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Sytral : les écologistes prêts à enterrer la gratuité totale des TCL

Le Sytral a vu ses recettes, provenant notamment des usagers, fortement chuter avec la crise du Covid. Lors d’un débat sur les grandes orientations budgétaires qui a eu lieu ce mercredi, la gratuité que certains élus au sein de la majorité à la Métropole de Lyon appellent de leurs vœux, semble écartée par Bruno Bernard

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Déconfinement dans le métro De Lyon TCL

, au contraire de ce que certains de ses partenaires à gauche réclament.

La crise du Covid a considérablement touchée les réseaux de transports en commun, celui des TCL à Lyon et dans la métropole ne fait pas exception. Mercredi 9 février, Bruno Bernard, président EELV de la Métropole de Lyon et du Sytral, devenu AOMTL, qui gère les TCL et les transports dans le département, a rappelé certaines de ses conséquences financières.

« Pour 2021, les recettes provenant des usagers des TCL auraient dû rapporter 262 millions d’euros selon la tendance observée jusqu’en 2019. Elles n’ont rapporté que 194 millions. Moins 66 millions c’est très important.»

Une baisse qui fait suite à une année 2020 et ses multiples confinements, elle aussi beaucoup moins rémunératrice pour les TCL. Lors du débat d’orientation budgétaire du Sytral, une attention particulière a donc été portée aux projections d’évolution du trafic. Et à travers lui d’une partie des recettes « billetterie » qui représentent environ 30% des recettes totales.

5 ans pour retrouver une fréquentation des TCL équivalente à celle d’avant la crise ?

L’exécutif du Sytral, autour de son président écologiste Bruno Bernard, table sur des projections qu’il juge prudentes. Les élus estiment à 5 ans la perspective permettant de retrouver une fréquentation du réseau TCL équivalente à celle de 2019. Soit en 2024. D’ici là, les recettes des usagers, s’ils reviennent petit à petit plus nombreux, pourraient croître. Mais elles resteraient inférieures à celles d’avant la crise.

D’autant que depuis leur arrivée aux manettes de la Métropole de Lyon et du Sytral, les écologistes ont mis en place une politique tarifaire sociale nouvelle. Sous conditions de revenus, certains usagers bénéficient dorénavant d’une gratuité totale ou bien d’un abonnement mensuel de 10 euros. Le prix de l’abonnement étudiant a par ailleurs était abaissé.

Environ 60 000 usagers bénéficient d’un abonnement gratuit, 90 000 d’un abonnement à 10 euros par mois et près de 100 000 abonnements étudiants ont été souscrits à ce jour. Ces chiffres de souscription confortent l’exécutif dans l’idée que ces mesures étaient nécessaires. Même si « elles rajoutent à la baisse des recettes usagers ».

Tramway à Lyon. Crédits : SS/Rue89Lyon.

Développer les transports en faisant payer davantage les entreprises ?

Comment compenser ce manque à gagner ? L’État a versé des aides au Sytral. Ce dernier, d’ici 2026, va par ailleurs emprunter un peu plus fortement. Maintenant que son périmètre s’est élargi, il compte aussi davantage de territoires qui sont autant de nouveaux contributeurs à son budget. Mais pourront-elles dans le futur augmenter leurs contributions ?

« Aujourd’hui, si nous voulons augmenter notre contribution au Sytral, comme nous n’avons presque plus de levier fiscal dans nos collectivités, il faut trouver des marges de manœuvre sur d’autres secteurs comme la petite enfance, le sport et ce sont des déchirements. »

Virignie Chaverot, vice-présidente du Sytral et conseillère communautaire des Pays de l’Arbresle

Reste l’évolution d’un source très importante de recettes : le versement mobilité apportée par les entreprises. Depuis la crise, ce dernier a baissé. Si les proportions sont moindres que pour les recettes usagers, elles sont malgré tout significatives. Portant le manque à gagner en 2021 à 100 millions d’euros au totale (billetterie usager + versement mobilité) par rapport à la période 2015-2019.

Faut-il alors l’augmenter ? Le Sytral semble s’engager dans cette voie. Virginie Chaverot, vice-présidente du Sytral et représentante de la communauté de communes des Pays de l’Arbresle a toutefois alerté sur le niveau de performance de l’offre de service à proposer en contrepartie.

« Cela va être très impactant pour nos entreprises. La prospective pourrait prévoir le doublement voir plus du versement mobilité. Aujourd’hui elles ne s’y opposent pas. Mais cette hausse devra nécessairement être corrélée au développement de l’offre »

Rame de métro de la ligne B dans la station Jean Macé à Lyon. Photo Mélany Marfella/Rue89Lyon

Bruno Bernard et les écologistes pas très chauds pour la gratuité totale des TCL

Au sein de la majorité métropolitaine, certains portent l’idée d’une gratuité totale des transports en commun. C’est le cas notamment des élus Insoumis. Laurence Boffet, élue du Sytral et conseillère métropolitaine issue des listes Lyon en commun (proches LFI), a plaidé pour un débat sur la question.

Le débat d’orientation budgétaire n’est pas la seule occasion de remettre le sujet sur la table. Entrée, doucement, en vigueur, la ZFE et son déploiement occupent une partie des débats à la Métropole de Lyon et dans les communes du territoire qui discutent ces temps-ci de son possible élargissement. La Ville de Lyon a organisé des conseils d’arrondissements sur le sujet avant un conseil municipal extraordinaire.

Les deux mesures sont pour certains liées. Le développement de l’offre de transports en commun devient nécessaire à l’heure où des restrictions de circulation des véhicules des particuliers se préparent. L’incitation à prendre les transports en commun doit donc s’envisager à leurs yeux par la gratuité des transports en commun. À l’image de ceux du 7e arrondissement de Lyon, les élus Insoumis ont redit à l’occasion des débats sur la ZFE, leur volonté de mettre en place cette gratuité des TCL à Lyon et sa métropole.

Au cours des rapides débats, Bruno Bernard et Jean-Charles Kohlhaas, vice-président du Sytral et de la Métropole de Lyon en charge des transports et des mobilités, ont plutôt fermé la porte à cette possibilité.

« 262 millions d’euros de recette (montant des recettes usagers théoriques en 2021 s’il n’y avait pas eu la crise, ndlr), on voit bien qu’on ne peut pas s’en passer. Ce n’est pas le versement mobilité qui a permis de financer les mesures de gratuité et la tarification sociale mais l’augmentation de la contribution de la Métropole de Lyon au Sytral. »

Bruno Bernard, président du Sytral et de la Métropole de Lyon

Le débat n’est pas totalement fermé. Mais entre une opposition qui n’en veut pas et la principale force de la majorité sur la même ligne, la mesure semble avoir peu de chance de voir le jour.

« La baisse du trafic nous a fait ralentir le développement du réseau et de son exploitation. Il faudra se poser la question de l’impact de la gratuité. On peut organiser un débat. Moi, ça fait 20 ans que j’en débats, de la gratuité dans les transports. Je suis très peu convaincu par la mesure. »

Jean-Charles Kohlhaas, vice-président du Sytral et de la Métropole de Lyon en charge des transports et des mobilités

Sur ces questions, la majorité de Bruno Bernard constituée aussi de sympathisants LFI pourrait-elle se fissurer ? Au sein des conseils d’arrondissement à Lyon, dans les 7e et 8e, des élu·es issues des listes « Lyon en commun » (proches LFI) et membres des majorités ont de nouveau réclamé la gratuité totale des transports, comme facteur indispensable de la lutte contre la pollution et la mise en place de la ZFE (zone à faibles émissions).


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