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Le premier syndicat dédié au vin naturel créé en France : avance-t-on vers une certification ?

Un syndicat du vin naturel vient de voir le jour. Lancée par Sébastien David, Gilles Azzoni, Christelle Pineau, Eric Morain et Antonin Iommi-Amunategui, cette initiative n’a rien de fantaisiste, elle est même dans les faits essentielle et c’est son président, le vigneron Jacques Carroget, qui nous en explique les contours.

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Une vigne de servanin plantée en 2016 par Sébastien Bénard dans sa propriété de La Buisse. Au fond, la vallée de l'Isère. ©LB/Rue89Lyon

Porteuse d’un engagement clair, une charte a été rédigée qui permet de mieux comprendre le rapport au vin que le syndicat entend promouvoir, reposant notamment sur des principes d’élaboration et de diffusion.

Rue89Lyon : Qu’est-ce qui a motivé la création de ce nouveau syndicat ?

Jacques Carroget : Cela fait longtemps que des gens essaient de le créer, mais ça n’avait pas abouti car il y avait des différences de vues sur un certain nombre de détails.

Puis il y a eu deux événements. Le premier concerne les analyses faites par l’UFC Que Choisir sur des vins natures : deux vins natures contenaient des produits issus de la chimie de synthèse dont on pouvait être certain, au vu de la quantité, qu’il ne s’agissait pas d’apports non-intentionnels. Ce n’est pas possible d’imaginer qu’on fasse du vin nature qui ne soit pas bio. C’est complètement impossible, j’ai été très choqué.

Avec Sébastien David, Gilles Azzoni, Christelle Pineau, Eric Morain et Antonin Iommi-Amunategui, nous avons débattu tous ensemble sur ce sujet : est-ce qu’il fallait avoir une définition du vin nature ? Gilles Azzoni a dit : « Il faut absolument qu’il y ait un engagement ». Qu’il soit moral ou pas. S’il n’y en a pas, c’est clair qu’il y aura des dérives chez les producteurs de vin nature. Et le soir même, on a décidé de lancer cet engagement.

L’objectif visé par la création d’un tel syndicat est-il d’aboutir à une certification, à une appellation « vin naturel » ?

C’est exactement ça, l’objectif est d’avoir l’autorisation de mettre « vin naturel » sur une bouteille, sous certaines conditions.

Quelle différence entre ce syndicat et ce qui existe déjà, l’AVN (Association des Vins Naturels) notamment ?

L’AVN est une association et pas un syndicat, déjà. Mais cela ne se met pas en opposition avec l’AVN, on reconnaît le rôle et le bien fondé de toutes ces asso. Ce qu’on veut c’est une reconnaissance du terme vin naturel. Jusqu’à maintenant cela avait toujours été refusé par l’administration, mais on veut absolument cette reconnaissance.

Jacques et Agnès Carroget, domaine de la Paonnerie. DR

L’idée est-elle aussi et avant tout de bien informer les consommateurs ? On voit beaucoup de producteurs de vin conventionnel et surtout industriel proposer une petite cuvée estampillée « nature » ou « sans sulfite » ou encore « vegan ». Il est temps d’y voir plus clair ?

Forcément parce qu’à partir de ce moment là, la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) pourrait verbaliser certains producteurs, pour usage interdit du terme « vin nature ».

Petite photo « WTF », diffusée par le vigneron David Large, atterré par cette proposition de vin dit « nature », vendu en supermarché.

Le vin est le seul produit alimentaire qui n’a pas l’obligation d’afficher sur son étiquette sa composition exacte, tous les ingrédients qu’il contient. Faut-il changer cela ? 

Je crois que c’est déjà en cours au niveau européen, cela risque de changer. Il y a déjà la notion de sulfite, qui est marqué sur la bouteille. Notre définition du vin nature nous suffit, à la limite, puisque c’est sans intrants.

Certains vignerons qui travaillent en « nature » ne veulent pas de certification ou d’encadrement, que leur dites-vous ?

Ils ne veulent pas mais dans ces conditions-là, ils n’utiliseront pas le terme de vin « nature ». Après, nous ne sommes pas là pour imposer quoi que ce soit à quelqu’un.

Peut-on attendre des vignerons qu’ils soient fers de lance d’une forme de révolution agricole, en tout cas d’une prise de conscience environnementale, sanitaire ?

C’est l’essence même du vin nature ! Le vin nature, c’est profiter simplement des modes de production qui nous sont apportés par la nature pour résoudre techniquement des problèmes qui sont actuellement réglés par force d’énergie, de technique, d’OGM, de ce que vous voulez… C’est à nous de bien connaître la nature, sa façon de fonctionner et d’être à fond. C’est le fondement même de notre affaire. Et c’est à cause de cette position que nous tenons que des gens ne veulent pas entendre parler de nous.

Comment envisagez-vous le dialogue avec les autres syndicats ? Comment allez-vous tenter de déployer votre propos et votre travail de lobbying ?

On l’a déjà fait connaître ! On est en train de prendre un rendez vous avec l’Inao (Institut National de l’Origine et de la Qualité). Je récuse un peu le terme de lobbying, étant donné que nous sommes un syndicat. On va se faire connaître, cela va se faire tout seul, il y a une réelle attente.

Et à la limite, c’est ce qu’on se disait quand on l’a créé, si c’est un échec et que cela ne réussit pas, on ne sera pas vexé outre mesure. On essaie, on n’est pas les seuls à imaginer que c’est important, on a déjà eu des discussions à ce propos,  notre affaire est réfléchie. Je ne suis pas trop inquiet. L’administration est informée. Quelle sera sa réaction ? On verra bien.

De toute façon, on aura des opposants, il y a toujours des gens qui ne veulent pas que les choses évoluent.

Un formulaire d’adhésion a été lancé en ligne. A quoi va servir l’argent récolté ?

Cela va servir à faire fonctionner l’association. Les sommes demandées sont modiques, on demande 30 euros pour l’adhésion, et 20 euros par cuvée. Une fois les charges administratives couvertes, il ne va pas rester grand chose.


#salon des vins naturels

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