Les traces du passé industriel de la ville sont bien là malgré tout, parfois visibles au détour d’une façade ou d’un élément d’architecture conservé. Parfois, le bâtiment, toujours là, a complètement changé de destination. Petit tour d’horizon en photos, un avant/après comme on les aime pour voyager dans le temps.
par Bertrand Enjalbal et Chloé Garcia (recherches et textes), Léo Germain (photos), Gary Ka et François Leconte (développement et graphisme)
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Textile, chimie et mécanique. Voilà le triptyque qui a marqué l’industrie lyonnaise au 19e siècle jusque dans les années 1950. Les fleurons et grandes figures locales ne manquent pas : le constructeur automobile Berliet, les entreprises de textiles Briocher, Gillet ou Robatel ou encore Guimet, Rhodiaseta (Rhône-Poulenc) pour la chimie des textiles.
Un triptyque complété au fil du temps par d’autres activités industrielles comme l’agroalimentaire ou les activités liées à la santé.
432 usines dans Lyon intramuros en 1932
Si les sites industriels ont eu tendance à s’installer progressivement en périphérie de Lyon pour trouver de nouveaux espaces parfois plus grands, beaucoup d’usines se trouvaient à Lyon. C’est une des spécificités de la ville par rapport à d’autres grandes villes françaises, comme le note le service de l’inventaire patrimonial régional. Dans la ville, les usines occupent de surcroît tous les arrondissements.
Ainsi, en 1932 le service a recensé quelques 432 usines dans Lyon intramuros :
Cette carte laisse apparaître un constat : les 7e, 8e et 9e arrondissements concentrent une bonne partie des usines.
Elle montre la très forte emprunte laissée par les usines dans la ville, longtemps intégrées dans son paysage et qui ont à certains endroits également façonné l’organisation du quartier. Avec, là aussi, quelques vestiges architecturaux comme la Cité Jardin dans le quartier de Gerland (7e) construite au début du 20e siècle notamment pour accueillir l’immigration italienne fortement présente dans le quartier qui s’installait directement autour des usines.
En poussant les portes des Petites Cantines, restaurant solidaire du quartier de Vaise, nous avions rencontré Diane Dupré-Latour sa fondatrice.
Conçu notamment pour rompre l’isolement en faisant participer directement les habitants du quartier à la réalisation des repas, le restaurant accueille notamment des « anciens de la Rhodia », du nom de la Rhodiaceta l’ancienne grande usine du quartier.
Que reste-t-il de ce passé ?
Dans Lyon, relativement peu de choses. Quelques grands sites industriels ont été conservés et leur destination modifiée. Les grands abattoirs de la ville, la Halle Tony Garnier, accueillent aujourd’hui des évènements et des concerts.
La manufacture des tabacs est aujourd’hui le site principal de l’Université Lyon 3 ou encore l’usine textile Tase à Vaulx-en-Velin en passe de réhabilitation et en partie transformée en bureaux aujourd’hui.
Le récent incendie de l’usine Lubrizol de Rouen est venu le rappeler : des usines sont toujours présentes dans les grandes villes et les risques industriels liés sont parfois importants. Surtout, bien évidemment, lorsque ces usines sont classées sites Seveso.
L’agglomération de Lyon est particulièrement concernée avec notamment la « vallée de la chimie » et ses entreprises pétrochimiques qui s’étendent de Saint-Fons à Solaize.
Selon l’Inspection des sites classés, il reste aujourd’hui une cinquantaine d’usines classées dans Lyon intra-muros. Parmi elles, trois sont classées Seveso « seuil haut ». Il s’agit de
- « l’entrepôt pétrolier de Lyon »,
- « le dépôt pétrolier de Lyon »
- et « les stockages pétroliers de Lyon ».
Trois sites situés dans le Port Edouard Herriot au sud de Gerland (Lyon 7e). Dans un rayon de dix kilomètres autour de Lyon on recense 10 sites Seveso.
Les grandes familles industrielles ont pour certaines laissé de belles demeures. La Villa Gillet, la maison des frères Lumière ou encore la villa Berliet témoignent encore de ce passé. Elles accueillent pour la première l’institution culturelle du même nom, un musée consacré à ses anciens propriétaires pour la seconde et la fondation du même nom pour faire vivre la mémoire et le passé industriel automobile pour la troisième.
Et puis il y a quelques sites industriels laissés pour certains à l’abandon. Il n’en reste plus beaucoup à Lyon tant les grands projets urbanistiques transforment la ville. L’ancien Marché Gare à Confluence a été complètement rasé et accueille petit à petit ses nouveaux bâtiments autour du siège du conseil régional.
L’ancienne chaudronnerie de la Halle Girard s’apprête à devenir la vitrine de « French Tech » lyonnaise.
Les usines textiles ou pharmaceutiques du 3e arrondissement ont depuis longtemps laissé la place aux grands immeubles de bureaux de la Part-Dieu. Dans le 7e arrondissement, la quartier des Girondins et celui du Bon-Lait (à Gerland) serait méconnaissable pour un ouvrier du début du siècle dernier.
Plus aucune usine, en passe d’être remplacées par un nouveau quartier sorti de terre et où il faudra reconstruire une vie. Les anciennes usines Fagor-Brandt, qui ont accueilli au printemps le festival Nuits Sonores ou actuellement la Biennale d’art contemporain, résonnent au bruit des tractopelles du renouvellement urbain du quartier de Gerland.
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