Il raconte la gloire des Verts dans les années 70, où l’on venait de Lyon supporter Saint-Étienne, jusqu’à aujourd’hui, où les plus jeunes préfèrent désormais soutenir Lyon ou le PSG. Nous avons recueilli son témoignage.
« Dans les années 70, les gens venaient de Lyon supporter Saint-Étienne ! »
« J’ai 54 ans et je suis supporter de l’ASSE depuis que je suis tout gamin. Je me souviens, j’habitais dans un petit village d’Ardèche. En 1976, j’avais 8 ans et le maillot vert de Manufrance. Mon père n’était pas spécialement fan de foot mais il regardait les matches de l’ASSE. Moi, j’avais le droit de regarder le premier quart-d’heure avant d’aller me coucher.
J’étais comme un fou devant la télé !
A l’époque, Saint-Étienne était au top du foot français, c’était presque le seul club qu’on voyait à la télévision. Il avait une dimension européenne, il représentait le renouveau du foot français. Il portait aussi les valeurs ouvrières et de fidélité. Dans les années 70, les gens venaient de Lyon supporter Saint-Étienne !
Plus de 40 ans plus tard, je suis aujourd’hui président de l’un des groupes de supporters de l’ASSE : l’Union des supporters stéphanois (USS), qui est issue d’une scission des Associés supporters (AS).
C’est la 4e relégation de l’ASSE en ligue 2 que je vis : 84, 96, 2001 et maintenant 2022. Le problème c’est qu’on sait quand on descend, mais jamais quand on remonte. Beaucoup de supporters s’y attendaient, mais on croyait quand même au maintien. Après tout, le vert est la couleur de l’espoir !
« Tout le monde sait que tant que l’ASSE tourne, il y aura du monde dans les bars et les restaurants stéphanois »
Cette 4e relégation, moi je ne m’en remets pas. La saison a été catastrophique et avec cette relégation en ligue 2 on va se retrouver dans des villes qui ne font pas rêver, avec moins de supporters… Je pense que le club a loupé le palier des années 2010-2015 où le foot a beaucoup changé avec les investissements qataris dans des clubs pour les faire perdurer en ligue 1.
Il y avait déjà un déficit structurel qui a explosé et le club a été obligé de vendre de jeunes joueurs prometteurs comme William Saliba qui joue aujourd’hui à l’OM… Nous avons écopés de plusieurs sanctions et de matches à huis-clos ce qui crée aussi un manque à gagner.
Pour le club en lui-même, cette relégation est catastrophique. Si la vente ne se fait pas, ils seront obligés de licencier des salariés, qui sont actuellement au nombre de 300 environ. Au niveau de la ville de Saint-Étienne, l’ASSE attire des touristes qui viennent voir le stade, le musée des Verts…
Tout le monde sait que tant que l’ASSE tourne, il y aura du monde dans les bars et les restaurants stéphanois. La mémoire de l’époque de gloire des années 70 reste. L’ASSE c’est une histoire, un patrimoine, presque une légende du foot.
« Aujourd’hui, Saint-Étienne ne fait plus rêver les jeunes qui préfèrent soutenir Lyon ou le PSG »
L’image du club est entachée par les incidents qu’il y a eu le 29 mai après le match contre Auxerre qui a signé la relégation de l’ASSE en ligue 2. En plus, c’est arrivé le lendemain des incidents au Stade de France donc je pense que les sanctions vont être lourdes. Au lieu de s’attaquer aux fautifs en particulier, ils punissent tout le monde. On va encore perdre des adhérents… Le papy qui emmène son petit-fils voir les matches sera puni aussi.
Je fais aussi partie de l’Instance nationale du supportérisme (INS) [installée au ministère des Sports depuis 2017, l’INS vise à renforcer le dialogue avec les supporters dans le cadre de la lutte contre le hooliganisme, ndlr]. On a mis en place des groupes de travail sur la gestion des supporters : référents supporters, tribunes debout sécurisées, pyrotechnie encadrée…
Nous avons aussi travaillé par le biais de la fondation « Daniel Nivel » à la mise en place de policiers référents, locaux, dans quelques clubs. A la prochaine saison, il y en aura huit répartis dans des clubs de ligue 1 et 2, dont un pour l’ASSE.
Il y a un déclin certain chez les supporters. On est environ 700 cette année à l’USS, contre 1700 il y a dix ans. Aujourd’hui, Saint-Étienne ne fait plus rêver les jeunes qui préfèrent soutenir Lyon ou le PSG, et les rangs des supporters vieillissent.
J’ai trimballé mes enfants de match en match mais ils ne sont pas prêts à reprendre le flambeau. Sauf peut-être ma fille de 21 ans… »
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