous l’étiquette En Marche. Le divorce entre Collomb et le député débute en 2017. Dans la bataille pour la succession à Gérard Collomb, parti au ministère de l’Intérieur, Thomas Rudigoz se brouille avec Caroline Collomb, la femme de l’ancien maire. Puis, la séparation est définitivement consommée lors les élections métropolitaines et municipales de 2020. Thomas Rudigoz se porte candidat sur les listes de David Kimelfeld, dissident face à Gérard Collomb investi par LREM.

Thomas Rudigoz doit défendre le bilan macroniste

Alors que l’on discute avec le candidat, en évitant de gêner les passants et leurs cabas, une femme blonde attend patiemment. Au premier tour, elle a voté Rassemblement national, mais n’est pas non plus grandement convaincue par ce parti. Handicapée, Florence veut interpeller le candidat sur la baisse des APL mais surtout sur la déconjugalisation de l’Allocation adulte handicapé, car Thomas Rudigoz a voté contre.

« J’aurais préféré qu’à la place de la PMA pour toutes, vous fassiez la déconjugalisation de l’AAH. Si je veux avoir cette allocation, je dois me séparer de mon mari ! »

« J’étais très partagé sur ce sujet », lui confie le candidat, qui avait aussi été interpellé par Aurélie Gries lors d’un débat. Pour convaincre Florence, le député tente de montrer des signes d’ouverture vers ceux qui ont voté pour le parti d’extrême droite.

« Je fais la différence entre les élus RN qui sont toujours nos adversaires et l’électorat, qui sont pour certains des citoyens désespérés »

Plus loin, un homme de 63 ans au polo rose l’interpelle également. Électeur France Insoumise, Bruno Josselme se montre critique du bilan d’Emmanuel Macron.

« J’ai travaillé toute ma vie comme cadre technique, vous n’imaginez même pas ce qu’on a fait comme gain de production. Tous ces gains, ça va où ? Ça profite à qui ? On nous dit de travailler jusqu’à 65 ans, mais je ne me vois pas dire ça à ma fille. »

Thomas Rudigoz rétorque, avant de saluer le retraité et de poursuivre son chemin :

« Il est pas mal notre bilan, monsieur ! Qu’il y ait plus de distribution c’est une chose, mais ce que veut faire Jean-Luc Mélenchon, c’est confiscatoire. »

Présomption d’innocence et #Metoo

Contesté pour son vote sur l’AAH, Thomas Rudigoz l’est aussi – avec 167 autres députés LREM – pour sa signature d’une tribune en 2020. Intitulée « La justice ne sera plus rendue si accusation vaut condamnation », les députés y défendent la présomption d’innocence et le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, accusé de viol par deux femmes.

Depuis, des accusations de viol et tentative de viol pèsent également sur le ministre des Solidarités, Damien Abad (ex-LR). Thomas Rudigoz dit rester sur la même position qu’en 2020 : faire primer la présomption d’innocence tant qu’une condamnation n’a pas été prononcée.

Il dit cependant avoir été « très embêté » que Jérôme Peyrat, condamné par la justice pour violence conjugales, soit investi par son parti en Dordogne, avant de retirer sa candidature face à la polémique.

« Il faut être intraitable sur des personnes qui sont condamnées, je pense que c’est une bonne décision qu’un candidat condamné pour violences conjugales soit écarté. »

Plutôt Nupes que RN ? « Sans ambiguïté » mais avec nuance, Thomas Rudigoz tranche

Cette position entre-deux, Thomas Rudigoz l’a aussi sur les duels Nupes/RN. Dans sa majorité, la position à tenir a été plus que floue ces derniers jours : au « cas par cas », « aucune voix au RN », rassemblement des deux partis sous le même terme des « extrêmes ». Thomas Rudigoz fait l’équilibriste. Il commence par refuser de qualifier la Nupes d’extrême :

« Je me suis toujours battu contre le Rassemblement National, je n’aurai aucune ambiguïté là-dessus. Je ne renverrai pas la Nupes dos à dos avec le Rassemblement National, car dans la Nupes il y a des véritables démocrates. »

Mais, fidèle aux éléments de langage qui circulent dans son camp depuis le début de la campagne, il fustige « l’autocrate en puissance » Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise qu’il juge prompts à céder au « communautarisme ».

Une militante se charge de la communication, prenant des photos et des vidéos du candidat aux législatives Thomas Rudigoz.Photo : Marie Allenou/Rue89Lyon

Thomas Rudigoz, un député ciblé par l’extrême droite à Lyon

Le député a aussi été pris pour cible deux fois lors de l’exercice de son mandat. Après avoir voté pour la mise en place du pass sanitaire, des menaces de mort lui ont été adressé par des anti-pass. En 2020, des identitaires avaient ciblé son local de campagne pour les métropolitaines par des tags et des affiches. Un procès devrait avoir lieu début 2023.

L’un des mis en cause dans cette affaire de dégradation, Adrien R., de son pseudo Adrien Lassalle, a été condamné lundi 13 juin à 18 mois de prison dans une autre affaire d’attaque au couteau. Thomas Rudigoz réagit :

« Ça montre la dangerosité de ces gars-là, ce sont des fachos de la pire espèce, il faut continuer le combat. » 

En 2019, le député avait travaillé avec une commission d’enquête sur les groupuscules d’extrême droite pour rendre un rapport sur le sujet. Depuis le centriste s’est investi pour faire fermer les deux anciens locaux de Génération identitaire, rouverts en septembre 2021. Ils sont situés dans sa circonscription, au cœur du Vieux Lyon (5e).

Économie ou sécurité : son horizon en cas de victoire aux législatives

Dans l’hémicycle, Thomas Rudigoz est un député plutôt assidu, sans figurer parmi les plus investis de son groupe ou de l’hémicycle. Il fait partie membre de la commission des lois, qui s’occupe de rédiger – entre autres – des proposition de lois sur les libertés publiques, la sécurité, les lois constitutionnelles ou encore les collectivités territoriales.

S’il est élu pour un second mandat, Thomas Rudigoz hésite :

« J’envisage de retourner à la commission des lois car j’aimerai porter un nouveau texte sur la police municipale, pour leur donner plus de prérogatives, parce que nous ne sommes pas allé assez loin avec loi sécurité globale. Mais j’aimerai aussi plus m’investir sur l’économie. »

Un intérêt qui lui viendrait de ses contacts avec « des entreprises du pôle santé à Gerland » pendant la crise sanitaire ou encore de ses échanges avec le secteur de la métallurgie. Le député voudrait aider à alléger les « lourdeurs » administratives et procédurales en France pointées par les acteurs de ce secteur. En continuité avec la ligne économique libérale menée par son parti depuis 2017.


#1ère circonscription du Rhône

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Photo : Marie Allenou/Rue89Lyon

Photo : www.b-rob.com

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