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Marche des libertés : les teufeurs ambiancent le cortège lyonnais

A Lyon, entre 1000 et 2000 personnes se sont réunies, ce samedi 30 janvier, pour une cinquième Marche des libertés, notamment contre la proposition de loi de sécurité globale. En soutien aux inculpés de la rave-party organisée le 31 décembre à Lieuron, les teufeurs ont ambiancé le cortège.

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Après un départ le 16 janvier de Villeurbanne, la Marche des libertés est repartie de la place Lyautey (Lyon 6ème) ©PL/Rue89Lyon

Moins de monde, plus de pluie, mais une manifestation, cette-fois ci, qui est allée jusqu’à son terme.

Ce samedi 30 janvier, 1000 personnes, selon la préfecture, 2000, selon les organisateurs, se sont retrouvées pour manifester contre les « lois liberticides », principalement contre la proposition de loi de sécurité globale.

Après l’arrêt brutal de la manifestation le 16 janvier par les forces de l’ordre, l’agacement des manifestants était encore palpable.

« Nous espérons cette fois pouvoir aller jusqu’au bout, grinçait au micro un membre de la Ligue des Droits de l’Homme, sur la place Maréchal-Lyautey (6ème arrondissement). Nous continuons à lutter contre le fichage, contre la loi de sécurité globale et contre la loi sur le séparatisme ! » 

Pour y parvenir, les organisateurs ont pu compter sur un trajet plus court. Contrairement à la dernière manifestation, partie de Gratte-ciel, le défilé s’est élancé de la place Lyautey pour rejoindre la place Bellecour en passant par les quais du Rhône et le pont de la Guillotière. Pour la troisième fois, la Marche de liberté empruntait ce parcours.

En amont, le préfet avait pris un énième arrêté d’interdiction de manifester. Une grande partie de l’hypercentre et la rue de la Barre étaient interdits aux manifestants. 

La manifestation est partie de Foch et non de Villeurbanne, comme le 16 janvier. Crédit : Pierre LEMERLE/Rue89Lyon

Les teufeurs venus en force

Après des prises de paroles de la Quadrature du net, de la Ligue des droits de l’Homme, des syndicats de journalistes, de soutiens aux sans-papiers, et d’un membre du comité de soutien aux inculpés de la Maskarade (la rave-party organisée le 31 décembre à Lieuron en Bretagne), le cortège s’élance à l’heure prévue, 14 heures. 

Parfois en tête, avec la banderole « plus de sons, moins de répression », souvent les plus bruyants, les teufeurs ont gonflé et considérablement rajeunis les rangs de la manifestation avec deux camions remplis d’enceintes.

Déjà présents le 16 janvier, les teufeurs semblent plus nombreux ce samedi, dans un cortège un peu plus maigre et de plus en plus hétéroclite où l’on compte également des familles de victimes de violences policières, des soutiens de sans-papiers ou des militants contre la 5G.

« J’étais déjà venu plusieurs fois pour manifester contre la loi de sécurité globale, commentait Alexie, 27 ans. Mais cette fois, j’ai amené une pancarte en soutien aux teufeurs. »

Sur celle-ci, on peut lire « Aubervilliers, les doigts dans le nez. Pour Lieuron, c’est la prison ». Une référence à une fête clandestine organisée récemment au commissariat d’Aubervilliers. Révélée par Loopsider, l’affaire a marqué les manifestants alors que certains membres de la free-party bretonne, organisée à Lieuron, risquent la prison. 

À l’avant un temps, au milieu, à l’arrière… Les teufeurs ont pris une place considérable dans la Marche des libertés lyonnaises. © PL/Rue89Lyon

« Il y a aussi des choses incompréhensibles. On empêche les gens d’avoir accès à la culture, mais on leur permet de faire les soldes. On prive les gens de liberté, mais on ne fait rien pour augmenter le nombre de places dans les hôpitaux… Le gouvernement ne cherche pas à régler le problème de fond. » 

« La manifestation permet aussi de se retrouver »

Un peu plus loin, trois amis sont également venus en soutien aux teufeurs de Rennes. À 18, 17 et 20 ans, Gianluca, Abel et Coralie ne comprennent pas qu’on puisse punir les organisateurs de la rave « plus que des pédophiles ».

