Vous reprendrez bien un peu de visio-conférence ? Ce lundi 20 septembre se tenait la première réunion publique autour du projet de zone à faible émission (ZFE) de la Métropole de Lyon. La toute première pierre de la concertation de l’automne, avant d’autres prévues sur les projets de métro, sur le téléphérique de Sainte-Foy-lès-Lyon… En somme, la première étape d’un marathon de démocratie participative pour l’exécutif écologiste de Bruno Bernard, élu depuis juin 2020.
Dans nos écrans, plusieurs élus, quelques techniciens de l’institution, et des modérateurs présentent sur le plateau les principaux points du dossier. De notre côté, autour de 90 personnes participent à l’envi, aux débats dans un tchat interactif.
Avantage de l’exercice : probablement la clarté du propos. L’intervention est plutôt structurée pour un sujet complexe. Comparée à d’autres exercices connus durant le confinement, la séance ne souffre pas de soucis techniques notables. De plus, l’activité de trois modérateurs dans le tchat permet à certaines questions (pratiques) de trouver des réponses rapides. Une dizaine de personnes (souvent les mêmes) ont pu ainsi poser leur question sans la barrière d’une prise de parole en public, parfois intimidante. En ce sens, difficile d’imaginer une réunion avec autant de réponses en « présentiel ».
Réunion de concertation de la ZFE : un nombre de participants insuffisants
Réel hic : la (très) faible participation. Avec seulement 90 personnes présentes, on est loin des 400 internautes de la réunion publique, également en visio, sur le PLUH le 13 avril dernier alors que le sujet est au moins, si ce n’est plus, aussi crucial.
Est-ce la faute à la visio ou à une mauvaise communication de la part de la collectivité pour cette première réunion ? Le chiffre est en tout cas mauvais. D’autant qu’on retrouve dans les 90 participants une bonne proportion d’élus. Le tchat est ainsi ponctué d’interventions de politiques, tels que Pierre Alain-Millet (groupe communiste et républicain à la Métropole, appartenant à la majorité). Ou de l’opposition comme le député Modem Cyrille Isaac-Sibille qui s’autorise même à « troller » en faisant la promotion du projet de métro E, pour l’instant mis de côté par l’exécutif écologiste. Un sujet sur lequel une autre concertation est prévue en automne.
Le lendemain, les différents groupes de la majorité, à l’occasion d’une rencontre avec une poignée de journalistes, admettront que cette participation aura été « insuffisante ». C’est l’avis de Benjamin Badouard (EELV), co-président du groupe des écologistes à la Métropole. Lequel a sous-entendu qu’il faIlait améliorer « les outils de communication » pour se faire entendre et comprendre de la population.
La « co-construction » d’une ZFE autour de Lyon avec deux périmètres
En attendant, sur un sujet « sensible », pour reprendre les termes de Laurence Boffet, vice-présidente de la Métropole en charge de la participation et des initiatives citoyennes, les élus ont voulu marquer l’importance d’y aller progressivement. « Notre objectif sera d’aller un peu plus loin, et un peu plus vite que la loi », souligne Jean-Charles Kohlhaas, vice-président de la Métropole en charge des déplacements, intermodalités et de la logistique urbaine.
Après une rapide introduction du président de la Métropole Bruno Bernard (EELV) qui a ensuite disparu, c’est donc son VP aux déplacements qui a pris la charge de répondre à la plupart des questions des internautes.
Deux périmètres et deux calendriers vont donc être créés. Le premier, plutôt avancé, se basera sur la ZFE existante, entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Le deuxième pourra concerner un périmètre plus étendu. Il pourra s’étendre sur un territoire prenant la rocade Est, voire, englobant tout le territoire de la Métropole. Prudents, les élus avancent peu d’éléments sur le sujet. La sortie des véhicules diesels de la ZFE actuelle d’ici 2026 pourrait déjà créer des remous.
