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Ateliers pour parents à Lyon : « Je suis retourné à l’école pour apprendre à être père »

[Série] On ne naît pas parent, on le devient. Un père de famille d’une quarantaine d’années défend la nécessité pour les parents d’apprendre le métier de père ou de mère. A Lyon, de nombreux ateliers, rencontres, conférences et autres formations existent pour les parents. Jérôme (prénom d’emprunt) a, lui, suivi durant quatre mois, les ateliers du cycle « Vivre et grandir ensemble ». Il témoigne.

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Ateliers pour parents à Lyon : « Je suis retourné à l’école pour apprendre à être père »

« Je suis un papa de quarante ans, heureux avec ma compagne et notre fille de cinq ans. J’exerce un travail, certes un peu stressant, mais qui me plaît.
J’ai lu quelques livres sur les enfants : Marie Thirion, Isabelle Filliozat, notamment.
Je ne donne pas de fessée à ma fille, je ne l’humilie pas en la mettant au coin et je ne considère pas qu’elle fait un caprice quand elle est en colère.
Bref, je me considérais comme un père moderne qui sait faire.

« Je parle de politique et de sport plutôt que d’enfants avec mes potes »

Ce bel agencement s’est grippé quand ma fille a commencé à ne plus vouloir que la prenne dans mes bras :

« – Est-ce que je peux te faire un câlin ?

– Non »

Ça m’a rendu immensément triste.

Je voyais ma compagne la dorloter, l’entourer, la protéger. Et moi, chaque jour, j’essuyais un non catégorique.
Je n’allais pas la forcer. Comment faire pour être heureux avec ma fille ?
Quand ma compagne m’a parlé d’ateliers pour échanger entre parents à Lyon, ça m’a intéressé. Mais c’était loin de moi.

Je suis un mec qui parle de politique et de sport plutôt que d’enfants avec ses potes.
J’ai finalement franchi le pas. Et je ne le regrette pas. Bien au contraire.

« Avant ces ateliers pour parents, je ne m’étais jamais posé cette question basique : comment satisfaire au mieux tous les besoins de ma fille ? »

Evidemment, j’étais le seul papa au milieu de cinq mamans.
La première séance était consacré à l’art de l’écoute. En binôme, il fallait particulièrement répondre à la question « Quelle est la phrase de votre enfant qui vous fait souffrir ? » Pour moi, c’était ma fille qui disait « non » à mes câlins.

Pour la semaine suivante, nous devions observer les besoins de notre enfant et aussi les nôtres et les noter.
Je ne m’étais jamais posé cette question basique : comment satisfaire au mieux ses besoins physiologiques et affectifs ? En tant que parent, comment être à l’écoute de ses besoins et que ma fille soit connectée aux siens ?
Pour être bien, mon enfant et moi, on a besoin de quoi ? Comment on remplit notre « réservoir affectif » ? J’ai listé, listé et encore listé.

Lors de l’atelier sur le jeu, j’ai appris que c’est un moment essentiel dans la relation parents/enfants. J’ai alors compris que quand ma fille venait davantage me chercher pour jouer que ma compagne, elle me témoignait une forme d’affection aussi importante que les câlins que je mendiais. C’était une autre façon de manifester son amour.

Aux ateliers sur les colères, les limites et les règles, j’ai pris conscience que je criais trop sur ma fille. Par exemple, quand elle tardait à venir manger et qu’elle repoussait les légumes que j’avais préparés.
Après une journée de boulot pour moi, et d’école pour elle, la colère montait. Je criais et parfois je l’envoyais « réfléchir dans sa chambre ».
J’ai appris qu’on appelle cela des « violences éducatives ordinaires ».

La colère, c’est ma colère qu’il faut que je gère et que j’évacue. C’est moi qui doit me calmer et pas ma fille.
J’ai aussi appris à lâcher prise : à l’âge de ma fille, on ne contracte pas de mauvaises habitudes, elle aura le temps de se fondre dans la norme sociale.

Photo d’illustration. CC Volodymyr Hryshchenko/Unsplash

« En réactivant un traumatisme de notre propre enfance, les enfants nous donnent la possibilité de guérir nos blessures »

Ces ateliers pour parents que j’ai suivis à Lyon ne sont pas des séances de psy.

J’ai avant tout appris que les plus grands psys, ou tout du moins les plus nombreux, sont les enfants, car ils ont le don de mettre le doigt là où ça fait mal. Ce qui nous pousse à regarder notre passé. En réactivant un traumatisme de notre propre enfance, ils nous donnent la possibilité de guérir nos blessures, petites ou grandes, qui peuvent nous pourrir la vie.

J’ai aussi appris un brin de physiologie et un soupçon de psychologie. J’ai compris qu’un enfant de moins de huit ans a généralement peu de contrôle sur ses émotions et qu’il a besoin de décharger, par des pleurs et des colères que l’on doit accueillir. Si son comportement est inapproprié, il faut chercher le besoin non satisfait qui est derrière.

Cette démarche demande beaucoup d’observation, d’écoute et d’imagination.
Car, naturellement, il n’y a pas de mode d’emploi distribué à la fin des ateliers.
C’est par les échanges avec les autres parents qu’on avance.

« Pourquoi je me mets en colère quand ma fille renverse son jus de pomme à l’apéro alors que pour Christelle ça ne lui fait rien ? Pourquoi Christelle ne supporte pas quand son fils rote à table alors que moi ça me fait rigoler ? »

Nous réagissons différemment en fonction de notre histoire.
On peut faire ce travail réflexif en échangeant avec Pierre, Paul ou Jacques. Mais le mec que je suis a peu d’espace de discussion pour ça.

Et puis, c’est mieux d’avoir une personne qui propose des thématiques, anime les échanges et apporte des notions de psychologie et des conseils de lecture.

« Papa va à l’école des parents pour apprendre à être père. »

Ces ateliers ont été essentiels pour moi.
Quand les mercredis, j’annonçais à ma fille que le soir, je serais pas là, je lui disais :

« Papa retourne à l’école, celle des parents, pour apprendre à être père. »

Je ne sais pas si je suis un « meilleur papa ». Mais j’ai montré à ma fille que je faisais des efforts. Ça permet certainement de réparer le lien.

Aujourd’hui, quand je sens la colère qui monte, je crie dans un oreiller ou je sors sur le balcon prendre du recul.

Surtout, je ne suis plus à cran sur les marques d’affection que ma fille ne me donne pas.
Et, ô miracle, elle me fait beaucoup plus de câlins.


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