vit à Lyon. Rencontre.
TKR a seulement trois ans quand il commence à jouer aux jeux vidéo. 18 ans plus tard, en 2016, à 21 ans, il devient joueur professionnel, après avoir participé à de nombreuses compétitions sur Street Fighter 5.
« À la base, je n’allais pas dans les compétitions pour performer mais pour rencontrer du monde. Les jeux de combat sont des jeux qui se jouent offline donc on y allait pour voir du monde et jouer contre plus fort que soi ».
D’abord sponsorisé par Gamespirit (un magasin de jeux vidéo lyonnais), il se fait recruter par l’équipe américaine Envy, pour participer à la Gfintiy Elite serie.
« C’est la première équipe qui me proposait de l’argent donc je n’ai pas cherché plus loin ».
Son choix est couronné de succès, puisqu’il remporte cette compétition en 2018. A cette époque, la Gfintiy regroupe plusieurs jeux différents (Rocket League, FIFA 19 et Street Fighter).
« Street Fighter était en test et c’est un des jeux qui a le plus marqué en termes de hype et d’ambiance ».
« 2000 euros par mois puis plus rien »
Cette effervescence n’a pas manqué d’attirer Vitality. L’une des principales équipes d’esport française, basée à Paris, recrute TKR pour la représenter lors de ce tournoi.
Le joueur change donc d’écurie, avec, à la clé, un salaire d’environ 2000 euros. Mais la réputation de la Gfintiy s’affaiblit vite et le tournoi est finalement annulé. Conséquence : Vitality met fin au contrat de TKR en juin 2019.
« La Gfinity a perdu en visibilité et a été arrêté. Vitality m’a gardé quatre mois et ils m’ont envoyé dans deux ou trois compètes. L’arrêt de la Gfinity a marqué la fin de carrière de beaucoup de joueurs en Europe. »
Pour TKR, c’est le début de mois de galère d’esportif.
« On aurait pu survivre fin 2019 car ils ont annoncé Street Fighter au JO. Je me suis fait recontacter par des équipes. Mais il y a eu le Covid. Depuis plus rien ou presque ».
« Je suis un professionnel en manque d’activité »
Cela n’a pour autant pas eu raison de sa passion. TKR se considère toujours comme joueur d’esport professionnel.
« Sachant qu’il y a encore des compétitions en ligne, et qu’il faut pas mal prouver sur ces compétitions-là. Je m’entraîne toujours et je fais partie du haut niveau. »
Il ajoute :
« Je me considère comme professionnel, mais pas au niveau financier. Je suis un professionnel en manque d’activité. »
Heureusement pour TKR, en parallèle de sa carrière d’esportif professionnel, il n’a jamais renoncé à son poste de technicien de maintenance dans la signalisation tricolore.
« J’aime énormément mon travail et ça ne m’empêche pas de faire mes compétitions. »
L’esport à Lyon sous Covid : « c’est catastrophique, horrible »
Quand on lui parle de la crise sanitaire, les mots qui lui viennent témoignent d’une période difficile : « Très très dur, catastrophique, horrible ». En tant que jeune père, il est propriétaire d’une maison à Vénissieux, disposant d’une pièce dédiée aux jeux vidéo, qu’il doit rembourser. Avec un CDI à côté, il n’a pas reçu d’aides de l’Etat pour le Covid en tant qu’esportif.
« J’ai pu m’en sortir pas mal entre la fin de mon contrat de 2019 jusqu’à mi-2020 où j’ai gagné une compétition. J’ai pu mettre de côté et investir dans un nouveau PC. »
Il pointe du doigt un milieu avec peu de protections.
« Aujourd’hui, quand tu fais des événements, tu en as très peu qui te paient en cachet. En tant que compétiteur, mis à part les marques qui font quelques contrats, tu n’as aucune sécurité de l’emploi. Moi, du jour au lendemain ils ont arrêté mon contrat ».
Il précise :
« Tu as beau être reconnu par les joueurs qui sont dans la niche, très peu de personnes reconnaissent ça comme étant un sport. Je te parle du sport du genre handball, basket, foot, rugby. Dans ces sports, les pros ont des contrats de genre deux ans que tu ne peux pas casser. Moi, j’avais un contrat de deux ans mais il y avait une petite ligne qui disait que s’il y a pas la compète, et bah t’es mort. »
Des parties diffusées sur Twitch
Aujourd’hui, si la situation n’est pas revenue à la normale, il participe toujours à des compétitions. Il finit régulièrement dans les premiers, mais ces compétitions, certes régulières, présentent des prix plus variables (de 60 euros, pour le premier, à 1000 euros). Il est aussi en catégorie A de la ligue Française de Street Fighter 5, la Supa Strong Championships. En complément, il diffuse aussi ses parties en direct sur Twitch.
Il propose également du coaching pour d’autres joueurs, pour un tarif variant entre 15 et 30 euros de l’heure.
Avec un entrainement avoisinant les 35h par semaine, tout cela lui permet de garder le niveau et de tirer quelques revenus.
« Sans évènementiel, c’est mort, il n’y a plus d’esport«
Âgé de 26 ans, TKR ne compte pas arrêter. Il reste toujours confiant pour l’avenir de l’esport. Et montre même une forme d’enthousiasme :
« On forme une communauté. La force que les gens te donnent, c’est comme une équipe de foot ! »
Il attend avec impatience la fin de la crise sanitaire et prédit un avenir radieux pour la discipline qui est mise en pause depuis plus d’un an.
« L’esport, c’est avant tout l’évènement et, sans évènementiel, c’est mort, il n’y a plus d’esport. La hype, c’est quoi ? La hype c’est voir l’Accor Hotel Arena rempli pour une compétition de League of Legends »
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