« Je ne vais pas vous dire comment l’on va procéder, puisque cela sera construit avec vous », veut rassurer Jean-Charles Kohlhaas (EELV).
Reste qu’il faudra avancer. Selon lui, 60 % des déplacements en véhicules dans la métropole se feraient pour des trajets de moins de trois kilomètres.
« Est-ce qu’on ne pourrait pas baisser ces déplacements en les remplaçant par des modes actifs ? Du vélo ? De la marche à pied ? », suggère-t-il.
De l’autre côté de l’écran, l’inquiétude sur la fin de la voiture
La volonté clairement affichée de sortir la voiture (thermique) a suscité au mieux des questions, au pire l’énervement.
« Combien de centrales nucléaires pour changer le parc en véhicules en électriques ? », s’agace un internaute.
Un autre enchaine :
« C’est ça, on a donc besoin d’une bagnole trois fois par mois ??? [Sic] Je dépose chaque matin mon gamin dans une crèche situé à trois kilomètres de chez moi, je vais bosser de l’autre côté de la Métropole et deux fois par semaine, je fais du sport en soirée dans une ville située à huit kilomètres de mon domicile… »
De même, la situation des plus démunis et des classes moyennes, dépendantes de leurs véhicules, a interrogé les internautes.
Des questions qui en amènent d’autres : pourquoi ne pas rendre les transports en commun gratuits ? Comment prendre le vélo quand on se le fait voler ? Etc.
ZFE à Lyon : la question sociale au centre des débats
En face, Jean-Charles Kohlhaas (EELV) reprend les interrogations en égrenant les mesures phares de la Métropole. Mise en place d’un parc sécurisé pour le stationnement des deux-roues, développement des pistes cyclables et notamment du réseau express vélo… L’élu essaie de faire le tour des inquiétudes et oppositions.
« Sur les aides au changement de véhicule, l’objectif sera d’accompagner tous ceux qui en ont vraiment besoin. […] Si vous me dites : je ne suis pas très riche, mais j’ai des transports en commun en bas de chez moi, je vous dis non [pour une aide]. En revanche, je vous dis que l’on va vous mettre un dispositif d’auto-partage pour que vous puissiez partir quand vous en avez besoin. »
Idem sur la gratuité. L’élu met en avant les besoins en moyens et recettes pour les investissements du Sytral. Ils rappellent qu’une tarification sociale a déjà été mise en place. Près de 130 000 personnes, faisant partis des plus démunies, ont accès gratuitement aux TCL.
Des débats à prévoir jusqu’au sein de la majorité de la Métropole de Lyon
« Là-dessus, nous avons des divergences », commente Laurence Boffet, membre du groupe politique « Métropole en commun ».
Celle qui a été une des têtes de liste de Nathalie Perrin-Gilbert défend cette gratuité, « mais pas pour tout de suite ».
Pour elle, un certain nombre de professionnels n’ayant pas les moyens d’acheter un véhicule pourront être candidats à la dérogation. « Il faut faire attention à des situations qui mettront en difficulté certains. »
Une manière de rappeler que des débats auront lieu, sur ce sujet, même dans la majorité. Beaucoup craignent les conséquences sociales que pourraient avoir ce projet, même au sein de certaines associations écologistes partisanes de la ZFE.
Malgré les nombreuses réponses apportées, la réunion semblait avant tout une ouverture à d’autres interrogations. Fin de la voiture en ville, développement des transports en commun… C’est le modèle d’une ville aux facettes nouvelles qui est en jeu.
« On a besoin de discuter, de voir vers quoi on se projette et comment on le fait », rappelle ainsi Laurence Boffet.
Pour cela, tout est annoncé comme « co-construit ». L’initiative semble indispensable stratégiquement, pour faire adhérer les habitants à un projet, à première vue, impopulaire. Pour cela, il faudra cependant aller chercher plus de 90 personnes sur un territoire comptant 510 000 foyers. La concertation prendra fin le 5 février.
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