« La manifestation permet aussi de se retrouver et de recréer du lien social, commente Abel, 17 ans. On ne s’était pas vu depuis longtemps. »

Gianluca, 18 ans, enchaîne :

« En amenant la free party au centre de Lyon, on montre que cette dernière n’est pas dangereuse. Les passants peuvent constater qu’on est là avant tout pour écouter du son. Il n’y a pas de risque. »

Anti-racistes et antifascistes étaient également présents dans le cortège. Crédit : Pierre LEMERLE/Rue89Lyon

Devant, les chants entonnés parfois sur des airs de supporters de foot, prédominent.

« Acab », « Police partout, justice nulle part », « tout le monde déteste la police (et la police déteste tout le monde) »… Ces slogans sont scandés à intervalle régulier.

Derrière, la musique techno rythme la manifestation, parfois, un poil chambreur. Sur le pont de la Guillotière, « Le sex appeal de la policère » de Sexy sushi résonne.

En tête, la banderole du collectif « non à la loi de sécurité globale » ouvre la marche, seulement précédé de quelques Gilets jaunes. Une dizaine de mètres plus loin, l’imposant dispositif policier garde, la plupart du temps, ses distances. « Le No man’s land a été respecté », constate un organisateur. 

« Il y avait plus de communication avec la police, commente Alexandre Buisine du Syndicat national des journalistes (SNJ). Ce dernier suppose également qu’il y a eu « moins de fauteurs de trouble ».

Les forces de l’ordre avaient barré la rue de la charité avec des barrières et canon à eau lors de la marche des libertés. Crédit : Pierre LEMERLE/Rue89Lyon

Les canons à eau et les lacrymos rue de la charité

Mis à part un arrêt au niveau de la préfecture, le cortège s’écoule sans encombre jusqu’à la place Antonin Poncet. C’est là qu’a lieu le seul véritable moment de tensions de la manifestation.

Avant d’arriver place Bellecour, le cortège passe devant la rue de la charité, barrée de protections de police, deux canons à eau en appui. Au milieu du cortège, quelques manifestants commencent à jouer avec l’eau coulant des canons. Les forces de l’ordre répondent en arrosant les personnes à portée. Dans la confusion, une bouteille en verre est lancée. Les gaz lacrymogènes répondent. 

« C’est encore arrivé après une provocation policière. C’est étonnant que les gens réagissent… », ironise Charles, un militant écologiste.

Venu pour lutter contre « la dérive autoritaire du gouvernement » et « sa façon d’agiter l’islamisme pour cacher de vrais enjeux », ce membre d’ANV Cop 21 a les yeux rougis par la lacrymo. Avec son masque aux couleurs d’Alternatiba, il est un des rares à afficher les couleurs d’un groupe écologiste. « On a oublié les drapeaux verts à la maison ! », plaisante-t-il.

Ils ne sont pas les seuls à être restés à la maison. Exceptée la CNT (confédération nationale du travail), rare sont les drapeaux de partis ou de syndicats, présents dans la manif. Un drapeau du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) par-ci, quelques uns de FO ou du mouvement Ensemble par-là … Les banderoles, les teufeurs et les parapluies ont pris le pas sur les drapeaux, ce samedi. Même quelques « GJ » ont laissé leur symbole à la maison.

« Je ne suis pas venu spécifiquement en tant que Gilet jaune, commente Nadia, venue sans sa veste fluo, ce samedi. De toute façon, nous sommes tous dans l’esprit des Gilets jaunes. Nous sommes tous là pour défendre nos libertés ! » 

Un bilan « calme » mais deux interpellations, d’après la préfecture

Contactée, la préfecture du Rhône a fait état d’un bilan « plutôt calme ». la police a tout de même procédé à deux interpellations pour des jets de projectiles sur les forces de l’ordre. Une a eu lieu avant 15 h, probablement au niveau de la préfecture, et une au niveau de la place Bellecour. Selon elle, l’usage de gaz lacrymogène a été justifié par des « tirs de mortier sur le forces de l’ordre ». La raison de l’utilisation des canons à eau reste inconnue. Le dispositif des forces de l’ordre n’a pas été détaillé. 

À 16h, le dernier morceau d’électro retentissait place Bellecour. Vers 17h, une bonne partie des manifestants s’étaient dispersés. Le prochain rendez-vous pourrait être le 6 mars prochain. Certains organisateurs espèrent effectuer une jonction avec le monde de la culture en lutte pour être reconnu comme « essentiel » et les féministes, avant la journée internationale des droits des femmes.


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