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[Festival] « Il ne faut pas avoir peur de la post-vérité », par Manuel Cervera Marzal

Le festival « (Re)faire société : mode d’emploi », organisé par la Villa Gillet, se veut comme un « festival des idées ». Poursuivant ainsi les précédentes éditions organisées sous le nom de « Mode d’emploi » et « La chose publique ». Le festival se tient à Lyon du 13 au 20 novembre. Rue89Lyon en est partenaire : nous publions les tribunes et productions éditoriales des invités de cette semaine de réflexion.

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Conférence au festival (re)faire société

Lisez la tribune de Manuel Cervera Marzal, philosophe, sociologue, chargé de Recherche au FNRS (Belgique). Il mène en ce moment une étude comparée de trois partis politiques européennes : Podemos, la France Insoumise et le Parti du Travail belge. Il participera le 20 novembre à une conférence intitulée « Post-vérité ».

Afin d’expliquer la montée des forces populistes – Trump, le Brexit, le Front national, Orban… – les experts invoquent à satiété l’avènement de la « post-vérité ». Ce concept est devenu la clé de résolution de toutes les énigmes. Il connaît une inflation galopante, couronnée par le titre de « mot de l’année 2016 » décerné par le Dictionnaire d’Oxford, lequel définit ainsi la post-vérité : « des circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d’influence pour modeler l’opinion publique que les appels à l’émotion et aux opinions personnelles ».

L’empire des fake news ?

Ceux qui utilisent cette notion considèrent que le monde est entré dans une nouvelle ère au cours des années 2000 : l’empire des fake news. Cette ère se caractérise selon eux par la multiplication des contre-vérités outrancières professées par les dirigeants politiques (séquence inaugurée par le flacon de Colin Powell censé prouver que l’Irak fabriquait des armes de destructions massives) et par l’indifférence des peuples à l’égard de la vérité. Duplicité en haut, crédulité en bas. Extrêmisme, complotisme et populisme seraient les preuves irréfutables que la vérité est en train de s’éroder.
Faut-il croire cette analyse ? Pas selon moi.

Il ne faut pas craindre l’avènement de la post-vérité

Cette notion, aujourd’hui très prisée par les élites progressistes, a pourtant été forgée par la droite américaine dans les années 1970 afin de discréditer la nouvelle gauche. En étudiant les usages politiques, médiatiques et académiques de la « post-vérité », on s’aperçoit que cette notion nous en apprend davantage sur les préjugés de ceux qui l’utilisent que sur les phénomènes qu’elle est censée décrire. Prenant à contrepied le discours dominant, je soutiens la thèse suivante : il ne faut pas craindre l’avènement de la post-vérité mais au contraire s’en réjouir. Car la première vertu d’un citoyen est de savoir mentir, de déformer la réalité afin de la transformer. On comprend ainsi que la post-vérité – et son frère jumeau : le populisme – ne constituent pas une menace pour la démocratie mais la possibilité de sa régénération.

Conférence sur la post-vérité au festival (re)faire société :mode d’emploi, à Lyon. Capture

« Post-vérité », mercredi 20 novembre, de 21h00 à 22h30, à l’Opéra de Lyon. Animé par John Paul Lepers (journaliste) avec :

  • Manuel Cervera Marzal : Manuel CerveraMarzal est philosophe et sociologue, chargé de recherches au FNRS (Belgique).
  • Myriam Revault d’Allonnes : Myriam Revault dAllonnes est philosophe, chercheure associée au CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po) et professeure à l’École pratique des hautes études (EPHE)
  • Maurizio Ferraris : Maurizio Ferraris enseigne la philosophie à l’Université de Turin. Il y dirige le Centre interuniversitaire dontologie théorique et appliquée (CTAO). 

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