en élémentaire, les camarades de sa fille issus de classes moyennes ou supérieures étaient encore scolarisés dans le public, nombreux sont les élèves à partir dans le privé en sixième. Floriane se demande « si le public, pour l’entrée au collège, est devenu un vrai choix ». Nous publions son témoignage.
« Depuis plus de 10 ans j’habite, avec ma fille, un agréable quartier dans le 7ème arrondissement de Lyon. Alors que le collège de secteur pour l’entrée en sixième me semblait être la suite logique d’une scolarité de primaire dans le public dans ce quartier, il apparait qu’il n’en est rien pour la majorité des enfants et parents que je côtoie depuis la petite section de maternelle.
En effet moins d’un tiers des élèves de CM2 de l’école primaire se retrouveront dans cet énorme collège du 7ème qui traine une mauvaise réputation depuis longtemps.
« Discrètement ont commencé les discussions sur les collèges privés du quartier »
A vrai dire jusqu’en CM2, je ne me posais pas la question du « choix » du collège pour ma fille tant la scolarité dans l’école primaire du quartier avait répondu à toutes mes attentes : belle équipe pédagogique, mixité sociale et parents d’élèves devenus des ami·e·s…
Et puis discrètement ont commencé les discussions sur les collèges privés du quartier et leurs délais d’inscriptions très courts ou sur les rumeurs d’insécurité portant sur le collège de secteur. Et petit à petit j’ai vu mes ami·e·s et parents proches, pour des tas de raisons différentes, pas toujours avouées, inscrire leurs enfants à l’entretien d’entrée des collèges privés.
C’est plus souvent l’éloignement de ce fameux collège de secteur du lieu d’habitation, l’encadrement des enfants, ou plus rarement, l’absentéisme dans le public qui sont évoqués, mais jamais celle de la qualité de l’enseignement ou de sa « mauvaise » fréquentation ou autres questions d’insécurité.
« Comme si le collège public, à Lyon 7ème, qui aurait dû être l’option majoritaire devait faire, comme les collèges privés, les preuves de sa qualité »
J’ai passé aussi des mauvaises nuits à me demander si mon choix du public par conviction personnelle n’aurait pas des conséquences pour le bien être de ma fille au collège (dont je garde personnellement des souvenirs plutôt mitigés comme beaucoup semble-t-il) et sa scolarité, me retrouvant plutôt isolée dans ce choix dans mon cercle de parents-amis.
Et puis nous sommes allées aux portes ouvertes d’avant Covid de ce collège où des élèves de 3ème rayonnants et motivé·e·s nous ont fait visiter le collège. J’ai interrogé les voisins et leurs enfants en cours de scolarité dans ce collège, tou·te·s satisfait·e·s. Seule revenait la critique de la taille de cet énorme paquebot aux 11 sixièmes. L’institutrice de l’école primaire elle aussi s’étonnait de cette réputation faite à ce collège dont elle voyait pourtant revenir ravi·e·s ses anciens élèves.
Des parents d’élèves étaient également présents à la réunion de présentation du collège dans l’école primaire pour attester que, oui, il était possible de survivre, et même heureux dans le collège du secteur, comme si l’obligation de la preuve s’était inversée et que le public qui aurait dû être l’option majoritaire devait faire, comme les collèges privés, les preuves de sa qualité.
« Nous considérons que l’apprentissage d’un enfant à vivre en société se fait dans des lieux de mixité sociale et ethnique »
Alors, avec deux autres familles motivées (militantes ?) nous avons décidé de mettre nos enfants dans le collège du quartier, et histoire de rassurer nos enfants (et nous aussi par la même occasion ?) de demander à ce qu’ils et elles soient dans la même classe, histoire de faire ce fameux trop long trajet (on parle de 20 minutes !) ensemble par exemple.
Nous considérons, entre autres, que l’apprentissage d’un enfant à vivre en société se fait dans des lieux de mixité sociale et ethnique.
En cette rentrée, il m’arrive encore d’être traversée par des doutes, mais plus furtifs, et j’attends donc de voir ce que l’avenir nous réservera.
Il me reste, aussi, une sorte de tristesse de vivre cet abandon de l’école publique par certaines classes sociales, dans un quartier et une ville où il fait plutôt bon vivre. Je suis peinée par ce clivage qui se fait de plus en plus tôt, me semble-t-il, nous éloignant un peu plus d’un mirage du vivre ensemble…
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